FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Tous les intellectuels du Burkina Faso ont déjà entendu cette boutade que le président Thomas Sankara aurait sortie lors d’une visite faite aux chercheurs du Burkina Faso : "Des chercheurs qui cherchent, on en trouve. Mais des chercheurs qui trouvent, on en cherche !" Un de ces chercheurs pique toujours une colère majuscule chaque fois qu’il entend cette sentence : "Sankara est un ignorant !", gronde-t-il. L’histoire semble avoir donné raison à notre chercheur frondeur, des décennies plus tard, précisément en 2008 ! Cette année en effet, le journal Africa International dans son numéro 424 du mois d’octobre fait une liste des 50 meilleurs chercheurs africains des 50 dernières années, qui "ont trouvé" des choses capitales pour les populations africaines.
Sur ces 50 chercheurs, on retrouve 8 Burkinabè, soit un pourcentage de 16%, laissant ainsi la portion congrue au reste des pays africains ! Imaginez donc que sur plus de 50 pays, un seul remporte un palmarès de 16%, ce qui signifie que tous les autres réunis, toujours plus de 50, se partagent 84% ! Je ne vous dis donc pas que beaucoup de pays n’ont même pas un seul chercheur parmi le groupe !
Je pense que ce qu’on pourrait répliquer à Sankara (s’il était toujours vivant) et à tous les dirigeants africains, c’est la question suivante : "A quoi servent ces chercheurs qui trouvent !" ou plus exactement : "A quoi peut bien servir ce qu’on trouve pour les populations africaines ?". Prenons le cas particulier du Burkina Faso qui, pour cette fois, semble être bien nanti. Dakuyo Zéphirin, Pierre Guissou, Christian Napon, Robert Tinga Guigemdé, Odile Nacoulma, 5 de nos 8 lauréats, ont réalisé des recherches dont la finalité est l’amélioration de la santé de leurs compatriotes. A quoi servent leurs trouvailles, même si comme le FACA de Pierre Guissou, elles sont les seuls vrais médicaments pour les maladies qu’elles soignent ?
En effet, le FACA par exemple n’aurait aucun autre médicament aussi efficace contre la drépanocytose, maladie raciste s’il en est puisqu’elle s’attaque uniquement aux Noirs ! Le docteur Dakuyo s’est installé à Banfora et a fondé le laboratoire Phytofla. En lieu et place des quelques médicaments reconnus par le ministère burkinabè de la Santé, pourquoi tous les autres ne le sont-ils pas ? Au lieu d’utiliser des produits qui coûtent très peu chers et donc sont au niveau de la bourse du Burkinabè pauvre, on préfère toujours aller enrichir les firmes internationales dont souvent les produits à base chimique nous empoisonnent !
Et que dire de savants tels que Joseph Ki-Zerbo et Cheikh Anta Diop ? Voilà des gens qui ont passé l’essentiel de leur vie à chercher les remèdes au problème essentiel de l’Afrique moderne, l’aliénation mentale qui est le fondement primordial de toutes nos défaites. Et que fait-on de leurs travaux, de leurs trouvailles ? A la poubelle !!
Plus grave encore, le cas de personnages tels que Drobo Drobo II. Ce tradithérapeute ghanéen émérite qui, ayant trouvé un médicament efficace contre le Sida, s’est trouvé à six mètres sous terre, parce que non protégé par les autorités de son pays. En lieu et place, on nous impose des "trithérapies" coûteuses et nocives à nulles autres pareilles !!!
En fin de compte, à quoi sert de chercher et de trouver, si cela ne profitera à personne, ou plus grave encore, si c’est le plus court chemin pour se retrouver ad patres ? Thom, n’est-ce pas que dans ces conditions, il vaut nettement mieux chercher et ne rien trouver ?!
Les Africains ont bien raison de penser que : "L’enclos construit seulement par la pensée ne peut enfermer aucune vache" ! En nous invitant par sa boutade à croire qu’il est toujours mieux que les chercheurs africains trouvent, le président Thomas s’était fourvoyé. Oh ! Combien ?!!
Par Bétéo D. Nébié (neb_beteo@yahoo.fr)
L’Evénement
Vos commentaires
1. Le 16 février 2012 à 09:15 En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Bonjour Monsieur le "journaliste",
Juste vous rappeler que pour raisonnablement critiquer une analyse passée, il faut la situer dans son contexte. Si vous faites un état des chercheurs et de leurs trouvailles au moment où la boutade était prononcée, vous comprendrez mieux le sens de cette boutade.
