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La direction de la « com » de la présidence du Faso change de mains. Va-t-elle changer de mode de production ?

Publié le mardi 20 mars 2012 à 12h49min

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Nous assistons à un bouleversement du paysage médiatique « officiel » burkinabè. Présidence du Faso et primature changent de directeur de la communication et, du même coup, Sidwaya, le quotidien national - qui est, historiquement, un vivier de « communicateurs » - voit arriver un nouveau patron.

Le 14 janvier 2009, c’est Baba Hama qui avait été nommé directeur de la communication à la présidence du Faso. Il remplaçait alors Saïdou Ouédraogo (qui avait alors le titre de directeur de la communication et des relations publiques). Hama avait été directeur de la radio nationale, secrétaire général du ministère de la Communication et de la Culture, délégué général du Fespaco (pendant douze ans), directeur de cabinet du ministre de la Santé. Au début de l’année 2011, il sera promu au gouvernement. Tout d’abord comme ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement (sous Tertius Zongo), puis en tant que ministre de la Culture et du Tourisme (sous Luc Adolphe Tiao). Sans, pour autant, être remplacé à la direction de la communication de la présidence du Faso. La situation vient d’être normalisée (cf. LDD Burkina Faso 0299/Mercredi 7 mars 2012). Le 29 février 2012, Ibrahiman Sakandé a été nommé en conseil des ministres pour prendre la suite de Baba Hama.

Sakandé était, jusqu’à présent, codirecteur de publication (avec le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement) et directeur général des Editions Sidwaya. C’est au sein de Sidwaya qu’il a mené sa carrière (il y a passé quatorze ans !) Autrement dit, il ne vient pas de nulle part et est formaté par son job antérieur qui en faisait un « journaliste officiel », s’illustrant avec des « éditos » qui, parfois, lui vaudront des tirs de barrage de ses collègues de la presse privée. Un quotidien national est-il, pour autant, un quotidien partisan ? « L’expression de la plus simple logique voudrait qu’on ne change pas un coach qui gagne, écrivait ainsi Sakandé le 30 août 2010. Se débarrasser du pouvoir pour plaire à des gens dont la lucidité n’est pas garantie ou pour la satisfaction devant les principes, serait livrer des années et des années d’efforts de construction et de redressement national à des hommes qui savent ce qu’ils veulent, certes, mais qui ne savent pas toujours comment le vouloir, ni si leur vouloir et celui du peuple coïncident ». Un texte qui sera stigmatisé comme le « griotisme » du quotidien national.

Voilà donc que Sakandé se retrouve, à Koysam, dans le « corridor des tentations ». Directeur de la communication de la présidence du Faso ! Enthousiasmé par ce rôle. Qu’il conçoit comme « un devoir de mémoire à l’égard de tout ce que le président du Faso fait pour ce pays et de la manière dont il le fait », chargé, dira-t-il, « d’immortaliser, pour aujourd’hui et demain, par l’écriture, l’image, le son, le web..., les lignes fortes de son leadership ». « Dès maintenant, a-t-il ajouté, j’appréhende avec une certaine frayeur, les moments où ma lanterne, si modeste, n’éclairerait pas suffisamment la tâche dont il m’a honoré, qui est celle de travailler à côté d’un grand homme comme lui… Si cela arrivait, mon vœu serait que le président du Faso puisse oublier constamment mes limites pour ne se souvenir que de mon dévouement qui sera sans faille, ni faiblesse, sans retard, ni écart ».

Dans son enthousiasme, il comparera le chef de l’Etat à un « échangeur » osant cette image curieuse : « L’échangeur n’est pas là pour lui-même. Il est là pour ceux dont la destination passe sur son dos. Nous n’attendrons plus que les grands de ce monde viennent nous apprendre lequel d’entre nous est grand comme eux ».

Il y a quelques semaines, dans l’éditorial de son numéro du mercredi 1er février 2012, le quotidien burkinabè privé Le Pays, écrivait notamment au sujet des porte-parole de chefs d’Etat et de gouvernement africains : « Cette fonction est noble, en ce sens qu’elle permet aux gouvernements et à l’institution concernée de s’expliquer, de donner la juste mesure des choses en ce qui concerne les prises de décisions. Ce faisant, elle permet de mieux éclairer la lanterne du citoyen, si tant est que la partisannerie mesquine n’enrobe pas les propos du porte-parole. Ce dernier, en raison de l’importance de sa mission, doit savoir raison garder, et faire preuve de discernement autant que de courtoisie ».

Le Burkina Faso est engagé dans la gestion des effets collatéraux d’une crise de croissance qui a pris une tournure dramatique en 2011 avec les mutineries. Le président du Faso, quant à lui, s’est investi dans la mise en place de pôles de croissance dont le premier sera lancé, officiellement, dans quelques semaines à Bagré (au Sud-Est du Burkina Faso). Il est tout particulièrement concerné (et, plus encore, préoccupé) par la situation qui prévaut dans la région Ouest-africaine. Il a demandé à son gouvernement de s’atteler à réaliser un programme très ambitieux : la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable (SCADD).

