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Mobilisation citoyenne : Jeunesse et paysannerie à la cour

Publié le vendredi 27 avril 2012 à 01h48min

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En cette année 2012, la jeunesse et la paysannerie burkinabè sont à l’honneur. Projets, programmes spéciaux de développement, rencontres festives, discours superpompeux et hautement élogieux sur des mérites vrais ou supposés, rien ne semble être de trop pour créer et renforcer la relation avec ses différentes couches sociales. La première citée, dont la proportion exacte dans les statistiques démographiques varie selon les sources, reste néanmoins très majoritaire au sein de la population. Ce qui fait des jeunes des éléments indispensables dans la gouvernance publique. Lors des prochaines élections, leurs voix compteront logiquement dans le choix des candidats aux différents postes en compétition.

D’où la perche qui leur est opportunément tendue par le politique. Etre jeune au Burkina, dans un contexte économique et social très précaire, marqué notamment par le renchérissement du coût de la vie, n’est pas chose aisée. Et pour cause.

La demande en services sociaux de base ne cesse de croître, au contraire de la courbe des ressources matérielles, infrastructurelles et financières qui, elle, décline. Elle est donc là, la bombe sociale, menaçante, prête à exploser à tout moment, comme en 2011 ! Et le clin d’œil intéressé du nouvel exécutif du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le parti au pouvoir, à l’endroit de la jeunesse est là, à travers la place qui lui est désormais faite dans ses instances décisionnelles ; ce qui montre bien l’intérêt de rester à l’écoute de la majorité. Du reste, le parti au pouvoir et la majorité présidentielle sont loin d’être les seuls à mener ce combat d’alternance générationnelle. Au sein de l’opposition, c’est également l’option choisie pour gagner la bataille de l’opinion. Dans cette perspective, le choix des noms de personnalités devant figurer sur les listes électorales constituera, sans doute, un indicateur par rapport à la motivation des formations politiques.

Pour l’heure, c’est un gouvernement au four et au moulin qui s’attache à la mise en œuvre de sa trouvaille magique, censée relancer le moral de ces jeunes. Il s’agit du fameux programme dit présidentiel de création d’emplois pour les jeunes et les femmes (PSCE). Lancé officiellement le 24 février dernier à Ouagadougou, le PSCE ambitionne, faut-il le rappeler, la création de plus de 150 000 opportunités d’emplois et de mises en stage sur la période 2012-2014.
Comme on peut aisément s’en douter, l’annonce de cette initiative a suscité un brin d’enthousiasme chez les potentiels bénéficiaires. Naturellement, ces attentes ne devront pas être trahies.

Ce qui justifie bien les nombreuses sorties médiatiques autour de l’affaire.
Au regard du contenu du PSCE mais aussi et surtout en considération de ses ambitions nationales qui viennent en complément aux différents mécanismes antérieurs, l’on peut souhaiter qu’un nouveau soleil se lève enfin, au-dessus des espoirs de ces milliers de naufragés qui attendent d’être secourus et ramenés sur la terre ferme. Pour ce faire, la bonne foi des partenaires est indispensable, afin d’éviter les dérives et les travers. Car le monde de l’emploi au Burkina demeure encore marqué par des pesanteurs très fortes, qui ne laissent pas toujours de bonnes marges de manœuvres aux citoyens.

Le risque est donc grand de voir des spéculateurs profiter de la situation à des fins douteuses. Etant entendu qu’il s’agit d’une main-d’œuvre bon marché et sans contrainte que l’on met à leur disposition. En occultant volontairement les perspectives à long terme, notamment les aspects de durabilité et de motivation, l’on pourrait se retrouver rapidement avec des mécontents sur les bras. Surtout que personne n’ignore que les lois en matière d’emploi au Burkina sont taillées sur mesure, pour servir les seuls intérêts du patronat, au détriment des employés.

En tout état de cause, le monde paysan aura eu sa part de réjouissance et sans doute de reconnaissance, grâce, notamment, à la mise en scène réussie de la quinzième édition de la Journée nationale du paysan (JNP), tenue cette année à Ouahigouya.
Entre échanges et lancement de la campagne agricole à venir, les acteurs d’un domaine qui pourvoit l’économie nationale à près de 35% en moyenne, en plus d’embaucher plus de 80% de la population active, ont pu faire le constat que beaucoup reste encore à réaliser avant d’être à l’optimum. Particulièrement, à cause de la faiblesse structurelle qui règne dans le milieu, de la faible mécanisation, mais aussi et surtout en raison du blocage au niveau des mentalités. Conséquence, l’agriculture burkinabè est toujours au stade de projet, incapable de sortir du carcan de la subsistance.

Les lentes et périlleuses tentatives de modernisation entreprises ne produisent pas encore les résultats à la hauteur de ce que l’on pouvait attendre. Qu’à cela ne tienne ! Les participants à la JNP ont pensé devoir arracher au Président du Faso la promesse d’un statut spécifique. Refus poli du boss, lassé sans doute de constater la trop grande récurrence de cette exigence, à chacune de ses sorties sur le terrain. Car à ce rythme et si l’on n’y prend garde, en effet, le Burkina risque de devenir, à court terme, la république des statuts particuliers. Bref, à “Ouéguyo”, l’on est revenu sur les mêmes problèmes, sur les vieilles tirades sans fin, sur les vieux contentieux et sur les sermons de l’époque coloniale. Pendant ce temps, la crise alimentaire, elle, est installée, obligeant le gouvernement Lucky Luc à ressortir la sébile, afin de solliciter le pain international....

A. Traoré

Journal du Jeudi

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