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Côte d’Ivoire : Lettre à mon neveu

Publié le mercredi 20 octobre 2004 à 06h57min

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Très cher neveu

Comme tu le sais, les membres du comité de suivi (ONU, CEDEAO et partis politiques protagonistes de la scène politique ivoirienne) séjournent actuellement à Ouaga où une audience leur a été accordée par le chef de l’Etat. Qu’avaient-ils à raconter que le commun des mortels ne savait déjà ? A savoir l’échec de la feuille de route censée conduire une fois pour toutes la Côte d’Ivoire à la paix.

On se demande combien faut-il encore de sommets, de tête-à-tête, de conciliabules d’’embrassades, de fuites en avant, de coups bas, d’entêtements, de baisers de Judas et de refus de voir la réalité en face pour qu’enfin, on en finisse avec ce dossier à multiples rebondissements. Nos compatriotes vivant ici, ne croient plus au miracle quand certains hommes se montrent plus bornés et limités que des mulets.

Le pouvoir ivoirien prend finalement les autres pour des nez percés. Or, on ne peut tout de même pas dire que tous ces médecins qui s’étaient présentés au chevet de la Côte d’Ivoire sont incompétents. Il manquait peut-être dans l’équipe, un psychiatre pour bien ausculter l’état mental de certaines autorités ivoiriennes.

Le seul message que ce fameux comité de suivi puisse délivrer en direction des Burkinabè, c’est le constat de son échec. En effet, le 15 octobre, date retenue pour achever les réformes politiques retenues par les accords de Marcoussis et d’Accra III semble définitivement enterré. Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que les faucons et les partisans du jusqu’au-boutisme de Gbagbo réclament la tête du premier ministre consensuel et qui doit son poste grâce précisément aux accords de Marcoussis.

Par dessus tout, Gbagbo ne se rend pas compte qu’il est finalement ennuyeux avec sa vieille rhétorique consistant à demander le désarmement des Forces nouvelles avant toute réforme. Inutile de revenir sur cette exigence qui sonne comme une provocation. Evidemment, Gbagbo a des raisons que la raison ignore. Mais, ces raisons finissent par se savoir.

A ce propos, je viens de lire un article publié dans un journal français. Ce journal rapporte les propos d’un diplomate français en poste à Abidjan. Il répondait à la question de savoir ce qui se passerait si les projets de loi n’étaient pas votés avant le 30 septembre comme l’avait souhaité la feuille de route d’Accra III et si les ex-rebelles refusaient de désarmer le 15 octobre. Voici ce qu’il avait dit : "il n’ y a pas de doute. Ils y seront contraints. Nous avons les moyens. Nous avons fini d’occuper les points stratégiques. Dans tous les cas, ces gens ne représentent plus rien. Nos rapports sont clairs là-dessus. Nous savons tout d’eux".

Pour le diplomate, la France envisage, ni plus ni moins, que de soutenir Laurent Gbagbo, "le seul" à leurs yeux, "à même de défendre les intérêts français". De Bédié, il dira qu’il ne représente plus grand chose" endormi qu’il est dans son village natal". De Ouattara, coincé dans son exil "français", il soutiendra qu’il est inoffensif. Même s’il était candidat, il ne sera pas en mesure de ramener la paix".

Quant aux Forces nouvelles, il en donne une opinion exécrable : "Elles sont en déliquescence. Beaucoup sont devenus des bandits de grand chemin".

Cher neveu, avec de tels propos, on voit que toutes ces agitations sont faites pour endormir les consciences. Dans ces conditions, que peut faire le Burkina, surtout qu’il vient d’être accusé de vouloir déstabiliser Nouakchott dont l’axe avec Abidjan fonctionne à merveille ? Nous suivons ici le parfait amour que filent actuellement la Côte d’Ivoire et la Mauritanie et qui ont valu à un opposant burkinabè, d’être dans le collimateur des autorités burkinabè.

En effet, ces dernières accusent Hermann Yaméogo d’être en intelligence avec la Mauritanie et la Côte d’Ivoire pour déstabiliser leur pays. Les dénonciations verbales, la guerre des ondes, les conférences de presse et autres démentis font actuellement la Une des journaux ici.

Dans ce rituel de désinformation et de manipulations, on ne sait même pas de quel côté se trouve la vérité ou le mensonge. Toujours est-il que j’ai appris que le climat déjà tendu entre la Côte d’Ivoire et le Burkina s’est aggravé au point que l’opposant Yaméogo est menacé de voir son immunité parlementaire levée.

Il semble que cette situation a créé une sorte d’union sacrée autour des opposants qui, il faut bien le dire, s’entredéchiraient. En effet, ils viennent d’organiser un meeting unitaire qui, au dire de certains observateurs, a mobilisé grand monde. Attendons de voir et à la prochaine, cher neveu.

Ton oncle
Le pays

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