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Alliance pour la mouvance présidentielle : "Une stratégie élémentaire de neutralisation"

Publié le mardi 14 février 2012 à 01h59min

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C’est courant le week-end dernier que, par la voix de son président Toussaint Abel Coulibaly, on apprenait que l’Union pour la république (UPR) quittait l’Alliance pour la mouvance présidentielle (AMP), ce conglomérat d’entités politiques dont le chef de file n’est autre que le CDP, le parti majoritaire.

Quelles sont les raisons de ce départ ? L’UPR va-t-elle se saborder dans le CDP à la faveur du congrès de début mars ? De Blaise Compaoré, de l’article 37, sur lequel la position de l’UPR n’a pas varié d’un iota, de l’ADF/RDA, de Hermann Yaméogo et de l’affaire Guiro, Toussaint Abel Coulibaly, coutumier du langage direct, ne s’est pas défaussé.

Pourquoi avoir rompu les amarres avec l’AMP ?

• Tout simplement parce que nous avons essayé en vain de faire comprendre au CDP, qui coordonne cette Alliance, qu’il fallait revoir son mode de fonctionnement. Nous avons donc décidé de quitter l’Alliance parce que la politique du deux poids deux mesures y est la règle, et nous nous ne voyons pas les choses de cette façon. Alors, quand les divergences apparaissant ainsi, il vaut mieux prendre ses distances pour se consacrer à l’essentiel. Nous avons compris qu’il s’agissait d’une stratégie élémentaire de neutralisation ou de mise sous l’éteignoir.

Et pourquoi maintenant ?

• Comme je le disais, nous avons tenté à travers un certain nombre de propos et d’attitudes de faire comprendre à nos alliés que nous ne pouvions plus accepter de faire la politique sous "la supervision" d’un autre parti, fût-il le parti au pouvoir et qu’il fallait revoir les règles.
Nous avons donc été patients pour observer s’il y aurait des améliorations. Cela n’ayant pas été le cas, nous préférons quitter plutôt que d’en arriver à l’animosité entre nous.

Il paraît que vous allez vous saborder dans le CDP vrai ou faux ?

• Faux. Il n’en a jamais été question. L’on ne nous l’a pas demandé et nous n’en avons pas exprimé le besoin.
Du reste, certains membres de l’UPR sont des anciens du CDP qui sont partis pour des raisons diverses. Il faut être constant dans tout ce que l’on fait de positif dans la vie.
C’est cela être responsable de son destin sinon vous évoluez selon la direction du vent avec des langages et des attitudes qui changent. Je pense que même en politique il y a des vertus cardinales à respecter, contrairement à la caricature que l’on fait des hommes et femmes politiques.

Vous quittez l’AMP mais restez dans la majorité présidentielle ! Pour les Burkinabè, c’est kif-kif

• La convention de l’AMP stipule que l’adhésion et le retrait sont libres et il n’y a pas de problème quand on sait que nous avons soutenu le Président Compaoré depuis la création de l’UPR en 2004 avant même l’existence de l’AMP.
Notre intention est de nous libérer des bagarres inutiles pour mieux consacrer notre action de soutien au Président et ce n’est pas forcément le même cas de figure quand on le fait en toute liberté, que s’il y a des obstacles que l’on dresse volontairement devant vous pour vous empêcher de vous occuper de l’essentiel de la mission qui vous réunit.

Pour être précis vous êtes dans la même posture que l’ADF/RDA. Votre commentaire.

• Non, notre cas est différent de celui de l’ADF/RDA parce que depuis la création de notre parti le 20 juillet 2004, nous sommes de la majorité présidentielle, nous ne sommes pas passés de l’opposition à la majorité ; donc ce sont des parcours différents et nous respectons leur parcours car en politique chacun fait ses choix et les assume. C’est quand on n’a pas le courage d’assumer ses choix qu’il y a problème. On s’installe dans l’hypocrisie et il n’y a rien de pire qu’être dans cette posture. J’ai été éduqué dans un milieu où la parole donnée a encore son importance.

N’avez-vous pas l’impression qu’effectivement certains partis qui soutiennent Blaise jouent le rôle de seconde, voire de 3e, épouse ?

• Je ne sais pas dans quelle position est l’UPR dans ce que vous appelez mariage, mais ce qui est sûr, nous épousons la vision du Président Blaise Compaoré pour le Burkina Faso et quel que soit le rang que l’UPR occupe dans son cœur, l’intérêt du pays nous engage.

Pour être clair : est-ce que le CDP a vraiment besoin de l’UPR par exemple pour faire gagner Blaise à une élection ?

