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Autant le dire… : Quand les Maliens auront besoin des autres

Publié le mardi 14 août 2012 à 00h35min

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Après la junte et les politiques, les religieux de Bamako s’affichent. Plus de cinquante mille Bamakois ont prêté attention à leur dire. Et comme on pouvait s’y attendre, des opportunistes étaient aux aguets. Reconduit à son poste, l’ex et le tout nouveau Premier ministre, Cheick Modibo Diarra a profité de l’occasion pour surfer sur son aura auprès des fidèles musulmans. Puisqu’avant sa reconduction, il a eu l’honneur d’être acclamé par les partisans de Mahamoud Dicko, président du Haut conseil musulman du Mali. Un jeu dangereux qui ne manquera pas de relever davantage la sournoiserie des politiques bamakois. En reconduisant le Premier ministre, Dioncounda Traoré aussi semble tanguer. Après un tour de force et de reprise en main des affaires, l’homme est visiblement pris en sandwich. Il avait consulté des jours durant les différentes forces de Bamako et dépossédé le chef du gouvernement de ses prérogatives majeures pour finir par adopter le statu quo.

Ce qui rime avec la tour de Babel qu’est devenue la capitale malienne depuis le déclenchement de la crise. Où on ne parle jamais le même langage. Entre les partisans et les opposants de l’ex-junte, le dialogue n’était déjà pas au beau fixe. Avec l’irruption et l’implication significative à venir des leaders des associations musulmanes dans la résolution de la crise, on peut dire que les risques de dissensions sont grands. Le nerf de la guerre pouvant facilement corrompre la bonne foi, les fortunés postulants au gouvernement d’union nationale n’hésiteront pas à débloquer les sous. En s’arguant du soutien de tel ou tel dignitaire religieux, les caciques du pouvoir nourriront encore le désordre et la désunion qui freinent la reconquête du Nord.

Et pourtant, l’unification du pays passera forcement par la cohésion et la synergie des actions à Bamako. En attendant un sursaut d’orgueil et une mise en avant de l’intérêt supérieur de la nation malienne, les leçons de courage viennent des régions du Nord. La jeunesse de Kidal, lasse d’être lâchée s’organise à la mesure de ses moyens. Ils initient et s’engagent à contrer les islamistes avec les moyens dévolus. Sans trompette, ils contraignent les séparatistes ou partisans de la charia à un peu plus de modération. Pendant qu’à Bamako, les ténors politiques prennent du plaisir à afficher des différends dont le pays n’a que cure. Pendant ce temps, les islamistes traumatisent les 2/3 du territoire malien. Sans être des mordus de la loi, les seigneurs du Nord Mali semblent être plus sûrs, mieux organisés et enclins à leur tâche. Comme un gouvernement d’union nationale.

Ce qui laisse croire que le problème actuel du Mali ne se trouve plus au Nord, mais à Bamako. Où personne ne veut rater la moindre occasion de goutter aux délices du pouvoir. Alors que le pays est en proie à la partition. Aussi, au début de la crise malienne et face aux tergiversations de la classe politique et d’une partie de la société civile, nous nous interrogions si ça valait la peine d’obliger les Maliens à accepter le soutien des pays de la sous-région. Car, même si nous n’avions pas raison, la situation suffisamment confuse aujourd’hui à Bamako, laisse penser qu’il sera difficile de soutenir d’une manière ou d’une autre les Maliens.

Qui croient malheureusement que le problème des islamistes au Nord de leur pays ne concerne qu’eux seuls.
Au regard de tout ce qui précède, il ne serait pas mauvais que la CEDEAO, à travers son médiateur Blaise Compaoré, revoit sa stratégie. Koffi Annan, après avoir constaté que la crise syrienne ne peut pas se résoudre par le dialogue, n’a-t-il pas rendu, gentiment, sa démission ? Pour s’occuper d’autre chose. Quand les Maliens auront besoin du « sigi gnongon ya gnouman * », ils feront appel.

*Sigi gnongon ya gnouman : le bon voisinage en langue dioula.

Dabaoué Audrianne KANI

L’Express du Faso

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