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Commune rurale de Bouroum : Des orpailleurs, maîtres-pollueurs au cours d’eau de Logbilin

Publié le jeudi 4 octobre 2012 à 22h48min

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Commune rurale de Bouroum : Des orpailleurs, maîtres-pollueurs au cours d’eau de Logbilin

L’orpaillage engendre des conséquences néfastes sur l’environnement dans la commune rurale de Bouroum, province du Namentenga. Cette activité pollue la rivière, qui traverse le village de Logbilin, au grand dam des habitants, qui s’y approvisionnent en eau.

A Bouroum, commune rurale de la province du Namentenga, l’orpaillage occupe presque tout le monde. Hommes, femmes et enfants portent un intérêt particulier à cette activité, qui peut enrichir le premier venu, pour peu que l’on ait la chance. Seulement, l’orpaillage y est pratiqué dans le désordre, ce qui n’est pas sans conséquences sur l’environnement. Dans le village de Logbilin, les habitants, avec en tête le conseiller, le vieux Nayinsa Ouédraogo, commencent à s’inquiéter face à la pollution du seul cours d’eau de la localité. L’eau de la rivière, regrettent, amèrement, le conseiller et les siens, a changé de couleur, sous l’effet des souillures, issues des activités de l’orpaillage.

« Du fait de l’orpaillage, la rivière a changé de couleur. Et quand on boit l’eau, on a des maux de ventre. Certains d’entre nous se plaignent même de rétention urinaire », a lâché, dépité, le conseiller du village. Boureima Tapsoba, major du Centre de santé et de promotion sociale (CSPS) de Barga, village proche de Logbilin et situé de l’autre côté de la rivière, a effectivement fait cas de patients, souffrant de douleurs abdominales, sans pour autant attribuer leur mal à l’eau de la rivière. « On ne peut pas connaître les vraies causes du mal, puisqu’on n’arrive pas à faire des examens ici. Il faut faire des examens poussés pour en avoir la certitude », a-t-il précisé. Le conseiller du village a également relevé : « Des animaux meurent en buvant l’eau de la rivière. Certains d’entre eux n’arrivent pas à mettre bas ». Pour lui et les autres habitants, à l’image d’Amadou Kaboré, « l’ensablement » de la rivière est à redouter, puisqu’elle est en train de « se boucher » au fil des jours.

Le départ des orpailleurs souhaité

Au vu des désagréments « liés » à l’orpaillage, le conseiller du village est catégorique : « Nous voulons le départ des orpailleurs ! ». D’ores et déjà, il a prélevé une petite quantité de l’eau de la rivière, qu’il a mis dans un bidon et transmis au maire de Bouroum, Yoro Soumaila Signam. Aussi celui-ci a-t-il interpellé le président du syndicat des orpailleurs de Bouroum, Rasmané Boly, à propos de la situation qui prévaut. « Le maire m’a saisi. Nous allons faire comprendre aux orpailleurs que leur activité pollue la rivière. Nous l’avons déjà fait avec d’autres, au début de la saison pluvieuse, à qui nous avons signifié qu’il est interdit de pratiquer l’orpaillage à côté d’un cours d’eau où boivent les hommes et les animaux », a confié le responsable syndical.

En effet, et c’est devenu presqu’une tradition pendant la saison pluvieuse, les orpailleurs, venus de divers horizons, installent des machines broyeuses de minerais à proximité des cours d’eau, pour rechercher l’or. C’est le cas à Logbilin. De nombreux orpailleurs sont en activité depuis environ deux mois, à côté de la rivière, à la désolation des habitants. Pour la plupart des jeunes, ils ont implanté leurs machines, couramment appelées en mooré « Wamb yaaré », à proximité de la rivière, d’où ils pompent l’eau, au moyen des groupes électrogènes équipés de tuyaux. Les eaux usées de leurs activités retournent à la rivière, la polluant, après coup. « Nous sommes conscients que nos activités polluent l’eau, mais qu’allons-nous faire ?

Nous cherchons notre pitance quotidienne », a soutenu, l’un d’eux, Jean-Marie Soudré, 26 ans. Idem pour Ibrahim Bamogo, la trentaine. Ont-ils reçu une autorisation préalable avant d’implanter leurs machines broyeuses, comme le stipule la réglementation communale ? « Nous sommes analphabètes, nous ne savons pas comment ça se passe. Nous sommes venus nous installer seulement », a avancé Jean-Marie Soudré. Savent-t-ils qu’il est interdit de faire de l’orpaillage à proximité d’un cours d’eau où boivent les hommes et les animaux ?