Excellente journée
2. Le 16 février 2012 à 10:05, par ya siida En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Bonne moisson pour nos compatriotes !!!
Nous, en tout cas, nous cherchons l’argent dépuis mais on ne trouve pas et nous n’en sommes pas contents. Sankara a donc raison. S’il faut chercher pour ne pas trouver, il faut faire autre chose.
Effectivement, il faut que les fruits de la recherche servent au développement et à l’amélioration des conditions de vie dans nos pays. Malheureusement, le politique n’encourage pas cela et tant que ce sera ainsi les trouvailles de nos braves chercheurs qui trouvent resteront dans les tiroirs. Il faut y aller avec volonté et abnégation pour faire du développement. Le développement ce n’est pas des phrases pompeusement prononcées à longueur de journée devant des populations d’un illétrisme écoeurant !Ils en ont cure, eux !!! Aujourd’hui la vogue c’est la SCAD. Comme si c’est nouveau son contenu. Elle est bonne comme ses prédecessurs mais tant que nous n’allons pas cesser d’être hypocrites et nous engager réellement nous allons tout droit dans le gouffre ou nous démeurerons dans le gouffre, puisque nous y sommes dépuis. Tant que les uns et les autres ne verront dans la SCAD et ses projets que des opportunités de se taper des villas à Ouaga 2000 et de garder des valises pleines de fric, le développement du Burkina sera hypothétique et l’émergence une utopie. D’abord il faut qu’on soit patriote car le patriotisme est le levain de l’engagement franc pour son pays. Les belles paroles, nous en sommes habitués, mais nous voilà toujours dans des supplices vitaux d’une rare acuité ici bas. Cherchons vraiment, mais trouvons et sachons utiliser ce qu’on trouve. En outre, cultivons l’amour de la terre de nos pères pour ne pas que nos enfants nous maudissent à jamais. De cela découlera l’émergence vraie.
3. Le 16 février 2012 à 10:34 En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
félicitation à nos chercheurs qui sont sur cette liste
Quand à "Sankara est un ignorant !", je crois, qu il faut savoir relativiser les choses.
Primo :Dans quel contexte Sankara a-t-il dit "Des chercheurs qui cherchent, on en trouve. Mais des chercheurs qui trouvent, on en cherche !" ?
secundo : Ce n est totalement pas une insulte à l´égard des chercheurs. D un coté on trouve des chercheurs qui cherchent et de l autre coté on cherche des chercheurs qui trouvent, ce qui ne veut pas dire qu´on en trouve pas. Et si chacun veut être honnête envers soi même, la rareté des chercheurs qui trouvent n ´était un secret pour personne. Peut être que les donnes ont changé depuis maintenant plus d un quart de siècle. Toutefois cela ne signifierait pas que l on trouve des chercheurs qui trouvent à chaque angle de la rue.
Je crois qu il vaudrais mieux dire que ce que Sankara disait il y a plus de 25 ans n´est(peut être) de nos jours plus valable. Et cela un sans doute un signe de progrès dans la recherche au Burkina Faso
Félicitations aux uns et un grand hommage à tous les chercheurs
4. Le 16 février 2012 à 14:16, par Yarbila En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Vous n’avez rien compris de ce que ThomSank a dit.
Si vous faite le tour des universités africaine à l’époque, vous comprendrez le sens de l’affirmation de Thomsank. Combien sont t-il les africains qui s’arrose de ce titre et ne font absolument rien.
Et puis, franchement, si nous faisons des decouvertes, pourquoi sont nous nous ce que nous sommes par rapport aux autres aujourd’hui ?
Les medicaments, le Ipad, le Iphone, Facebook, l’energie solaire, la bourse, Kotler et Dubois, ecran plasma, la Porch, Nido et Nestler, Coca, la Beaufor etc...dite mois que qu’est qui est Burkinabè.
Je me soigne avec le medicament du blanc,
Je parle tous les jour la langue du blanc,
J’utilise une monaie dont le non est blanc
Et tu veux que je sois fiert de moi ?
5. Le 16 février 2012 à 14:23, par Bangré En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Bonjour à tous,
Retenez une fois pour toutes que la phrase "Des chercheurs qui cherchent, on en trouve. Mais des chercheurs qui trouvent, on en cherche !" n’est pas de Thomas Sankara.