• Il n’y a pas de parti au monde qui n’ait besoin d’aucun autre, surtout s’ils sont sur le même territoire. Ceci étant, notre soutien au Président Compaoré ne se fait pas sous le couvert du CDP.
Le président Blaise Compaoré est le Président de tous les Burkinabè et ceux qui veulent le soutenir n’ont pas besoin de l’aval de qui que ce soit.
Le Président est un homme d’ouverture et de dialogue, très respectueux des autres malgré sa stature et c’est ce qui lui vaut le soutien de la majorité des Burkinabè ainsi que notre parti.
Ce n’est pas sûr que le CDP, sans sa caution, serait le même et nous aurait comme alliés.
Toutefois, je dois préciser que je ne parle pas de personnes ou de militants du CDP, mais de l’entité organisée qu’est le parti. J’ai beaucoup d’amis dans ce parti comme dans l’opposition. Les relations entre humains ne sont pas à confondre avec les relations entre partis politiques.

Vous êtes ministre délégué chargé de la Décentralisation. Est-ce le réaménagement gouvernemental qu’on dit imminent qui a dicté votre départ de l’AMP ?

• Il faut d’abord dire que ce n’est pas tous les militants de l’UPR qui sont au gouvernement et que la décision de quitter l’AMP nous avait été fortement recommandée lors de nos instances statutaires. Ce n’est donc pas une décision du Président de l’UPR. Ma personne importe peu quand il s’agit d’une décision des instances du parti. Je suis chargé seulement de les mettre en œuvre dans l’intérêt de nos militantes et militants qui se sentaient marginalisés.
Depuis la publication de la note d’information, je reçois des appels de toutes les provinces du pays. Des militantes et militants me disent très souvent « vous avez enfin appliqué ce que nous attendions tous » ou encore « quand vous comparaissez lors d’un jugement et que le traducteur ne vous aime pas vous êtes sûr de perdre le procès.

A moins que vous ne décidiez de parler vous-même au juge ». Ils en avaient assez de ne pas être pas traités à leur juste valeur.
Votre question, dans un autre sens, est au-delà de mes compétences. Je ne sais pas si vous avez connaissance d’un réaménagement gouvernemental mais sachez que depuis que notre parti siège à l’Assemblée nationale, il n’a jamais voté contre un projet de loi du gouvernement, même si nous n’étions pas représentés à un gouvernement. La majorité va du Parlement à l’Exécutif, pourvu que la collaboration soit dénuée de tout calcul ou marchandage.
C’est vous dire que nous avons soutenu le Président avant que notre parti ne soit appelé au gouvernement parce que pour nous, le marchandage politique est une très mauvaise chose. La paix et la stabilité, le progrès, le respect dont jouit notre pays est un motif suffisant pour soutenir le président Blaise Compaoré de notre point de vue.

Cela a l’air d’aller de soi mais pour nous la paix et la stabilité s’acquièrent grâce aux grands hommes d’Etat. Souvenez-vous qu’avant le président Compaoré le Burkina Faso était très instable.

Si l’UPR était débarquée par exemple du gouvernement, resteriez-vous dans la majorité présidentielle ?

• A l’UPR nous cultivons le sens de l’honneur, de la sincérité et de l’amitié vraie. La parole donnée ne se retire pas parce que l’on a perdu des avantages si la base du soutien est sincère. Le double jeu ne fait pas partie de notre mode opératoire, ce qui reste à prouver pour d’autres.
Nous ne sommes pas dans la majorité parce que l’UPR est au gouvernement. Depuis 2004, nous sommes de la majorité or c’est en 2008 que l’UPR est entrée au gouvernement. Nos parlementaires et nos conseillers municipaux sont des plus loyaux là où ils exercent.

Tant que ce sera le Président Blaise Compaoré, nous serons dans la majorité car notre soutien est indéfectible.

• Les questions de postes ministériels sont certes importantes mais pour, rien ne vaut la fidélité et la loyauté à servir son pays car en soutenant le Président Compaoré c’est le Burkina Faso que l’UPR sert.
Est-ce que tous ceux qui servent le Burkina Faso sont au gouvernement ?
On peut servir son pays à tous les postes pourvu que l’on le fasse avec conviction. Sinon si chacun devait faire de la politique uniquement pour des postes, je ne suis pas le plus méritant de tous ceux qui œuvrent pour ce pays.
Par contre c’est un grand honneur quand on vous confie des responsabilités dans un gouvernement et il faut être reconnaissant à l’égard de ceux qui vous font honneur.

