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HOLLANDE ET L’AFRIQUE : Rupture ou continuité ?

Publié le mardi 8 mai 2012 à 01h26min

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Le nouveau président français envisage d’opérer de véritables changements durant son tout premier mandat. François HoIlande n’a cessé de le clamer tout au long de la campagne, et il l’a encore soutenu avec force dans ses premières interventions officielles après sa victoire au scrutin présidentiel de dimanche dernier. Mais comment opérer les changements espérés quand les systèmes survivent aux hommes qui les animent ?

On en sait peu sur la vision et les réelles intentions de M. Hollande s’agissant de la coopération avec le continent noir. Certes, des bribes d’informations ont été lâchées par moments, qui situent plus ou moins sur son désir de ne pas entériner les élections entachées de fraudes, etc. Mais, en attendant la mise en place du nouveau gouvernement et les prises de positions officielles sur la nouvelle politique africaine de la France du changement, il y a de quoi être sceptique. En effet, gouvernée par la droite ou non, la France évolue toujours suivant la loi des intérêts.

A cet effet, l’Elysée dispose de « cellules africaines » : celles existant en France, et celles situées en Afrique même. C’est toujours grâce à elles que Paris préserve ses intérêts, étend ses réseaux d’influence, et fait fructifier l’économie nationale. De tout temps, ces fameuses « cellules » ont activement contribué au rayonnement de la France dans les instances internationales. Par exemple, sur la base de l’appartenance à l’espace francophone, l’Hexagone peut les mettre à profit pour constituer de véritables lobbies au plan multilatéral.

En fait, la diplomatie française a toujours eu du mal à échapper aux pièges des « Africanistes » ou prétendus tels. Ils se composent le plus souvent d’experts, d’enseignants, de chercheurs, de journalistes et bien évidemment d’aventuriers en tous genres. Le plus souvent, ils habitent le continent, ou le parcourent de temps à autre. Généralement, ils passent pour des « connaisseurs », des « spécialistes » du continent, des us et coutumes de ses habitants, etc. Par leurs écrits, leurs analyses et les propos qu’ils diffusent à longueur de journée, ils orientent quotidiennement les acteurs politiques dans leurs prises de décisions.

A ces îlots d’intellectuels qui foisonnent un peu partout, s’ajoutent de nombreux lobbies constitués d’hommes d’affaires, les uns appartenant aux anciens comptoirs coloniaux, les autres à divers milieux économiques allant des petites structures commerciales aux multinationales. Le système rassemble donc différentes composantes : une multitude de cercles de réflexions, mais aussi, de nombreux groupements d’intérêt mafieux.

Comment donc s’affranchir d’une telle tutelle, surtout lorsque le besoin de relations se fait sentir, notamment pour faire face à certaines problématiques ? Sera-t-il vraiment possible dans la France de François Hollande, de contourner certains individus appartenant à l’une ou l’autre de ces cellules africaines ? Osera-t-on faire tabula rasa de tous ces réseaux d’influence ? Bien au contraire ! La France n’ayant que des intérêts, il faut être naïf pour croire un seul instant que la nouvelle équipe de l’Elysée renoncera à recourir à l’une ou l’autre de ces tentacules pour placer des pions. Du déjà vu ! Il y a fort à parier que la « nouvelle » diplomatie française aura du mal à s’affranchir de ces réseaux d’influence implantés depuis perpette ! En dehors de cas plus subtiles, un coup d’arrêt sera peut-être porté à certaines pratiques, jugées très ouvertes.

Mais, le changement en France, induira-t-il du changement en Afrique ? Peut-on vraiment espérer voir du changement lorsque les élites politiques, les dirigeants africains eux-mêmes, ne veulent point changer ? On en trouve qui garderont encore longtemps les mêmes réflexes, maintiendront les mêmes attitudes et comportements. Toute honte bue, ils travailleront à contre-courant de l’histoire, du mouvement des libertés et des droits humains. Sans doute aura-t-on besoin d’un coup de pouce diplomatique de François Hollande à ce niveau.

