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ENVIRONNEMENT ET DEVELOPPEMENT DURABLE DE MANGODARA : « Le professeur déstabilisateur »

Publié le mercredi 28 mars 2012 à 04h16min

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L’auteur du texte ci-dessous donne sa version des faits sur la polémique qu’il y a actuellement autour du déguerpissement des habitants de la forêt classée de Dida, à Mangodara. Toutefois, certains passages, pour des raisons d’éthique et de déontologie, ont été supprimés.

Depuis quelques mois, la forêt classée de Dida fait l’objet de divers commentaires publics paraissant dans la presse nationale. Le 19 mars dernier, un écrit paraissait dans votre livraisonn°5073 sous l’intitulé : « Des déguerpis prennent d’assaut le gouvernorat des Cascades », dans la rubrique LE FAIT DU JOUR. En tant que premier responsable du service départemental de l’Environnement et du développement durable de Mangodara que cet écrit indexe ouvertement, je me vois bien contraint de réagir en apportant aussi bien des éclaircissements sur la situation qui prévaut dans cette forêt, que des observations et critiques objectives sur cette publication.

J’entends donc exercer à travers les lignes qui suivent, mon droit de réponse que la loi sur l’information reconnaît à tout citoyen sujet d’écrit dans la presse publique. Il faut d’abordnoter que la forêt classée de Dida est un domaine public et cela est bien connu de tous et particulièrement des occupants. Depuis les années 1955, au moment de sa délimitation en zone classée, la forêt a été placée sous l’administration et le contrôle du ministère de l’Environnement et du développement durable, comme partout ailleurs au Burkina. Cette forêt porte le nom « Dida » de l’affluent du fleuve Comoé qui la traverse et est d’une superficie de 75 000 hectares environ. Elle abrite à ce jour une population de moins de 5 mille âmes réparties entre onze (11) villages et hameaux de cultures. Ensuite, dans l’article, les occupants prétendent que ce n’est qu’un (01) mois de grâce que l’administration leur a donné pour libérer la forêt classée.

A ce niveau, il y a lieu de retenir que c’est depuis les années 1996 que l’administration publique, à travers les services de l’Environnement et du développement durable,a tenté de les déguerpir. A titre d’illustrations, des actions tendant à la libération de la forêt classée ont été réalisées : 1996 : ouverture des pistes (projet Carto) ; 1998-2000 : matérialisation des limites de la forêt et posedes pancartes ; 2003 : numérisation cartographique et établissement d’une base de données SIG, financés par la coopération japonaise ; 2003 : vérification et levée topographique des limites par la Direction des aménagements forestiers (DFVAF) 2003 : le village de Sassamba est invité à libérer les lieux et à procéder à la fermeture de son forage ; 2004 : un début de déguerpissement a été engagé par la DRECV/Cascades ; 2004 – 2006 : le village de Sassamba a été invité à arrêter la construction d’un complexe scolaire par la Direction régionale de l’Environnement et du cadre de vie ; 21 juin 2007 : une rencontre organisée par les hauts-commissairesdu Poni et de la Comoé dans le département de Ouo avec l’ensemble des producteurs installés dans ladite forêt, invite les occupants à quitter la forêt sans délai ; Décembre 2009 : une autre tentative de déguerpissement des occupants a échoué à cause principalement du départ de l’ancien gouverneur FatimataLegma.

C’est donc dire que c’est en 2003 qu’officiellement l’administration publique a demandé la libération de la forêt classée par les occupants illégaux. Je précise en passant qu’au moment du classement, le village de Sassambaétait implanté sur l’autre rive du cours d’eau (limite naturelle) et que c’est progressivement que des personnes sont venues s’installer dans la zone classée pour faire de l’exploitation agricole lucrative. Donc, si d’aucuns estiment que le village de Sassamba était là bien avant la razzia de Samory Touré, cela est vrai mais seulement le village n’était pas situé dans la forêt classée. Le village s’est étendu sur l’autre rive du cours d’eau, limite naturelle de la forêt classée d’avec les autres espaces non protégés.

En résumé sur ce point du délai imparti pour libérer les lieux, il y a lieu de noter que ce dernier délai d’un (01) mois donné par l’administration publique n’est que la suite de plusieurs autres donnés auparavant. En clair, ce n’est pas la première fois que les occupants ont été invités à libérer la forêt classée, leur présence ayant entraîné beaucoup d’actes néfastes à l’écosystème local (déforestation massive, destruction de la faune et de la flore, feux de brousse, etc.) Je pense que les occupants, n’ayant pas l’intention de quitter les lieux mènent des campagnes d’intoxication et de dénigrement à l’encontre du service départemental de l’Environnement et du développement durable de Mangodara, et ainsi détourner l’attention de l’opinion publique. Ils cherchent à faire de la diversion pour continuer à exploiter impunément le domaine public protégé à des fins essentiellement lucratives. La preuve de leur mauvaise volonté est qu’ils émettent des conditions préalables et cela après que le gouverneur les a renvoyés le 14 mars dernier afin qu’ils aillent se concerter et trouver un délai réaliste pour libérer la forêt de Dida. Entre autres, ils demandent que l’Etat leur accorde trois (03) ans de sursis afin qu’ils continuent de dégrader la forêt classée pour leurs activités lucratives ;que le gouvernement les dédommage pour leurs habitations (50 000 francs pour les maisons en chaume et 200 000 pour les maisons en tôles) ;que l’Etat leur accorde un (01) million de francs CFA par hectare pour les champs d’anacardiers ;mon départ immédiat, ensuite celui de mon équipe sinon il y aurait une rébellion, voire un scandale à la bobolaise.