Non plus, ont-ils répondu. Ignorants, certains orpailleurs disent percevoir tout de même la nécessité de quitter les lieux, ce d’autant plus que les habitants de Logbilin se font de plus en plus menaçants. « Nous cherchons déjà un autre point d’eau pour nous réinstaller », a affirmé l’un d’eux. D’autres comme Jean-Marie Soudré espèrent que les autorités communales les aideront à trouver des endroits « appropriés », car ils veulent « préserver » leur emploi.

La réglementation méconnue

Les orpailleurs, à majorité analphabètes, disent ne pas être informés de la réglementation. Malgré les communiqués radiodiffusés rappelant la réglementation, a fait observer le Secrétaire général (SG) de la mairie, François Xavier Lessogo, le désordre persiste. Que faut-il faire alors ? « On sera obligé de recourir à la force, un jour », a-t-il indiqué. En attendant, a poursuivi le SG, la mairie a initié, depuis août 2012, un recensement des exploitants traditionnels et artisanaux des sites aurifères de la commune de Bouroum. Cette opération, a-t-il souligné, vise la sensibilisation aux dangers de l’orpaillage et la mobilisation des recettes au profit de la collectivité. Selon la réglementation, une taxe annuelle de 25 000 F CFA est perçue sur chaque machine broyeuse de minerais.

A Logbilin par exemple, a affirmé le SG, une trentaine de machines, a été recensée. « Neuf propriétaires de machines ont déjà payé la taxe au profit de la commune », a-t-il avancé. Au sujet des problèmes environnementaux engendrés par l’orpaillage, l’agent du Ministère de l’environnement et du développement durable en service à Bouroum, Daouda Barry, regrette que « les orpailleurs s’installent d’une manière anarchique, aux abords des cours d’eau naturels ». A l’écouter, son département entend travailler, de concert avec la mairie, à la sensibilisation des orpailleurs aux conséquences de leurs activités sur l’environnement.

L’organisation de sorties sur le terrain, a-t-il martelé, est en vue. Le préfet de Bouroum, Florent Daboné, a aussi déploré les conséquences désastreuses de l’orpaillage sur l’environnement, avant d’ajouter : « C’est une activité un peu secrète. On ne sait pas réellement qui fait quoi, si bien qu’il est difficile d’agir avec efficacité ». Aussi, le manque de poste permanent de police ou de gendarmerie à Bouroum pose problème à son avis, surtout en cas de violation de la loi par les orpailleurs.

Kader Patrick KARANTAO (stkaderonline@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 5 octobre 2012 à 09:26, par aliende En réponse à : Commune rurale de Bouroum : Des orpailleurs, maîtres-pollueurs au cours d’eau de Logbilin

    Merci pour cet écrit !!!
    La même chose se passe partout où l’orpaillage sauvage se développe auprès d’un cours d’eau. Je citerai l’exemple du fleuve Comoé du côté de Niangoloko, dans des hameaux de culture de Gbagbar, Bolibana. les populations sont obligées de boire l’eau du fleuve parce qu’elles n’ont pas de forage. Ainsi plus de 500 personnes s’exposent tous les jours à un empoisonnement du fait de l’orpaillage.
    Qui doit les protéger ?

  • Le 5 octobre 2012 à 11:52, par synetik En réponse à : Commune rurale de Bouroum : Des orpailleurs, maîtres-pollueurs au cours d’eau de Logbilin

    Ne vous en faites pas les gars, lorsqu’on aura pollué l’eau et qu’elle ne sera plus buvable, on boira l’argent qu’on a eu avec la vente de l’or !

  • Le 5 octobre 2012 à 12:36, par sirssane En réponse à : Commune rurale de Bouroum : Des orpailleurs, maîtres-pollueurs au cours d’eau de Logbilin

    C’est inadmissible qu’on laisse faire de telles choses. Sous le prétexte de chercher de l’or, on en vient à rendre les populations malades.
    Qu’attendent les autorités pour agir et mettre fin à de telles pratiques qui, à la longue, risquent de foutre la merde dans le pays.
    Vivement que des sanctions soient prises pour réprimer sévèrement de telles pratiques.

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