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Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

Publié le lundi 24 septembre 2012 à 09h49min

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Les primaires du parti constituaient le véritable premier test de légitimité de la nouvelle équipe dirigeante du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP). Sur la trentaine de membres, dix-sept ont réussi à tirer leur épingle du jeu. Par contre, des ministres et députés sont tombés et les femmes ne font pas bonne figuration.
La dernière semaine du mois d’août a vu le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le parti au pouvoir, organiser ce qu’il appelle « les Primaires du parti ». Plus de six cent (600) candidats se sont soumis à l’appréciation de leurs bases respectives dans les quarante-cinq (45) circonscriptions électorales du pays. L’appréciation des candidats s’est faite sur la base de quatre critères (le degré de militantisme, la moralité, la popularité et la contribution du candidat à la victoire).

Ce sont des questions fermées et les membres des collèges électoraux n’avaient qu’à se prononcer entre le oui et le non ou tout simplement s’abstenir.
La première observation, c’est la débâcle des députés sortants. Dans la législature finissante, le CDP compte 73 élus. Parmi eux, une cinquantaine a sollicité les suffrages des militants. A l’arrivée, une trentaine n’a pas eu les faveurs des collèges électoraux pour figurer sur les listes des titulaires. Les dinosaures comme Joseph Kaboré (plusieurs fois ministre et député), Jean Léonard Compaoré, qui ont la particularité d’avoir été de manière discontinue ministres et députés ces vingt dernières années ont été désavoués par leurs bases respectives dans le Ganzourgou et l’Oubritenga.

D’autres cumulent trois législatures de suite, mais ont néanmoins sollicité l’investiture du parti. La sanction des membres des collèges électoraux a été très cinglante à leur endroit. Parmi ces recalés figurent les députés Victor Tiendrébéogo (le Larlé naaba), Blaise Lambert Kyelem et Blandine Sawadogo/Ouédraogo. L’époux de cette dernière, Laya Sawadogo a été également battu dans sa province, le Soum. Les députés qui ont eu plus de baraka sont très peu à occuper cependant le peloton de tête dans leur circonscription. Mélégué Maurice Traoré, ancien président de l’Assemblée nationale, Naboho Kanidoua, ancien président du parti n’arrivent pas en tête dans leurs provinces, la Léraba et le Tuy. La député Gisèle Guigma est aussi devancée dans la Sissili par son plus que rival, le maire de Léo, Yacouba Diakité. Si les députés font pale figure, les ministres semblent mieux lotis, même si là aussi, on trouve des recalés et des mal classés.

Si le Premier ministre, Luc Adolphe Tiao, et certains de ses ministres tels ceux de la Fonction publique, Soungalo Appolinaire Ouattara, de la Recherche scientifique, Gnissa Isaïe Konaté et de l’Elevage, Jérémy Ouédraogo n’ont pas eu de difficulté à bien se positionner dans leurs provinces d’origine, le Sanguié, le Houet, la Kossi et l’Oubritenga, on ne peut pas dire autant de certains de leurs collègues. Jérôme Bougma (Zoudwéogo), Baba Hama (Séno), Jean Coulidiati (Tapoa) occupent la deuxième place dans leurs provinces respectives. Si tous ceux-ci sont relativement bien appréciés par la base du parti, d’autres en revanche ont mordu le carreau à l’instar des ministres Achille Tapsoba, Arthur Kafando au Kadiogo ou le porte-parole du gouvernement, Alain Edouard Traoré dans la Comoé. Qu’en est-il des membres du secrétariat exécutif national, la nouvelle direction du parti ?

La nouvelle équipe sauve sa face

Dans l’ensemble, ils s’en sortent bien avec presqu’une vingtaine qui arrivent à bien se positionner. Toutefois, il y a des échecs retentissants comme ceux du secrétaire aux grandes consultations électorales Jean Léonard Compaoré et son adjointe Cathérine Ouédraogo qui ont reçu une douche froide respectivement dans l’Oubritenga et le Zandoma. Les partisans de cette dernière ont organisé une marche de protestation à Gourcy. Ses partisans contestent le classement qui met en tête le député Lassané Sawadogo et une autre Cathérine qui se trouve être la sœur du chef de Gourcy, le non moins PCA de la société minière SEMAFO, Elie Justin Ouédraogo. A part la première Cathérine, les primaires ont fait un autre mécontent dans le Zandoma. Il s’agit de Mahamoudou Ouédraogo, le fils de la Belle-mère nationale, Alizèta Ouédraogo.

