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Rencontre informelle des chefs d’Etat de l’UA à Cotonou : Yayi Boni ne veut pas faire chemin seul

Publié le dimanche 19 février 2012 à 23h18min

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Le président de la République du Bénin, président en exercice de l’Union africaine a « invité », le 18 février 2012 au palais de congrès de Cotonou, ses pairs afin de « bénéficier de leurs expériences et de leur sagesse » à même de contribuer à définir les grandes actions à mettre en œuvre au cours de son mandat panafricain. Le président du Faso, Blaise Compaoré a participé à cette rencontre au sommet.

La réunion du 18 février 2012 se voulait une « rencontre informelle » des chefs d’Etat ?et de gouvernement que le président du Bénin, Yayi Boni, président en exercice de l’UA a souhaité « organiser » dans l’heureuse perspective de bénéficier de la « riche expérience » dans l’administration de l’Union qui, espère-t-il, l’« édifiera sur le chemin à emprunter » durant son mandat panafricain. Selon des sources proches des travaux qui se sont déroulés à huis clos, l’hôte des chefs d’Etat a souligné que son invitation « inaugure » une série de « concertations régulières » qu’il dit souhaiter mener durant tout son mandat afin d’« associer le plus possible ses pairs aux prises de décisions sur l’avenir de l’Afrique ».

Le président béninois, a rassuré tout de suite son auditoire en rappelant que la « désignation du président de la Commission de l’Union africaine et ses membres ne relève pas de la compétence des présentes assises » de Cotonou. Pour donner de la conviction à ses promesses et lever définitivement le doute, Yayi Boni, rappellera fort, à propos, qu’un comité présidentiel comprenant huit membres et renforcé par le Gabon, l’Afrique du Sud et le Bénin a été constitué en marge du sommet statutaire des 29 et 30 janvier 2012 à Addis-Abeba, en Ethiopie, pour traiter cette épineuse question de désignation du président de la commission de l’organisation panafricaine.

Du reste, le comité a souhaité de se réunir au mois de mars prochain pour un toilettage des conclusions de leurs travaux, avant probablement, que les chefs d’Etat ne prennent les grandes décisions. Mais pourquoi une « rencontre informelle des chefs d’Etat et de gouvernement » d’une demi-journée à Cotonou au lendemain seulement du sommet de l’UA d’Addis-Abeba ? En invitant ses pairs, la première préoccupation du président en exercice de l’organisation panafricaine était en rapport avec un sujet d’actualité tout aussi majeur que « vieux ». Il s’agit de la « persistance des crises et l’apparition de nouvelles menaces à la sécurité de nos Etats et leurs populations ». Et le chef de l’Etat béninois de rappeler l’« insécurité endémique » dans la région sahélo-sahélienne avec sa « cohorte de réfugiés et ses effets collatéraux sur les autres pays frères comme le Burkina, le Niger et le Nigéria ».

Il a manifesté aussi son inquiétude quant à la « recrudescence du terrorisme et des narcotrafiquants » dans certaines contrées de l’Afrique, la « piraterie maritime » dans le golf de Guinée et au large des côtes somaliennes, et le « retard injustifié des Africains » dans la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Yayi Boni a également avoué que les secousses sociopolitiques « pré et postélectorales dans nos pays sont pour lui des sources d’angoisses et de préoccupations… ». Ainsi, pour juguler ces potentielles menaces, l’hôte de la réunion de haut niveau a souhaité, ici et maintenant, la définition d’une « vision claire et partagée des actions conséquentes à mettre en œuvre pour prévenir les risques d’insécurité » et circonscrire les foyers de tensions qu’il faut, a-t-il appelé de ses vœux, étouffer dès maintenant…

Le paradoxe africain

La deuxième préoccupation du président de la république du Bénin vient d’un constat, selon lequel, l’Afrique n’arrive toujours pas à montrer ses propres indicateurs de performances macroéconomiques depuis une cinquantaine d’années, et ce, malgré ses immenses richesses et services. « Couvrant plus de 30 millions de km2, l’Afrique représente plus de 20% de la superficie mondiale avec ses ressources pétrolières, minières et agricoles. En 2050, elle représentera environ 1,8 milliard d’âmes dont plus de 60% seront constitués de jeunes de moins de 30 ans. L’Afrique est véritablement le continent de l’avenir, de l’espoir…mais son plus grand paradoxe est qu’elle n’est pas unie dans sa marche vers la paix, la stabilité, la sécurité, le progrès, la prospérité et le développement… », a fait remarquer le chef d’Etat béninois qui a prévenu que « nous devons définitivement enrayer l’afropessimisme ».