Rassurez-vous, notre appartenance à la majorité n’a pas de conditionnalité. Nous voulons être là où nous serons respectés et ce n’était pas le cas à l’AMP. C’est inacceptable que celui que vous soutenez vous respecte et que des gens à côté bafouent votre honneur. L’honneur pour nous n’a pas de prix. Nous avons peur de ceux qui nous respectent car, en retour, il faut mériter ce respect.

Venons-en à l’article 37. Vous êtes un des défenseurs indécrottables de son toilettage. Vous arc-boutez-vous toujours à cette position ?

• Je ne sais pas si exprimer son point de vue c’est s’arc-bouter, mais je dois vous rappeler que toutes les interventions que je fais sont au nom du parti et non pas à titre personnel. Nous avons des rencontres lors desquelles nous dégageons des lignes de conduite et moi je les mets en œuvre en tant que premier responsable. A l’UPR c’est le BEN qui mandate le président pour telle ou telle déclaration. Il y a la démocratie à l’UPR. Quand la position du président est mise en minorité il s’en tient à cela.

Ceci étant, l’UPR a suffisamment prouvé je pense que c’est un parti qui assume ses points de vue à commencer par son président que je suis.
Notre position est toujours la même, pourquoi voudriez-vous que nous la changions ? Parce que ceux qui pensent le contraire ont changé la leur ? Nous sommes dans un pays où la liberté d’expression est garantie pourvu que l’on en fasse bon usage. Nous ne nous en priverons pas.

Après les travaux du CCRP et des assises nationales, l’article 37 reste en l’état pour le moment. Pensez-vous qu’un référendum pourrait régler la question ?

• Nous avons déjà dit que la question pour nous est une question de droit assez simple. Oui ou non l’actuelle Constitution recèle des dispositions permettant de la réviser ?
Oui ou non le principe de la limitation du mandat présidentiel contenu à l’article 37 est-il parmi les choses révisables ? La réponse est oui. Quelles sont les clauses non révisables ? Elles sont énumérées à l’article 165 et la limitation du mandat n’est pas concernée. Quels sont les mécanismes prévus pour réviser la Constitution ? Les réponses à ces différentes questions nous mènent, entre autres, au référendum qui fait partie des mécanismes édictés pour réviser la Constitution dans son ensemble.

L’article 37 n’est pas isolé ; il fait partie de l’ensemble et des clauses susceptibles de révision. Mais les gens parlent comme s’il était mentionné dans la Constitution que l’article 37 n’est pas révisable. Ou l’on est en droit ou l’on est dans l’appréciation selon ses propres sentiments.
En droit c’est exactement comme si l’on disait à un justiciable vous avez le droit d’utiliser des voies de recours mais abstenez vous de le faire.

Le bon sens veut que l’on laisse celui qui est concerné exercer son droit ou y renoncer et surtout de ne pas lui donner l’impression en plus qu’il sera dans l’illégalité en usant de ce droit de recours.
Il paraît que selon un sondage, 52% des Burkinabè sont contre sa révision. Du reste une pétition à cet effet avait été initiée et nous avions félicité les auteurs de cette démarche. Il y a aussi les représentants élus du peuple que sont les députés, pourvu qu’ils représentent des membres de l’Assemblée nationale. C’est assez clair à mon avis.

Dans tous les cas, il faudra en parler un jour ou l’autre et il ne faut pas faire passer les problèmes d’une génération à une autre.
A propos du CCRP, nous répétons qu’il est juridiquement impossible de constitutionnaliser la chefferie coutumière et traditionnelle qui est une institution coutumière et ne saurait cohabiter avec les institutions républicaines sans toucher à la nature démocratique, unitaire et surtout laïc de notre Etat.

A notre connaissance, le président du Faso n’a pas demandé de réflexion sur la nature de l’Etat mais plutôt le renforcement de la démocratie. En quoi la constitutionnalisation de la chefferie renforce-t-elle la démocratie ? Rappelons que le mode d’accès au pouvoir y est héréditaire.

Si nous voulons maintenir le respect pour nos coutumes codifions-les à travers une loi ordinaire comme dispose l’article 101 de la présente Constitution car, même l’organisation de l’administration générale de l’Etat est renvoyée à une loi par le même article 101.
Il est question d’instaurer un débat sur la laïcité.
Quand on veut instaurer un débat sur la laïcité c’est qu’il y a problème. Alors pourquoi en rajouter ? Après la chefferie à qui sera le tour ? Le clergé, les pasteurs ou le conseil des Imans ? Parce que pour nous la coutume n’est plus ni moins que la religion traditionnelle.
Si la laïcité est touchée par un quelconque acte, nous n’y adhérerons pas car, c’est la nature de notre Etat qui nous rassemble, la nation restant à construire. Alors, allons prudemment.