La question ne se pose plus de savoir s’il est le plus grand, le meilleur ou le seul compétent : il a le job, il faut qu’il l’assume. C’est d’ailleurs ce qu’il fait. Quel doit être, dès lors, l’objectif de sa « com » ? Informer, expliquer, dialoguer en s’efforçant de convaincre. Non seulement la population burkinabè mais, aussi, les décideurs politiques et les acteurs économiques tant nationaux que régionaux ou internationaux. La visibilité et la lisibilité de l’action présidentielle sont des nécessités absolues. Même si, ici, les institutions de la République fonctionnent mieux qu’ailleurs. Il ne faut jamais perdre de vue que le président du Faso est élu au suffrage universel – événement politique et social majeur dans tous les pays du monde où ce mode de désignation a été adopté, quel que soit, par ailleurs, le taux de participation des électeurs – tandis que le chef du gouvernement est choisi par lui.

Or, il faut bien reconnaître que tout au long de ces dernières années, au Burkina Faso, la communication gouvernementale l’a emportée sur la communication présidentielle. Du même coup, la visibilité et la lisibilité de l’action du chef de l’Etat ont été faibles. On évoque généralement la « distanciation » qui caractériserait, désormais, le mode de production politique du président du Faso. La délocalisation du palais présidentiel à Ouaga 2000 semble isoler un peu plus le chef du pouvoir exécutif. On le voit moins sur le terrain, moins dans les médias (à quand remonte sa dernière grande interview à la presse nationale ou internationale ?). Et quand, ailleurs, on dénonce l’omniprésence (souvent stérile d’ailleurs) du chef de l’Etat, au Burkina Faso personne ne peut faire ce reproche au président du Faso. Il le dit d’ailleurs lui-même : il a choisi de laisser travailler les hommes et les femmes qu’il a nommés aux postes de responsabilité de l’Etat et de la nation, ce qui lui permet d’avoir une vision plus large des préoccupations du pays que s’il avait « le nez sur le guidon ».

Conscient que les « voltaïques » composent la plus forte population d’Afrique de l’Ouest et que son devenir est lié à celui de la région toute entière, il s’attache particulièrement à trouver des solutions aux problèmes qui se posent à ce niveau. L’information ponctuelle sur les activités présidentielles existe. Il y a le site de la Présidence du Faso, Les Cahiers de la Présidence du Faso... Mais c’est une information qu’il faut aller chercher, une information statique, froide, figée, inerte, « protocolaire » qui a besoin de se revitaliser. Or, le président du « pays des hommes intègres » n’est pas une personnalité désincarnée, lointaine, réduite à l’exercice du pouvoir.

Sakandé va donc avoir la rude mission de réanimer la direction de la communication de la présidence du Faso sans, pour autant, « griotiser ». A la direction générale des Editions Sidwaya, il cède la place à Rabankhi Abou-Bâkr Zida, qui occupait jusqu’à présent le poste de directeur. Il a pris officiellement ses fonctions le vendredi 16 mars 2012. A noter que, par ailleurs, Cyriaque Paré, directeur de la communication et de l’information du premier ministère, est remplacé par Hamado Ouangraoua, ancien directeur général de Sidwaya, ancien secrétaire général du ministère de la Communication, ancien directeur général de la RTB.

Jean-Pierre BEJOT
La Dépêche Diplomatique

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Vos commentaires

  • Le 20 mars 2012 à 19:21 En réponse à : La direction de la « com » de la présidence du Faso change de mains. Va-t-elle changer de mode de production ?

    "les « voltaïques » composent la plus forte population d’Afrique de l’Ouest"

    1- Nous sommes des burkinabè et non des voltaïques même mis entre guilemets

    2- Même avec la diaspora, nous ne faisons qu’à peine 10% de la population nigériane. D’où vient-il que nous sommes la plus forte communauté ?

    3- Plus griot que Sakandé, tu meurs...

  • Le 20 mars 2012 à 20:11 En réponse à : La direction de la « com » de la présidence du Faso change de mains. Va-t-elle changer de mode de production ?

    Sakandé va donc avoir la rude mission de réanimer la direction de la communication de la présidence du Faso sans, pour autant, « griotiser »
    Malheureusement il a griotiser pour en arriver là ! Il ne pourra jamais s’en défaire car c’est pour ça qu’on la mis là !I l ne rapportera jamais les choses objectivement au PF. Déjà il semble être pris de passion pour blaise comment pourrait être clairvoyant. Voilà des gens qui sont capable de faire des montages médiatique pour sublimer le président et l’élever au rang de dieu soleil comme on l’a fait en son temps pour mobutu.Blaise ne veut autour de lui que tout ceux qui ne vont jamais lui dire les choses telles qu’elles sont !!!

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