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Cas sur table… : Bien commun ? On s’en fout-là !

Publié le mardi 29 mai 2012 à 01h24min

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Fenêtre ouverte, brasseur à fond, ordinateur allumé, ampoule, imprimante en marche, etc. C’est l’ « exploit » d’un commis du service public burkinabè. Suggérez de fermer ne serait-ce que les fenêtres… et il vous réplique, dans le meilleur des cas : ‘’Ne t’inquiète, c’est l’Etat qui paie ». Malheur à toi s’il s’est « réveillé ce jour sur son pied gauche ‘’ : « c’est toi qui paie ? ». Simple, non ! Le bien de l’Etat est appelé bien public ou collectif. Ça ne veut pas dire que le bien commun ou public n’a pas de propriétaire. Le propriétaire, c’est nous tous. C’est vrai, même si certains auraient osé qualifier « nos salaires » de « perdiems », bien compris par certains d’entre nous de« merdiems »…Un bel adage nous enseigne aussi : « quand la pluie vous bat, ne vous battez pas à votre tour ! ». On en a déjà assez pour augmenter les charges de tout le monde encore !

L’électricité abusivement exploitée, l’eau exagérément utilisée, véhicules et autres biens mobiliers et immobiliers impudiquement utilisés. La cour de certaines institutions est devenue un véritable cimetière de véhicules et autres biens précipités à l’usure, rançon de notre laxisme, si ce n’est de notre mauvaise foi. Il y a des climatiseurs par exemple qui ne s’éteignent quasiment pas. Ils sont allumés lundi matin pour un « non-stop » jusqu’à vendredi soir. On s’en fout-là ! Voilà, c’est ça nous on appelle bien public.

Ça, c’est le « poutoogo » (méchanceté en langue locale) pour emprunter le terme à Augustin Loada du CGD lorsqu’il qualifie le comportement de certains individus qui ne pensent qu’à leur seul intérêt. Dehors dans le même service, si ce n’est un autre commis de l’Etat qui, pour une mangue, y vide l’équivalent d’un sceau d’eau, c’est un robinet en panne qui laisse couler l’eau 24h/24h désespérément en attente de réparation. Denrée de vie par excellence, même l’eau est mal gérée dans les services de l’administration publique.

Ça ne dérange la conscience de personne, d’ignorer ‘’volontiers’’ qu’à Koupèla et à Pouytenga par exemple, cette ressource vitale défraie la chronique de par sa rareté. Ça ne dérange personne, ne serait-ce que par devoir de décence. Et puis, si chacun essaie vraiment d’être raisonnable en pensant aux autres, ça fait quoi ? La hiérarchie a aussi un grand rôle à jouer dans cette moralisation de la vie publique. Un subalterne (même si certains subalternes ont plus de pouvoir que leur hiérarchie immédiate) qui voit les comportements d’ « abus » de son chef sur les biens communs est tout aussi tenté d’emboîter le pas un jour. Par vengeance ou par effet de contagion.

Je ne peux pas m’empêcher de partager cette leçon de cet expatrié (Asiatique) venu au Burkina pour un stage de six mois dans un quartier de Ouagadougou. Dimanche 6 mai, nous sommes de passage chez lui. Nous remarquons que sa villa, meublée et ‘’bombardée’’ de climatiseurs, fonctionne sans « air conditionné » malgré la canicule. Ce n’est pas lui qui paie, tout est pris en charge par l’Etat. A la question de savoir s’ils n’étaient pas en bon état, voici sa réponse : « Ah, si, si ! Je les mets juste quand je suis pour 15 à 20 minutes... Ici, l’électricité est chère et il n’ y en a pas assez, donc il faut l’utiliser rationnellement ». A mon for intérieur, je répliquai : type-là se fout des gens.