L’Afrique est longtemps restée dans les « hésitations et flottements » au moment de la prise imminente de l’initiative, a regretté Yayi Boni. Comment « conjurer » donc cette « contradiction multiséculaire » Voilà une des questions à laquelle les invités du président en exercice de l’UA ont été répondre à Cotonou. D’ailleurs, la réponse à cette question est tout trouvée : il suffit, a-t-conseillé, que nos gouvernants fassent preuve de plus d’« engagement et de détermination dans la gestion des affaires du continent pour le bien-être de nos populations et pour hisser l’Afrique au rang des continents respectés par la communauté internationale. Et c’est possible ! » Les voies du possible dont parle le président Yayi Boni sont formulées sous la forme d’une série de questions posées aux treize chefs d’Etat et au Premier ministre éthiopien. Comment renforcer l’unité ainsi que la capacité d’anticipation et de réaction de notre organisation pour faire face dès maintenant aux défis multiples et multiformes auxquels notre continent est confronté ?

Comment améliorer les mécanismes de prévention et de gestion des conflits dont nous disposons pour mieux gérer les cirses et réagir efficacement aux nouvelles menaces d’insécurité ? ? Comment gérer l’expertise inestimable et la source de sagesse que représentent les anciens chefs d’Etat qui ont dirigé nos pays et qui sont prêts à se mettre à la disposition du continent ? Comment faire pour que l’Afrique puisse parler d’une seule et même voix et de façon responsable sur les grands enjeux de notre continent....

On ne sait pas maintenant si le président Yayi Boni a eu une réponse satisfaisante à ses questions, ou si ses pairs, ont demandé un délai supplémentaire pour leur permettre de réfléchir et lui donner des gages de disponibilité à l’accompagner sur le « chemin à emprunter » durant tout son mandat unioniste. En attendant, cette réunion de haut niveau a eu le mérite de regrouper les premiers responsables des pays africains sur les sujets brulant de l’heure pour qu’ils fassent davantage preuve d’engagements.

Idrissa NOGO envoyé spécial à Cotonou (idrissanogo@yahoo.fr)


Les à- côtés du Sommet : Sommet des chefs d’Etat ou « rencontre informelle » des chefs d’Etat ?

Les journalistes burkinabè ont quitté Ouagadougou avec à l’idée qu’ils se rendaient à Cotonou pour la couverture d’un mini sommet des chefs d’Etat de l’Union africaine. Selon une source proche de la délégation officielle, on ne peut parler, ici, de sommet car le sommet est statutaire et donne lieu à l’arrêt, en préalable, d’un ordre du jour. La réunion de Cotonou est une proposition du président béninois qui a souhaité « inviter » ses pairs pour l’aider à réussir son mandat ,en tant que président en exercice de l’Union, mais aussi pour réfléchir, avec eux, sur les goulots d’étranglement qui tirent le développement de l’Afrique vers le bas. D’où la terminologie subtilement enrobée de «  ?rencontre informelle ? » pour dire que cette réunion, tout de même de haut niveau (12 chefs d’Etat et un Premier ministre) sort du cadre classique des sommets de l’UA.

Tenir debout pendant 7 heures

Nous avons quitté Ouaga à 10h et nous sommes arrivés aux environs de 11h10 à Cotonou (le Burkina a une heure de moins que le Bénin) ; les journalistes ont été rapidement orientés vers leur minicar, stationné à l’aéroport. Le président du Faso et sa délégation, eux aussi, se sont lancés dans le cortège qui n’a pas eu trop de peine (si ce n’est qu’au retour où les journalistes se « cherchaient ») à rallier le palais de congrès de Cotonou. Parvenus à la salle de la réunion, la délégation qui accompagnait le chef de l’Etat a été « bloquée » net à l’entrée. Tout le monde, à l’exception du président Blaise Compaoré, a été stoppé par les services de sécurité qui confondaient un peu les statuts des participants. « Huis clos ». Dès que le président du Faso est arrivé, il est entré pour le huis clos. Il n’en est ressorti qu’à 18h, juste pour reprendre la route pour l’aéroport.