Toutefois, dans l’attente de la nouvelle politique africaine de l’Elysée, il faut souhaiter que Hollande et son entourage nous épargnent ces discours du genre de celui prononcé par Nicolas Sarkozy à Dakar, une fois les perrons de l’Elysée franchis. Non seulement il puait le paternalisme à plein nez, mais encore, il niait les évidences de l’histoire. On ne saurait assez conseiller à François Hollande, de se garder de cet esprit paternaliste, et surtout d’éviter l’arrogance dont avait fait montre son prédécesseur.

Le continent ne gardera certainement pas de bons souvenirs de Nicolas Sarkozy, lequel semblait avoir emprunté ses ambitions à Bush fils, ex-président des Etats-Unis. Sous sa gouverne en tout cas, le rayonnement de la France aura pris un sérieux coup. Au plan politique tout d’abord, au plan humain, ensuite. Certes, il a contribué activement à culbuter des dictateurs mais le fait de l’avoir fait de façon sélective, aura gâché le plaisir. Par exemple, on sait avec quel acharnement Sarkozy a protégé Idriss Déby contre la volonté de changement du peuple tchadien. Vrai que ces dernières années, un tort réel a été fait à l’école bien connue de la diplomatie française. Bien des tâtonnements et de l’aventurisme plat ont caractérisé certaines actions, notamment lors du printemps arabe. A cela s’ajoute le fait que depuis longtemps également, les ambassades de ce « pays ami », ont cessé d’être hospitalières. Il faut franchir tout un parcours du combattant en vue d’obtenir le simple visa.

Les difficultés vécues dans l’Hexagone tant par la diaspora africaine que les visiteurs, les mesures drastiques relatives à l’obtention des visas, ont beaucoup contribué à écorner l’image de la France en Afrique, et sans doute dans d’autres pays du Sud. Une telle « galère », est indigne d’un pays qui entretient des relations séculaires avec nombre de pays du Sud, et pour lesquels la France a toujours été une terre de liberté, en tout cas, le pays des droits de l’homme ! Assurément, Hollande et ses compagnons auront fort à faire pour redorer le blason terni. Mais entre la « rupture » promise mais jamais réalisée et le changement envisagé, il faut craindre que ce ne soit du pareil au même. Qu’on nous donne tort demain !

« Le Pays »

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Vos commentaires

  • Le 8 mai 2012 à 10:53, par citoyen En réponse à : HOLLANDE ET L’AFRIQUE : Rupture ou continuité ?

    il ne faut pas se faire d’illusions, hollande ne fera pas mieux que sarko dans la politique etrangère en afrique. que serait la france sans l’afrique avec toutes ces bases militaires soit disant defendre les ressortissants francais.
    mon frere le noir bats toi, les temps ont changé
    pour une fois (a cause de dieu) nous demandons a nos dirigeants de se preocuper des problèmes des peuples car leur avenir aussi en depend

  • Le 8 mai 2012 à 18:53, par Krouma En réponse à : HOLLANDE ET L’AFRIQUE : Rupture ou continuité ?

    ...trés bien dit, il est illusoire de croire qu’il existe des sentiments de s’aimer ou de ne pas s’aimer, tous ces réseaux de politiciens ont les mêmes valeurs qu’on appele : la criminalté organisée, la politique(les coups bas), l’acquisition des richesses à tout prix. Donc ceux qui courent derrière le pouvoir n’ont aucun sentiment entre eux mêmes seulement que des interêts. Qu’il soit sous Sarko ou Hollande, les malettes sans tracent survoleront toujours vers la France. La seule, peut être différence entre ces deux hommes c’est que le sortant s’est dévoilé comme un faut type arrogant et l’entrant, à prmière vue un peu sérieux, alors ’’we wait en see’’.

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