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RECONCILIATION EN CÔTE D’IVOIRE : Au nom de Dieu et des ancêtres…

Publié le mardi 20 mars 2012 à 01h08min

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Le Palais de la Culture de Treichville a été, le 17 mars 2012, le théâtre du lancement du mois du deuil et de la « purification » en Côte d’Ivoire. C’est la première activité majeure de la Commission dialogue, vérité et réconciliation, mise en place au lendemain de la grave crise postélectorale qui a secoué le pays en fin 2010-début 2011. Cette commission, on le sait, est présidée par l’ex-gouverneur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et ex-Premier ministre ivoirien, Charles Konan Bany. Dans l’Afrique traditionnelle par exemple, lorsque l’ordre et la paix de la communauté sont perturbés à la suite d’une transgression des règles sociales par un ou des individus, la réparation s’impose. La colère de Dieu et des ancêtres doit être apaisée à travers des rites d’expiation appropriés.

C’est probablement dans cette logique que s’inscrit l’instauration de ce mois de deuil et de « purification » en Eburnie. Faire le deuil, se purifier et purifier leur pays, les Ivoiriens en ont vraiment besoin pour refermer la page de la longue et meurtrière crise sociopolitique qui a ébranlé le pays depuis une décennie. Et c’est certainement dans l’optique d’inclure toutes les sensibilités dans cette entreprise combien difficile que toutes les obédiences religieuses ont été conviées à la cérémonie d’ouverture dudit mois. Au nom de Dieu et des ancêtres donc, les Ivoiriens veulent conjurer le mauvais sort qui a longtemps frappé leur pays.

Certes, on l’imagine aisément : ce n’est pas un combat gagné d’avance. Un mois ne sera probablement pas suffisant pour faire le deuil et purifier le pays de tout ce sang innocent qui a coulé. Il ne faut pas se voiler la face : une chose est d’instaurer un mois de catharsis et une autre est de réussir à en faire une occasion d’effort sincère pour se réconcilier. Mais le symbole en vaut la peine. C’est un acte qui vient s’ajouter à tout ce qui est entrepris en vue de redonner aux Ivoiriens la joie et la volonté de vivre ensemble dans un pays apaisé, une sorte de complément au processus de retour à la normale qui a cours dans le pays avec l’installation des différentes institutions après la crise postélectorale de 2011.

Il faut souhaiter que ce mois d’introspection ne se transforme en foire, en occasion de beuverie et de ripailles au détriment de son objectif affiché. Pour avoir plus de chances de succès, cette catharsis requiert l’engagement effectif de tous et de chaque Ivoirien. Les hommes politiques qui ont, du reste, une grande part de responsabilité dans la violence qu’a connue le pays, ne devraient pas être en reste. Ils doivent tous, quel que soit leur bord, s’impliquer avec franchise et honnêteté dans cet effort d’exorcisme national. Mais, il faut qu’une justice équitable, qui situerait les responsabilités des uns et des autres dans ce qui est arrivé, accompagne ce processus afin que les victimes et/ou leurs proches puissent vraiment faire leur deuil et pardonner.

Un effort de dédommagement des victimes et de leurs ayants droit en vue de leur permettre de retrouver plus ou moins une vie décente ne serait sûrement pas de trop pour enchaîner définitivement les démons de la violence et de la haine dont le souffle ravageur a mis le pays à feu et à sang. C’est dire qu’une réparation morale, judiciaire mais aussi pécuniaire pourrait aider à aller vers cette réconciliation dont on ne dira jamais assez la nécessité pour ce peuple divisé et ce pays meurtri. La tâche est ardue et requiert des sacrifices probablement énormes. Le jeu en vaut la chandelle, car c’est l’avenir de la Côte d’Ivoire qui se joue. Il ne reste qu’à croiser les doigts pour que les uns et les autres arrivent, à travers une conjugaison sincère de leurs efforts, à ramener le bonheur du vivre-ensemble en Côte d’Ivoire.

« Le Pays »

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