Ceux-là mêmes pour qui tu fais ça n’ont pas pitié d’eux-mêmes, ce n’est pas toi qui va pouvoir changer les choses ! Heureusement encore qu’il y a des Burkinabè qui pensent à tout le monde dans leurs actes de tous les jours. Même s’ils sont rares comme des béliers à testicules uniques. La seule préoccupation aujourd’hui qui vaille pour moi est celle de penser que ces hommes intègres-là pourraient finir par se poser un jour la question du genre : « Mais, pourquoi devrais-je être le seul à agir ainsi ? ». Et-là, ce serait le véritable « laisse-guidon » dans ce pays. Alors…

Le Progrès

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Vos commentaires

  • Le 29 mai 2012 à 12:44 En réponse à : Cas sur table… : Bien commun ? On s’en fout-là !

    Messieurs du progrès, je pense qu’il ne suffit pas d’écrire. Votre sensibilisation ne peut être entendue. Voyez vous, si nos autorités même montraient qu’ils sont sensibilisés à l’utilisation des biens publics cela pourrait aider à un changement de mentalité. Supposons que des agents rentrent dans le bureau de leur patron et constate qu’il utilise à bon escient le bien public. Ne seront-ils pas marqués par cela. Un autre exemple, dans les banques les agents ont obligation de venir dans certaines tenues. Si le DG d’une banque, et d’autres directeurs enlève leur veste pour travailler à l’aise et tout en sollicitant moins les climatiseurs cela ne pourrait il pas impacter sur d’autres agents. Qu’un ministre se mette à travailler en économisant l’énergie ou le téléphone pensez vous que les autres directeurs et chefs de service ne seront pas gênés de dépasser M. le Ministre dans l’utilisation des biens publics. Ce sont ceux qui sont à la tête pour la gestion des biens publics qui doivent donner l’exemple.

  • Le 29 mai 2012 à 14:44 En réponse à : Cas sur table… : Bien commun ? On s’en fout-là !

    Bien vu. Au fait, vous avez tout dit. La balle est ds le camp de tout le monde avec les premiers responsables qui doivent donner dabor l’exemple. Vous avez effectivmt des DG et Ministres qui ne se gênent même pas de leurs comportements incommodes, insultants...
    Merci pour la sensibilisation, continuez ça ira un jour. Ils font semblant de ne rien comprendre mais au fond d’eux, ils sont choqués. Si ce n’est pas la cas c’est qu’ils sont mentalement...

  • Le 29 mai 2012 à 14:50 En réponse à : Cas sur table… : Bien commun ? On s’en fout-là !

    Au premier internaute, je pense que tout est dit dans l’article qui n’épargne personne : « La hiérarchie a aussi un grand rôle à jouer dans cette moralisation de la vie publique. Un subalterne (même si certains subalternes ont plus de pouvoir que leur hiérarchie immédiate) qui voit les comportements d’ « abus » de son chef sur les biens communs est tout aussi tenté d’emboîter le pas un jour. Par vengeance ou par effet de contagion »

  • Le 29 mai 2012 à 21:20, par jeandeti En réponse à : Cas sur table… : Bien commun ? On s’en fout-là !

    Merci pour l’article qui en appelle à une prise de conscience générale. En fait je crois qu’en ce qui concerne le comportement des supérieurs, patrons ou dirigeants c’est une attitude de mépris pour l’intérêt général qu’ils manifestent en ayant ces comportements d’abus des biens publics. Parce qu’eux au moins ils ne sont pas ignorants des conséquences de leurs actes. En ce qui concerne les autres subalternes, citoyens lambda, ils y a certains qui sont ignorants des conséquences de leur actes et d’autres qui tout comme les supérieurs ont de tels comportements soit par mépris pour l’intérêt général soit par dépit du comportement qu’ils observent chez leur supérieurs. Dans tous les cas il faut agir et faire en sorte que ça change. J’ai qualifié certaines personnes d’ignorantes parce qu’en réalité elle ne savent pas que le bien public c’est le bien qu’ils ont contribué à acheter. Et que s’ils ont un comportement qui le détériore ou qui engendre des suppléments de coûts c’est encore eux qui vont payer de leur poches par le biais des impôts et taxes qu’ils payent. Ainsi, au lieu que les impôts et taxes contribuent à accroitre les biens publics par l’acquisition de nouveaux biens, il serviront soit à réparer les biens publics mal utilisés ou à payer les surplus de coûts engendrés par l’abus des biens publics. au finish, on n’avance pas, on fait du surplace, sinon on régresse.

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