Les journalistes, et surtout le photographe de la Présidence du Faso et le caméraman de la TNB dont la présence à l’intérieur nous semblait exceptionnellement utile, n’ont pas eu un traitement de faveur. La tentative de négociation pour entrer, ne serait-ce que pour les prises de vue, a été vaine. « Pour tuer le temps », nous nous sommes laissé aller tantôt à la marche pour se dégourdir les jambes et donner de l’air aux pieds enfermés depuis 7 h dans nos souliers bien cirés depuis Ouagadougou. Par deux fois, on a annoncé la sortie des présidents. Fausse alerte. En définitive, les chefs d’Etats nous ont tous « feintés ». Ils sont allés chez eux, les uns après les autres, aux pas de course. Ils sortaient de la salle comme si « ça chauffait dedans ». Tout le monde était pressé, si bien que certaines délégations étaient momentanément,« égarées » dans la multitude de voitures et de personnalités qui cherchaient, elles aussi, leur véhicule VIP. Au final, aucune info pour la presse. Ce fut assommant ? !


Commentaire : L’Union n’est pas unie ? !

« Notre continent n’est pas uni dans sa marche vers la paix, la stabilité, la sécurité, le progrès, la prospérité et le développement », a affirmé, haut et fort, le président béninois, président en exercice de l’Union africaine (UA).Yayi Boni, vient de faire la démonstration de son sentiment. Il veut visiblement donner aux chefs d’Etat la sincérité de ses affinités réciproques, telle qu’il le ressent. On devine aisément déjà les murmures réprobateurs accueillant avec scepticisme, cette rhétorique sans attrait. Car pour certains observateurs de la diplomatie africaine, le chef de l’Etat béninois n’a fait que changer de rythme, d’univers et de vocabulaire pour exprimer et rappeler cette accumulation d’heureuses circonstances manquées.

Encore une fleur de rhétorique dans la bouche de nos gouvernants, pensent-ils. Pour eux, l’Afrique a toujours été absente là où elle se devait de resserrer les rangs et imposer son poids et l’influence de sa personnalité dans le « banquet et le concert des nations ». Et ce ne sont pas les exemples qui manquent pour étayer cette appréhension de plus en plus étonnante : certains de nos gouvernants ne savaient pas sur quel pied danser lors de la crise postélectorale en Côte d’Ivoire. Le conflit armé en Libye a montré aussi les dissensions entre les Africains.

Tout comme l’image qu’ils ont donné à voir les 29 et 30 janvier derniers à Addis-Abeba, quand il s’est agi de désigner qui de Jean Ping ou de Nkosazana Clarice Dlamini-Zuma, pour conduire la Commission de l’Union. En réalité, pour d’autres aussi, le continent a sa propre définition de l’espace commun démocratique respectueux des droits de l’homme et des libertés fondamentales qu’il inocule, non pas en fonction des intérêts des populations désabusées, mais bien en fonction des humeurs de nos princes. L’Afrique combat l’Afrique. 50 ans après, le continent n’a pas une amitié lucide et exigeante de son partenaire « étranger » au regard condescendant. A l’heure où l’on assiste à l’effacement des frontières nationales au profit d’un système intégrant les sous-ensembles socioéconomiques et politiques, l’Afrique manque, elle, de passion dans l’entraînement. Elle trouve son équilibre sur un panier d’œufs. Que faut-il faire alors pour réveiller nos énergies assoupies ?

Yayi Boni en donne une réponse : elle « doit veiller aux préceptes de la bonne gouvernance politique et économique…et enrayer définitivement l’afropessimisme ». Le chef de l’Etat béninois prêche-t-il en eau trouble ? Attendons de le voir à l’ouvrage. Et pour y parvenir, faisons confiance au temps qui est la seule jauge de l’opportunité de la parole et de l’action.

I.N.

Sidwaya

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