C’est plutôt une déclaration du Gal Charles de Gaulle, à propos des résultats infructueux des chercheurs français sur la bombe atomique.
En cherchant sur le Net, vous pouvez vérifier...
Sankara et le CNR ont de la même manière, repris beaucoup d’idées et d’initiatives qu’on leur attribue abusivement.
Aprennons à nous cultiver !
Bangré
6. Le 16 février 2012 à 14:35, par Sidzabda En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
merci pour l’article. Mais il faut savoir placer les termes de sankara dans son contexte. Aussi " des chercheurs qui cherchent on a trouve, des chercheurs qui trouvent on a cherche !" restent-il d’actualité. Si c’est le cas, c’est donc vous l’ignorant.
7. Le 16 février 2012 à 16:00, par Alexio En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Cette boutade dans son contexte n arien de contradictoire avec la realite du moment.Le clientisme dans ce domaine etait visible jusqu a nos jours.Faisons reference a la chine de Pekin vous verrez que les africains ont manque ce rendez-vous,en se reniant leurs tradi-theurapeutes qui font le bonheur meme de l Occident.Un exemple concret:L akupuncture.Les plantes medisinales,etc.Les europpeens ont instaure cette science dans leur nomanklature medisinale,alors que chez nous rejetons tout ce qui est africain en adoptant tout ce qui est europpeen sans investigations de nos chercheurs.Il faut vivre en Europe pour le savoir.Les chinois ont su combines le moderne et la tradi-medicine.
8. Le 16 février 2012 à 19:22, par Kaf En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
M. Bétéo. je vous remercie pour votre pamphlet. Mais je voudrais demander qu’il vous plaise de bien analyser la boutade "des chercheurs qui cherchent on en trouve ; des chercheurs qui trouvent on en cherche "
Le Président Sankara ou le Gral de Gaulle, s’il est vrai que la paternité de la boutade lui appartient,a voulu dire que la recherche doit se mettre au service de la nation. En un mot, il faut privilégier la recherche-action, la recherche-développement au lieu de faire des théories, qui sont somme toute utiles mais ne nourrissent pas l’homme sous les cieux africains comme notre cher Burkina.
Peut-être aussi que les produits de la recherche sont très peu vulgarisés !
La faute aux chercheurs, certainement, car ils ne font pas état de leurs trouvailles, sauf à s’abonner à des revues scientifiques ; mais combien de burkinabè peuvent y accéder (il faut être au courant de l’existence de ces revues mais aussi avoir un intellect suffisant pour les lire).
La faute à nos Autorités,je pense aussi que oui, car elles ont le devoir d’accompagner les chercheurs dans la mise en oeuvre des résultats de la recherche. Ce qu’elles ne font pas ou très peu.
Enfin, la faute à nos opérateurs privés, qui n’ont pas encore compris l’intérêt de se positionner dans une démarche collaborative avec les chercheurs afin de transformer en biens et services les résultats de la recherche.
Ma petite contribution au débat.
Le 17 février 2012 à 02:02, par Saber En réponse à : FOCUS AFRICA : Les " trouveurs " de l’inutile
Merci KAF pour ta reponse !
Ajoutons que cette belle et veridicte boutarde est bien toujours d’actualité. Certes les statistiques de chercheurs méritant peut à quelques part encourager ou flater, mais n’oublions pas cet égoïsme du chercheur Burkinabé. Certains trouves, publient dans des revues de haute standing bien connue, mais combien songent à faire des brevets de leur trouvailles pour les rendre vendables et exploitables sous nos cieux ?
Comme le dit si bien un enseignant de l’UFR/SVT de l’Université de Ouagadougou, il faut que les "Chercheur du BURKINA" sachent et intègrent que "la Science n’est pas pour la maman de quelqu’un", mais un moyen de développement. Combien sont’il dans cette université burkinabé qui ont encouragés les jeunes à s’adonner à la recherche ou à s’interesser à valoriser certaines pratiques et produits des temps anciens ?
Et si aujourd’hui l’on a fierté de brandir des statistiques, sachons être intègre et honnête de reconnaître que Sankara fait bouger par cela l’ego de certains chercheurs qui de nos jours s’adjugent égoïstement leur trouvaille !