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Crise ivoirienne : Gbagbo franchit la ligne rouge

Publié le vendredi 5 novembre 2004 à 07h35min

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Le Gal Mathias Doué

Le bombardement hier, des zones sous contrôle des Forces Nouvelles par l’aviation des FANCI vient confirmer ce qui était une évidence depuis janvier 2003 : le dialogue politique n’est qu’une vue de l’esprit tant que Gbagbo sera aux affaires en Côte d’Ivoire.

Alors que le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en Côte d’Ivoire, Albert Téovodjré s’échinait à renouer les fils du dialogue politique rompus après la sortie calamiteuse d’Affi N’Guessan dans les médias.

Ainsi donc, l’aviation ivoirienne a bombardé jeudi un camp militaire tenu par les Forces Nouvelles dans la ville de Bouaké. L’objectif de ce que le colonel Philippe Mangou, un responsable militaire en charge des opérations a qualifié de "prélude" à la reprise d’une offensive à grande échelle, "reconquérir notre territoire et réunifier la Côte d’Ivoire" (propos du même colonel).

En réaction à ce raid aérien, le chef militaire de la région de Bouaké, Chérif Ousmane a déclaré que "la guerre a recommencé".

Cependant, un porte-parole de l’armée française, le colonel Henri Aussavy a confirmé le bombardement, tout en indiquant que cela semblait être "une action limitée". Une attaque qui survient dans un climat politico-militaire délétère avec le départ des ministres du G7 (PDCI/RDA, RDR, Forces Nouvelles, UDPCI) du gouvernement de réconciliation nationale de Seydou Diarra et la maladie "diplomatique" de ce même Seydou Diarra qui n’a pas remis les pieds à la primature depuis le 29 octobre dernier. Par ailleurs, depuis le 31 octobre 2004, les FANCI ont fermé les frontières avec les "zones assiégées" (entendez les zones sous contrôle des Forces Nouvelles) et des sources généralement bien informées nous apprennent que quatre tueurs à gages étaient aux trousses de Bédié et de Alassane Ouattara lors de leur rencontre à Paris.

Les mêmes sources indiquent que "le Front populaire ivoirien (parti présidentiel) n’a pas renoncé à son projet d’assassiner les leaders politiques réfractaires à sa politique". Pour clore cette atmosphère belliciste des troupes de "jeunes patriotes" sont en train d’être massées à Tiébéssou en attendant le "mot d’ordre" de leur dirigeant suprême, le mercenaire de la politique et piètre rhétoricien Charles Blé Goudé, surnommé "le voleur de diplômes" dans certains cercles.

Jusqu’au bout de sa logique

Cette résurgence du conflit militaire en Côte d’Ivoire ne surprend aucunement, si tant est que Laurent K. Gbagbo avait préparé cette occurrence aussitôt après la signature du premier accord de cessez-le-feu le 17 octobre 2002 sous l’égide de la CEDEAO. Aussitôt l’accalmie revenue, Gbagbo avait affirmé que "la Côte d’Ivoire a été attaquée parce qu’elle n’avait pas les moyens de se défendre". Puis d’ajouter qu’il mettra "fin" à cet état de fait, pour faire "respecter" son pays et lui permettre de recouvrer l’intégralité de son territoire. La suite, on la connaît avec ce réarmement massif qui a vidé les caisses de l’Etat au point que Gbagbo en est arrivé à dissiper les fonds alloués aux agriculteurs de la filière cacao.

Là n’est pas notre propos (pour le moment), celui-ci consistant à dire que concomitamment à ce réarmement, Gbagbo a "louvoyé" avec tous les accords censés ramener la paix en Côte d’Ivoire. Après avoir vidé Marcoussis de sa substantifique moëlle en le traitant de "médicament" pouvant être "bon ou mauvais" pour le malade, que lui Gbagbo n’a pas signé il est parvenu à obtenir la signature d’autres accords de paix, pour, par après, leur faire subir le même sort.

Le dernier en date, Accra III, est en train d’être "assassiné" avec l’adoption par le dernier conseil des ministres (comité central du FPI et assimilés) d’un projet de loi organique sur l’organisation de référendum en Côte d’ivoire.

Ce texte doit permettre l’organisation du référendum visant la modification de certaines dispositions constitutionnelles, l’article 35 (portant sur l’inéligibilité aux fonctions de président de la république) pour être précis. Or Accra III prévoyait (au vu de la situation de guerre et de la pagaille qu’elle entraîne) que le président Gbagbo use de ses pouvoirs spéciaux pour effectuer cette modification.

Spécialiste du dilatoire et des pirouettes, Gbagbo qui se sait sous la menace du Tribunal pénal international dès qu’il quittera le pouvoir (ce qui serait le cas en cas d’élections libres et transparentes vu son manque d’assise populaire) a donc opté pour la logique de la force pour s’y maintenir. Mieux dans son esprit, certains de ses voisins (ceux du Nord en particulier) sont dans son collimateur, lui qui leur avait promis "le feu du ciel" (sic) dès novembre 2002. C’est dire si l’homme est dangereux et pour son pays et pour l’Ouest-africain, ce qui amène à s’interroger sur la complaisance dont il bénéficie à plusieurs niveaux.

Au niveau de l’ONU d’abord qui cherche encore une solution politique à la crise nonobstant les vannes et les vexations qu’elle subit en Côte d’Ivoire. La France ensuite, même si l’octroi par Gbagbo de certains marchés "juteux" à des entreprises françaises et le ton conciliant adopté par Abidjan vis-à-vis de Paris peuvent expliquer bien de choses.

Si tel était le cas, on ne pourrait que déplorer cette politique du "ventre" et de la courte vue qui hypothèque d’autres intérêts autrement plus fondamentaux (la politique ce n’est pas seulement l’économique) et surtout écorne l’image de la France. Pour l’heure, ni l’une ni l’autre ne peuvent spéculer sur le responsable de la rupture du consensus politique obtenu à Accra. En franchissant le rubicon, Gbagbo indique qu’il veut "pacifier" la Côte d’Ivoire par la force et se maintenir au pouvoir au-delà de 2005. Les prochains jours nous donneront des indications sur la volonté des uns et des autres à faire pièce à ce projet belliciste gros de dangers pour toute la sous-région.

Boubacar SY (djabamagnan @ yahoo.fr)
Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 11 novembre 2004 à 13:29, par DOUBADO TRAZIE En réponse à : > Crise ivoirienne : Gbagbo franchit la ligne rouge

    Que pensez vous qui est bien pour les ivoiriens et leur president ? POUR REPONDRE,
    TRANSPOSE TOUT CE QUI CE PASSE ICI DANS TON PAYS ET ANALYSE . TU VERAS LE SENTIMENT DES IVOIRIENS FACE A TOUT CE QUI SE PASSE, SE DIT ET S’ECRIT. NE JETER PAS L’HUILE SUR LE FEU. LAISSEZ LES IVOIRIENS REGLER LEUR DIFFERENT. CA PEUT ARRIVER A TOUS CETTE CRISE "FRANCO-AFRICAIN" ;C’EST LA FRANCE QUI DECIDE DE QUAND ET OU,CELA DEPEND DE SES INTERETS. MERCI DE COMPRENDRE CELA FRERE AFRICAIN.

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