Le père, Tahéré, déjà député, voulait transmettre l’écharpe à son fils, mais les militants du parti l’ont désavoué. Dans la Sissili, c’est le secrétaire à la formation politique et civique du parti, Traoré-Nignan Moïse qui a été scalpé. Les jeunes loups du parti ont été également désavoués par leurs bases respectives. Gaston Soubeiga, Alpha Yago, Salam Dermé et Marcel Kouraogo, tous de la cuvée FEDAP/BC, ont été laminés chez eux. Gnama Paco Drabo et Ambroise Tapsoba, les animateurs vedettes de la FEDAP/BC, partagent le même sort. Les anciens caciques du parti ont préféré s’abstenir. Au Kadiogo, il n’y a pas de trace de candidature de Roch Kaboré et de Simon Compaoré.

Au Yatenga, les partisans de Salif Diallo ont beau crier, leur mentor s’est refusé de postuler, laissant le champ libre à Boureima Badini. Dans le Boulkiemdé, Juliette Bonkoungou a brillé par son absence. Ont-il cependant réussi à placer leurs partisans ou supposés comme tel ? Au Kadiogo, Zakaria Sawadogo (maire de Nongre-Massom, en disputes constantes avec les militants FEDAP-BC) et le député Salif Tiemtoré respectivement proches de Simon et de Roch ont réussi à se placer dans le top 10. Zakaria est le mieux placé (4ème), mais il a son sort entre les mains de ses adversaires du parti qui ont le dernier mot sur la liste définitive du parti. On sait qu’il n’est pas du tout en bons termes avec le secrétaire exécutif national. Dans l’arrondissement, ils se livrent une bataille sans merci dont la dernière en date est cette histoire de terrain de football des jeunes vendu à un opérateur économique. Dans la Tapoa, l’ex-Premier ministre Paramanga Ernest Yonli a subi une défaite cinglante qui, dans les démocraties avancées, lui aurait coûté son poste de président du Conseil économique et social (CES).

François plus crédible qu’Assimi ?

Au Kadiogo, ils étaient 62 à solliciter les suffrages des 141 militants responsables à divers niveaux du parti (section provinciale, communale, représentants des anciens, des femmes, des jeunes etc.). La course aux neuf sièges de la province a mobilisé aussi bien des personnalités bien connues au niveau national car occupant des postes de responsabilité publique que des personnes anonymes. Parmi ces postulants, on dénombre en effet deux ministres (Achille Tapsoba de la Jeunesse et de l’Emploi et Arthur Patindé Kafando du Commerce), quatre députés (le Larlé naaba, Salif Tiemtoré, Blandine Sawadogo et Eulalie Yerbanga), trois maires d’arrondissement (Casimir Ilboudo, Pascal Ouédraogo et Zakaria Sawadogo). Citons aussi l’ex-ministre de l’Administration territoriale (Clément Sawadogo) et l’ex-gouverneur Boureima Bougma. De tous ces prétendants aux postes de titulaires de la province, seuls trois se positionnent dans le top des neuf.

Il s’agit du député Salif Tiemtoré, du maire Zakaria Sawadogo et de l’ex-gouverneur Bougma. Les deux ministres et trois députés sortants sont largement distancés. Aucun d’entre eux n’a pu réunir cent (100) voix autour de sa personne sur chacun des quatre critères. La curiosité du classement du Kadiogo, c’est la position de François Compaoré, secrétaire chargé du mouvement associatif au sein du parti, qui trône seul en tête sur tous les quatre critères retenus pour évaluer les postulants. C’est lui qui mène le bal devant son ami de la mairie de Ouagadougou, Jean Christophe Ilboudo et le secrétaire exécutif national Assimi Kouanda. Sur chacun des quatre critères de notation, François est le seul à rassembler autour de lui plus de 120 voix sur les 141 votants. Même là où on croyait être son talon d’Achille, à savoir « la moralité du candidat », il distance tous ses concurrents, y compris le premier secrétaire du parti. Les militants le jugent plus probe (124 voix) que Assimi qui récolte 117 voix là où on le voyait engranger plus que tout autre. Autre curiosité, personne n’a voté contre personne au Kadiogo.