Hermann Yaméogo est partisan de la « Constituante ». Adhérez-vous à cette idée ?

• L’UPR est un parti qui exprime ses points de vue et les assume en se gardant de porter des appréciations sur des propositions d’autres partis politiques.
Nous sommes en démocratie et toutes les opinions comptent pour faire la diversité sinon nous n’en seront pas là.
Je pense qu’il a fait sa proposition à une attention bien précise. Si tel est le cas alors c’est mieux que nous n’en fassions pas un sujet de commentaires. Je ne suis pas le mieux placé pour apprécier la voie que notre pays doit emprunter.

L’affaire Guiro défraie la chronique. Ne pensez-vous pas qu’au-delà de son cas c’est tout le système qui permet ces pratiques ? Et comment y mettre un terme ?

• Je ne sais pas de quel système vous parlez qui permet de remplir des cantines d’argent mais si je dois répondre je vous dirai que quand la justice est saisie d’un dossier il faut laisser de côté les appréciations personnelles.
La mal gouvernance est certes un des grands défis auxquels notre pays fait face, mais de là à me prononcer sur un dossier pendant, de par ma formation de base je m’en garde. Toujours est-il que vous n’ignorez pas que la lutte contre tout ce qui s’apparente à de la mal gouvernance est engagée par les plus hautes autorités du pays et de ce fait chacun doit se sentir concerné par cette lutte sans aucune relation avec l’affaire que vous citez.

Interview réalisée par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 14 février 2012 à 04:49, par La Sagesse En réponse à : Alliance pour la mouvance présidentielle : "Une stratégie élémentaire de neutralisation"

    Bravo El Presidente ! La grandeur d’esprit de Monsieur Toussaint Abel COULIBALY n’est plus à démontrer à personne même les plus médisants et les plus calomnieux. Parlons peu et bien comme il a répondu de façon précise, nette et bien dans cette interview. Quelle intelligence ! Bravo Monsieur Le Président. Le Président COMPAORE apprécie des hommes comme vous et pas des margoulins qui font semblant de l’aimer, ou ces caciques gourous qui empêchent le Président Blaise COMPAORE de recourir à toutes les compétences du pays sans distinction d’ethnie, de religion ou d’appartenance politique. La pérennité du Président Blaise COMPAORE dépend de ce type de courage. Celui qui vivra, verra.

  • Le 14 février 2012 à 16:25, par SUCRETTE En réponse à : Alliance pour la mouvance présidentielle : "Une stratégie élémentaire de neutralisation"

    Bof ! Monsieur le President ta derniere reponse me laisse plutot sur ma faim ! vue votre position, ca m’etonne que vous ne puissiez pas etre critique face a un comportement comme celui de Guiro ! On ne vous demande pas de le juger puisque vous n’etes pas juge et on sait aussi que l’affaire est entre les mains de la justice ! chacun se fait une opinion et beaucoup de gens se sont exprimes a ce sujet vous pouvez nous dire aussi ce que vous pensez de ces genre de comportements pour notre pays ? Vous etes President de parti !?!?

    • Le 15 février 2012 à 08:40, par nous méritons mieux En réponse à : Alliance pour la mouvance présidentielle : "Une stratégie élémentaire de neutralisation"

      Vraiment bof, d’après le prof Laurent BADO "bonnet blanc blanc bonnet". c’est juste dommage de contester que certains partis politiques passent leur temps à tromper le peuple Burkinabè,oui il est president de parti mais il ne peux pas avoir d’opinion car son parti n’est pas sensé car il a ete crée pour suivre l’idée des autres (parti au pouvoir). Que veux il n’ya pas de miracles dans la vie "ils doivent la fermer".
      Mais un jour ils comprendront tous dans quelle direction il contribuent à envoyer notre pays et ce jour là ils auront à repondre devant le peuple.

      • Le 15 février 2012 à 22:16, par La Sagesse En réponse à : Alliance pour la mouvance présidentielle : "Une stratégie élémentaire de neutralisation"

        Mais je veux bien avoir l’identité de tous ces gens qui critiquent les partis politiques alors qu’eux-même n’osent pas créer un parti politique pour changer les choses au Burkina. Donc vous êtes des criminels contre le peuple si vous pouvez faire mieux que les gouvernants actuels et que vous ne le faites pas ? Vous aussi, un peu se sérieux quand même !

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