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Lettre ouverte à Monsieur le ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme

Publié le jeudi 29 mars 2012 à 02h24min

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Je viens par la présente lettre vous interpeller sur les lenteurs excessives enregistrées par vos services techniques dans le traitement des dossiers de construction d’habitation. En effet, vos services ont fait arrêter les travaux de construction de ma maison d’habitation le 22 décembre 2011 au motif que je n’étais pas en conformité avec la réglementation. Convoqué à la direction de contrôle, je m’y suis rendu avec mon fond de dossier en expliquant à l’agent qui me recevait les raisons qui m’ont conduit à ne pas respecter la réglementation. J’évoquais en son temps, la lenteur observée par les services de l’Etat dans la délivrance des pièces constitutives du dossier en vue de l’obtention du permis de construire.

En effet, il m’a fallu pas moins de six mois pour obtenir les résultats du laboratoire chargé de l’analyse des sols quand bien même j’avais payé la taxe de 300 000 F CFA exigée pour l’obtention du document. J’ai dû relancer à plusieurs reprises le laboratoire à travers des coups de téléphone qui au final renchérissaient le coût de la prestation. Las d’attendre et d’y envoyer mon technicien, je me suis résolu à y aller en personne. Miraculeusement, moins d’une semaine après cette visite, j’obtins les fameux résultats ! Le contrôleur me fit comprendre que non seulement mes propos n’étaient pas exacts, mais aussi que je ne pouvais tirer prétexte de la situation pour ne pas me conformer à la loi.

Il se permit même de m’administrer une leçon de droit en me signifiant qu’en pareille circonstance, la loi m’autorisait à formuler un recours administratif. Je l’informai qu’en ma qualité de juriste et enseignant de droit public, je connaissais très bien le fameux adage « dura lex, sed lex » et qu’en plus je n’ignorais pas l’existence des recours administratifs ! Finalement, nous nous sommes compris quand après examen de mon fond de dossier il releva qu’il ne me restait qu’une pièce essentielle pour le boucler, la notice de sécurité.

En vue de l’obtention de ce dernier document, je me devais de fournir le plan de bornage de ma parcelle. Dès le 4 janvier 2012 à 8 h 00, j’étais dans les locaux de la Direction Générale de l’Urbanisme et des Travaux Fonciers (DGUTF) où je payai 29 000 F pour le coût du document et 5000 F pour les frais de transport (je note en passant que les 5000 F n’ont pas paru sur la quittance qui m’a été remise) sur la parcelle. Cela fera bientôt quatre mois que je ne suis toujours pas en possession du document et que par ailleurs vos services ne sont jamais venus sur mon terrain.

Plusieurs fois, vous avez été interpellé ces derniers temps dans la presse sur les dysfonctionnements de vos services. Aussi, je ne voudrais pas en rajouter. Mais l’enseignant de la déontologie de la fonction publique que je suis, voudrais, à la suite des contributions de belle facture déjà publiées, vous inviter à rappeler à vos agents le contenu de l’alinéa 1 de l’article 21 de la loi 13/ 98/AN du 28 avril 1998 portant régime juridique applicable aux emplois et aux agents de la fonction publique qui dispose que : « Les agents de la Fonction publique sont au service des usagers. Ils doivent traiter les dossiers avec diligence et faire preuve de courtoisie dans leurs relations avec les usagers ». La notion de diligence employée dans cet article signifie que les dossiers doivent être traités dans un délai raisonnable qui est de deux mois selon le droit commun en matière administrative.

En votre qualité de premier responsable du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme, vous avez le devoir premièrement de faire respecter la loi par vos agents avant de l’exiger des clients de l’administration. Vos bonnes actions de communication n’atteindront pas les objectifs poursuivis, si vos services techniques n’intègrent pas les enjeux de la modernisation de l’Etat. De nos jours, un Etat moderne légitime est celui-là qui se met véritablement au service de l’intérêt général en veillant à définir une réglementation adaptée à son contexte (la plupart des articles déjà publiés sur ce sujet recèlent pas mal de propositions intéressantes), mais aussi et surtout à lui-même respecter la loi. A cet effet, je vous suggérerai d’élaborer urgemment un manuel de procédure d’établissement des actes de construction où vous indiquerez pour chaque type d’acte les délais de délivrance et les voies de recours possibles ouverts aux citoyens en cas de défaillance de la part de vos services. Ce document devra être largement publié et affiché devant les différents services techniques chargés de la délivrance des actes.

Abdoul Karim Sango : Juriste, enseignant de droit public à l’ENAM

Sidwaya

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