Est-ce dû au mode de scrutin à la main levée ? Mais par abstention, il fallait comprendre peut-être par vote négative. Dans ce registre, François Compaoré a eu ses plus mauvais scores dans les critères « militantisme et moralité » où il totalise 124 voix contre 17 abstentions. L’ex-député Mahamadi Kouanda figure parmi ceux qui n’inspirent pas confiance aux militants. 123 votants jugent sa moralité douteuse contre seulement 18 qui lui font confiance.

La base ignore le quota genre

Depuis des années, le discours du parti est à la promotion des femmes aux postes de décision. Mais ce discours a du mal à se concrétiser en actes sur le terrain. Si au niveau des communes, il a pu dépasser les 30% de femmes élus, on est loin du compte au niveau du parlement où elles sont 13 élues sortantes contre 60 hommes, soit 17%. Ces primaires risquent de ne pas changer la donne au regard des résultats observés sur le terrain. Vingt-six (26) femmes arrivent à bien se positionner sur les places de titulaires dont seulement trois occupent la tête du classement dans leurs provinces. Il s’agit de Pascaline Tamini dans le Tuy, de Fatoumata Diendéré/Diallo dans le Passoré et de Sarah Séré/Sérémé (et non de Clémentine Dabiré/Binso comme écrit dans la version papier de notre journal) dans le Sourou.

Ce classement dans le Sourou a d’ailleurs soulevé des vagues de protestations violentes dans le chef-lieu de la province. La ville de Tougan a connu des journées chaudes après les primaires. Le domicile de la député sortante Sarah a été incendié suite à une contre manifestation à la marche organisée par ses partisans. De nombreux observateurs pensent qu’elle a déjà perdu la guerre dans cet affrontement fratricide car on verrait mal comment le parti oserait prendre le risque de la positionner au regard de la situation qui y prévaut. Peut-être sera-t-elle sur la liste nationale pour calmer la situation. Les défenseurs de la loi sur le quota comptent également sur la liste nationale et les « corrections » du secrétariat exécutif au niveau de certaines provinces pour pousser la barre du positionnement des femmes sur les listes à la députation à 30%. Mais en attendant, la base n’a choisi que 26% de femmes pour la représenter.

La situation au Kadiogo est particulièrement catastrophique pour les femmes. Une seule femme (la journaliste Benjamine Douamba) a réussi la prouesse d’être dans les dix premiers. Elle occupe la cinquième place. Si les choses restent à l’état, le CDP n’a aucune chance de faire élire une femme dans la capitale. Si on se table sur les résultats du parti depuis 2002, on voit qu’il n’a plus dépassé quatre sièges dans le Kadiogo. C’est dans le Houet qu’il y a parité sur les six premières places. Mais cette parité est trompeuse car les trois femmes (Assita Ouattara, Fatoumata Ouédraogo et Naba Diané) occupent les trois dernières places. Là également, si les tendances n’ont pas évolué, elles risquent de faire les frais de la concurrence des autres partis qui ont réussi jusque là à arracher trois sièges dans cette province. A moins de l’effet Soungalo, on ne voit pas comment le CDP pourrait dépasser trois sièges dans cette partie du pays dont les habitants ont l’impression que le pouvoir actuel les a abandonnés avec les usines qui ferment ou délocalisent.

François se maintiendra-t-il au Kadiogo ?

C’est la grande question. Après la surprise du classement où il trône en tête, on se demande si le secrétaire chargé du mouvement associatif du parti va figurer sur la liste définitive à la députation de la province. Dans le CDP, certains pensent que ce ne serait pas une bonne option, malgré la bonne appréciation du candidat par la base. Pour eux, la « soudaine popularité » de François est trompeuse et illusoire. Il se sussure que François a mené une véritable campagne pour se faire adouber par les membres du collège électoral du Kadiogo. L’argent aurait circulé et beaucoup de promesses faites lors de la mobilisation pour la rencontre entre François et les associations de la province en juillet dernier.