Ces conditions qu’ils entendent soumettre au gouverneur des Cascades le 30 mars prochain, semblent être la parade qu’ils ont trouvée pour tenter à nouveau de gagner du temps. Le vrai instigateur de ces manifestations est M. SawadogoMissiri Théophile, professeur d’éducation physique et sportive résidant régulièrement à Bobo-Dioulasso. Ce monsieur veut profiter de la situation nationale pour assouvir ses desseins. Ce monsieur est celui-là même qui est en train de monter les paysans contre l’administration publique tout simplement parce qu’il a des intérêts économiques et financiers à sauvegarder dans la forêt classée de Dida. Le professeur Missiri a dit que la forêt est une « mine d’or » pour les agents des Eaux et Forêts de Mangodara lors de la rencontre avec le gouverneur de la Région des Cascades. Je ne sais pas de quelle mine d’or il parle, mais, s’il y a mine d’or qui puisse profiter à quelqu’un, je pense bien que c’est lui qui en a dans cette forêt classée. En effet, à lui tout seul, il exploite des centainesd’hectares dans la forêt classée dont des dizainesd’hectares d’anacardiers. Il y possède également plus de 200 têtes de bœufs et des porcs.

Des centaines de sacs de maïs et de mil sortent annuellement de sa ferme agropastorale située dans ladite forêt. Il est évident que ce monsieur, l’intellectuel du groupe, a tout intérêt à monter les paysans afin qu’ils refusent de libérer la forêt classée.C’est ce qu’il a effectivement fait. La population avait commencé à quitter et à libérer la forêt classée mais du fait de ses manipulations, il est parvenu à les rebeller contre l’administration publique. Vu son niveau d’instruction, on s’attendait à ce que ce fonctionnaire de l’Etat burkinabè aide à sensibiliser au respect de la chose publique, des valeurs républicaines dont l’une des plus essentielles est le respect des normes édictées dans un but d’intérêt commun. C’est tout le contraire qu’il nous donne de constater à traversl’instrumentalisation de cette population analphabète. C’est lui qui a affrété le camion qui a servi à transporter certains manifestants jusqu’à Banfora moyennant,selon les dires des uns et des autres, la somme de 8 000F CFA.

Aux dernières nouvelles, il a été demandé à toutes les familles installées dans la forêt classée de cotiser la somme de quatre cent mille (400 000) francs CFA pour remettre au propriétaire du camion qui a transporté les occupants de la forêt à Banfora lors de la marche du 14 mars dernier. Et le propriétaire du camion n’est personne d’autre que le professeur SawadogoMissiri Théophile. Concernant la question des verbalisations, le code forestier en ses articles 263, 265 et 266 autorise l’agent verbalisateur à infliger une amende qui varie de 100 000 à 2 000 000de F CFA en cas d’infractions constatées. L’administration publique n’a fait qu’appliquer la loi aux contrevenants. Les manifestants, dans leur récit, prétendent que la forêt est habitée par plus de 200 000 habitants répartis sur 50 villages alors qu’en réalité il n’y a que onze villages et hameaux de culturequi ne totalisent pas plus de 5 000 habitants. Il faut noter que la région des cascades tout entière fait environ 600 000 habitants.

A écouter les propos des manifestants, un tiers de cette population se trouverait dans la forêt classée. L’administration de l’environnement de Mangodara en charge de la gestion exerce les missions qui lui sont assignées comme toutes les autres structures des autres régions du Burkina Faso. Elle est chargée entre autres de constater les infractions à la législation forestière et faunique puis inflige les amendes comme le veut la loi. Je tiens pour responsable le professeur SawadogoMissiri Théophile de fomenter un coup pour déstabiliser le Service départemental de l’Environnement et du développement durablede Mangodara et je le tienspour responsable des conséquences de ses manipulations. En attendant un déguerpissement général de la forêt, je demande dans l’immédiat aux autorités compétentes que le professeurSawadogoMissiri Théophile soit bouté hors de la forêt de Dida.

Lieutenant Pierre Mesmer BAYALA Contrôleur des Eaux et Forêts Chef duservice départemental de l’Environnement

Le Pays

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