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Médaille d’honneur ou de déshonneur

Publié le jeudi 6 septembre 2012 à 23h11min

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Médaille d’honneur ou de déshonneur

« Monsieur … annonce la perte de sa médaille d’honneur sur l’axe… prière à toute personne qui l’aurait retrouvée de la rendre à la radio … en échange d’une récompense ». Je n’en revenais pas du tout et pourtant c’est vrai. Un monsieur décoré de la médaille d’honneur l’a perdue le même jour sur la route de Kossyam. Le choc, on peut perdre son portable, son chien, même sa femme mais pas sa médaille quand même ! Les résultats de plusieurs années de souffrances, de sacrifices au service de la nation… le signe de la réussite, de la connaissance et de la reconnaissance … Ce type qui l’a perdue sur la route, je suis sure qu’il n’a même pas annulé l’invitation de ses chers potes à la maison pour l’exhibition de richesse. Alors, méritait-il cette distinction ?

Voilà ce que pense la majorité des burkinabè lorsqu’ils suivent ces grandes cérémonies de décorations. Des conseillers municipaux voleurs de parcelles médaillés d’honneur. Des fonctionnaires dealers de fournitures et corrompus jusqu’à la moëlle des os médaillés d’honneur.

Votre voisin du quartier faux type, endetté jusqu’au cou, arnaqueur dans des associations bidons, deux fois médaillé d’honneur…

Je peux encore donner des exemples et des exemples. .. Qu’ont-ils mérité ? En pratique, ne peut prétendre à cette fameuse médaille de 32 mm de diamètre, en bronze patiné, suspendue à un ruban simple de 37 mm de large les candidats, des deux sexes de nationalité Burkinabè, remplissant les conditions suivantes :

Avoir 25 ans d’âge minimum,

Avoir 10 ans de service pour les fonctionnaires,

Jouir de ses droits civiques. à titre exceptionnel :

Les nationaux ne remplissant pas les conditions requises d’âge, de durée de service ou d’ancienneté de grade pour être proposés à titre normal, mais dont les services extraordinaires rendus justifient une proposition à titre exceptionnel ;

Les étrangers qu’ils soient domiciliés ou non au Burkina Faso. Sont proposés à titre posthume les nationaux et les étrangers décédés à la suite d’un acte de courage ou de dévouement ou après une vie particulièrement méritante de travail dans les domaines précités à l’article 1er et qui n’ont pas été de leur vivant, membres de l’Ordre. La nomination doit être faite dans un délai de six mois après le décès de la personne proposée.

Il faut dire que toutes ces personnes doivent normalement être des exemples

En principe, je dis bien en principe, ma mère par exemple a été l’une des pionnières dans la traduction des documents en langues. En tant que présidente de la commission du Moore depuis 15 ans, elle a participé et traduit un grand nombre de documents(le dictionnaire en mooré, le code des personnes et de la famille, lutte contre l’excision, le droit des enfants …) fonctionnaire exemplaire depuis 1965 à la retraite en 2000. Résultats, petite retraite sans aucune médaille. Est-ce parce qu’elle n’a jamais fait de la politique dans un parti donné ? Ou parce qu’elle n’a jamais léché les pattes d’un patron ? Je me pose la question et quand je lui demande elle me répond : « ma chérie, c’est comme cela. Je ne sais pas comment, ils choisissent mais c’est leur choix, laisse tomber. »

Ils se tournent donc ainsi les pouces en attendant peut-être que ces honorables trépassent ; ça c’est courant les médailles à titre posthume. Un jeune sapeur pompier mort en exercice, un policier tué en mission… vraiment ça, c’est bien. Félicitation pour ces gestes qui nous encouragent tous à redoubler d’ardeur. Mais je me rappelle par exemple la mort de Djata, artiste musicienne qui a toujours été là, qui s’est battue pour être d’actualité. A son décès brutal, une médaille belle et brute pour son œuvre. Ils sont combien les gens qui ont volé à son secours quand elle vivait et cherchait secours ? Pour tout le monde, c’était la meilleure artiste féminine du pays. Pourquoi on n’a jamais su, fait et dit tout cela quand elle vivait ? Ça me fait mal et Djata je suis sure aurait refusé. Des artistes le disent un peu comme Génération 2000. « N’attendez pas qu’on meure pour nous dire que ce qu’on fait est exceptionnel ». Pierrette Adams l’a chanté : « Réussissez on vous en veut absolument, échouez vous êtes les bienvenues chez les fainéants, mourez on vous reconnaîtra des talents ».

Même moi je veux une médaille ! Belle et reluisante pour l’afficher dans mon salon et me dire que j’ai bien fait de vivre et que j’ai bien vécu. Mais si ces hommes peu méritants continuent à les collectionner, je préfèrerai peut être ma médaille naturelle ; celle d’être un être humain, d’être une femme, d’être une mère, de faire mon travail quotidien et de participer comme tout le monde à l’œuvre nationale. Est-ce qu’une médaille physique pourra changer cela ? Je ne crois pas. On a donné l’occasion à nos athlètes de nous en ramener des Jeux Olympiques mais ils n’en ont même pas voulu. Mais bravo, ils sont là, c’est super. c’est quand même mieux que les Ivoiriens et Camerounais qui ont pris la poudre d’escampette (disparus) juste entre parenthèses.

Alors comme nous sommes à quelques mois de ces distinctions mesdames et messieurs, faites de bons choix, faites de bonnes enquêtes de moralité, et pensez réellement à ceux qui se battent dans l’ombre sans prétention, ni fanfares pour que nous soyons ce que nous sommes. Une grande médaille à moi. Hi hi hi !!! Parole d’une Raï’S qui ne refusera pas sa médaille s’il y en a une.

Par Bendré

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