Les passerelles entre certaines associations et le parti étant ce qu’elles sont, certains ont vite fait le lien avec les résultats des récentes primaires. Celles-ci ne seraient donc pas un bon baromètre pour juger de l’assise réelle de certains candidats sur le terrain. L’assise sociale, c’est tout ce qui manquerait à certains prétendants. François fait-il partie de ceux-là ? C’est la conviction de beaucoup. Son image négative dans l’opinion après les affaires David Ouédraogo et Norbert Zongo ne plaiderait pas non plus en sa faveur dans la capitale. Sa candidature risquerait de faire perdre beaucoup de voix au parti et c’est l’opposition qui se frotterait les mains. Acceptera-t-il pour autant d’aller voir ailleurs, sur la liste nationale par exemple ? Cela est peu probable. François est conscient de tout ce qui se dit contre lui, mais nous parions qu’il conduira la liste au Kadiogo pour montrer à ses détracteurs qu’il a une véritable base sur laquelle s’appuyer pour réaliser ses ambitions politiques, au risque d’affaiblir davantage son parti.

Abdoulaye Ly

MUTATIONS (mutations.bf@gmail.com)

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Vos commentaires

  • Le 24 septembre 2012 à 09:03 En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    Si le vote est à main levée, on vote celui qu’on craint c’est à dire qui a des capacités de nuisance très élevées.

  • Le 24 septembre 2012 à 09:09, par un frère En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    Félicitation au CDP, cette démarche est très honorable mais si comme toute œuvre humaine elle n’est pas parfaite. Le changement entrepris dans le parti est louable mais il faut prendre garde de ne pas chasser les lions et laisser les rentrer les chacals et les hyènes.
    Je trouve vraiment dommage pour le CDP que François passe pour être le plus apprécier des candidats. Cette victoire est celle de l’argent, de la corruption, de la concussion, de l’égocentrisme et de l’ignorance.
    Mais garder en mémoire que chez nous il y a un adage qui dit que : quand tu te chatouilles et puis tu ris tu ne flattes personne tu te flattes toi-même.
    François et ses amis peuvent se flatter et croire qu’il file un parfait idylle avec le peuple ou encore la base du CDP. Du reste le contraire des résultats nous auraient fortement étonné, car je pense que cette valeur est bien partager dans sa famille, son frère n’avait pas soit disant bénéficier de plus à 98% des suffrages pour les présidentiels. Mais nous connaissons tous la suite de l’histoire.
    L’argent est maître dans le royaume de la pauvreté et de la misère qu’est le Burkina que Blaise Compaoré a mis en place et entretenu depuis bientôt 30 ans.

  • Le 24 septembre 2012 à 09:47, par CDP 100% En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    Quand est ce que les jeunes diplômés vont pouvoir s’inscrirent sur les listes du CDP, on a toujours les mêmes avec de scumules de poste soit Député et Ministre , il faut que le CDP arrête les dégats faites, les jeunes et ne peuvent pas continué a supporter les vieux qui mettent plein de pognos dans les poches et qui ne cessent pas de battre contre x ou y pour se positionner. le plus jeunes député CDP a quel âge vous pouvez nous dire ?

  • Le 24 septembre 2012 à 10:24, par hum En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    Très bel article ! Mon frère, tu as dit les choses telles quelles sont, ie sans griotisme ni intoxication. Le CDP ferait mieux de te prendre comme conseillé ! Journaliste franc, Bravo !

  • Le 24 septembre 2012 à 11:02 En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    pour moi part recaler ou pas c’est pas ossi grave. la vraie question pour le peuple c’est ou va les milliards de nos mines d’or.

  • Le 24 septembre 2012 à 11:05, par Madi Kadhafi En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    On attends de voir la suite.
    Moi je crois que le CDP va connaitre un vote sanction contre ses candidats.

  • Le 24 septembre 2012 à 17:34, par le democrate En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    un ministre ou un DG qui n’arrive pas à remporter le primaire doit démocratiquement démissionner !!!!!!!!!

  • Le 25 septembre 2012 à 12:22, par Ogothème En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    Je pense que pour le respect du genre, il faut imposer une femme au moins dans chaque province d’autant qu’il y a au moins 2 députés par province. Sinon, que les électeurs votent massivement les partis qui auraient suffisamment de femmes dans les listes.

  • Le 25 septembre 2012 à 12:32, par Ogothème En réponse à : Primaires du CDP : Les grandes tendances en attendant le chambardement

    AH bon ? Il y a eu des primaires au CDP ? Vivement que cela ne soit pas pour nous distraire.

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