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Editorial de Sidwaya : Croisade contre la vie chère

Publié le lundi 28 mai 2012 à 01h44min

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La vie chère a décidément la peau dure ! Depuis qu’elle s’est installé en 2008 avec son corolaire d’émeutes de la faim en Haïti et ailleurs, de manifestions violentes au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, elle ne nous a plus quitté. Chez nous, personne ne peut oublier les casses de février-mars 2008 dont l’épicentre était à Bobo Dioulasso et qui se sont étendues à Ouagadougou puis à Ouahigouya et à Banfora.
La vie chère ne se raconte pas elle se vit. Du jour au lendemain, votre boutiquier vous dit : « Mon frère, le sac de riz à augmenter », le lendemain quand vous arrivez : « Grand-frère, le sucre là est devenu cher, on en trouve même plus sur le marché ».

De Johnnesbourg à Addis Abeba, de Dori à Batié, et de Niangoloko à Tougan, les prix flambent sans que les gouvernants et les consommateurs n’aient une véritable marge de manœuvre. C’est le cas par exemple chez nous en 2011. On se souvient que suite à la grave crise consécutive à l’affaire Justin Zongo, le gouvernement du Premier ministre Luc Adolphe Tiao a pris un certain nombre de mesures contre la vie chère. Celles-ci avaient pour but ultime de baisser les prix et rendre ainsi accessibles aux Burkinabè d’en bas, les produits de première nécessité : sucre, sel, riz, huile alimentaire, etc.

Le Gouvernement estimant que la question était une cause nationale a vite associé commerçants, syndicats et associations de consommateurs à ces mesures anti vie chère. Ces concertations tripartites, avaient également abouti au plafonnement des marges bénéficiaires pour les commerçants et à la création de boutiques-témoins pour disponibiliser les produits notamment le riz et autres céréales auprès des populations. Toutes ces mesures ont été accueillies avec joie et espoir. Les populations ont apprécié le fait que leur Gouvernement ait pris le taureau par les cornes. Enfin, nous espérions tous voir venir le bout du tunnel. Mais hélas !

Les efforts du Gouvernement, son volontarisme même dirons-nous n’ont pas produit les résultats escomptés. Les bonnes intentions du Gouvernement ont été prises en otage par des commerçants appelés abusivement opérateurs économiques. Assis autour de la table des discussions, ils ont acquiescé, signé les accords issues des négociations qu’ils ont tous foulé au pied une fois retournés dans leurs étals, magasins ou boutiques. Toujours prêts à se plaindre, à grogner, cette race de commerçants n’a et n’a eu aucune pitié pour la veuve et l’orphelin, bref, ils ne se sont nullement souciés de la vie des Burkinabè, de leur Patrie.

Pour eux, l’essentiel c’est de se remplir les poches, voire les caisses. Même quand le Gouvernement leur a donné de l’argent frais et des sacs de riz pour les amener à maintenir les prix bas, ils n’ont pas suivi. Nos braves commerçants ont oublié que la bienveillance donne plus d’amis que la richesse et plus de crédit que le pouvoir. Tout pour eux, rien pour les autres, est désormais leur slogan. Et ce qui devrait arriver, arriva. Les prix n’ont pas chuté. Pire, des commerçants sont passés maîtres dans l’art de vendre des produits prohibés, périmés, bref des produits dangereux, nocifs, mauvais pour la santé de leurs consommateurs.

Au lieu de casser les prix, ils ont préféré "casser" du consommateur. Ce n’est pas de la fiction. Jugez-en vous-mêmes. Sur 1815 contrôles effectués par l’inspection générale des affaires économiques, seulement 87 opérateurs économiques étaient en règle vis-à-vis des mesures gouvernementales. Les autres n’en font qu’à leur tête. Certains acteurs de commerce ne respectent ni les normes ni la réglementation en vigueur. Ils se comportent comme s’ils étaient en territoire conquis.

Les seuls maîtres à bord ! Savent-ils seulement qu’en agissant ainsi, ils se comportent en ennemis de la paix et de la stabilité ? Savent-ils seulement qu’en profitant des largesses du Gouvernement, notamment des mesures d’assouplissement de certaines formalités et taxes sans respecter les clauses du contrat, ils se transforment simplement en individus sans parole, égoïstes ? Mais alors, que peut-on faire, que devons-nous faire pour éviter que les mesures de l’Etat contre la vie chère ne profitent pas aux seuls commerçants mais soulagent véritablement la vieille Poko dans le quartier ? Que faire pour que la souffrance des populations soit soulagée ? Face à un tel mépris, seule l’autorité de l’Etat doit s’exprimer. Mais cette autorité peut-elle seulement s’exprimer si le peuple, finalement le consommateur n’exerce pas son droit. C’est vrai, la vie chère n’est pas l’apanage de notre pays seulement, mais nous pouvons la surmonter selon nos moyens, en nous écoutant et en respectant la parole donnée surtout après des discussions concertées.

La hausse des prix sur le marché international ne doit pas être un prétexte pour nos opérateurs économiques et nos commerçants de vouloir la recette du mois en une journée. Toujours penser aux plus démunis, œuvrer à ce que la majorité des Burkinabè ait de meilleures conditions de vie est un devoir républicain. Un autre devoir de ce type est de veiller à ce que les "troubleurs" soient rappelés à l’ordre. Cela se traduit dans les faits par la multiplication des contrôles de prix et de qualité. L’Etat seul ne pouvant tout faire, il va falloir que les populations, les premières victimes de ces dommages, prennent leur responsabilité et dénoncent, les contrevenants, les "empoisonneurs". Chaque citoyen devrait aider le Gouvernement à mettre en œuvre chaque mesure prise pour baisser les prix, en refusant de se faire arnaquer par son boutiquier du coin.

Chacun de nous doit protéger et défendre les droits que le Gouvernement nous a octroyé en demandant que les prix fixés en accord avec les associations des commerçants soient respectés. Les associations des consommateurs sont interpellées. Les syndicats aussi sans oublier les défenseurs des droits humains. L’autorité de l’Etat doit également se manifester dans la rigueur et la fermeté. La vie chère est d’abord une question de vie. Par conséquent, il s’agit d’une préoccupation de première importance qui interpelle tout le monde.
Il ne faut donc pas permettre à ces jardiniers invisibles, de cultiver le rêve des autres. C’est ensemble que la croisade contre la vie chère doit se mener.

Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA (rabankhi@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 28 mai 2012 à 09:35, par sk En réponse à : Editorial de Sidwaya : Croisade contre la vie chère

    ce que vous dites est vrai, même si vous avez peur d’aller au fond des choses. En fait,j’ ai comme l’ impression que ce sont les commerçants qui contrôlent le gouvernement, et non l’ inverse, pour des raisons évidentes. Tant qu’on ne va pas dénoncer publiquement- genre publier noms des commerçants véreux dans les journaux- rien ne va changer.

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