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A MES PATRIOTES DISPARUS : "Les nouveaux riches de la République ont franchi une étape supérieure"

Publié le vendredi 10 février 2012 à 00h31min

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Louis Armand Mihyèmba Ouali a choisi de rendre hommage à ses compatriotes qui, dit-il, ont imprimé leur marque dans la construction de la patrie des Hommes intègres, et ce par leur grandeur d’esprit et leur honnêteté. Lisez !

Après une série de réflexions à haute voix, en 2011, pour contribuer à la lutte des peuples d’Afrique, en cette fin de première moitié du premier mois de l’année (décisive ?) 2012, j’ai choisi d’écrire des épîtres (des lettres) à des patriotes pour leur réitérer mon admiration, mon respect. « A tout Seigneur, tout Honneur ». Je n’ai pas connu Amirou Amidou Thiombiano, le fondateur du Parti africain de l’indépendance (PAI). Sa fille, Aïcha Josiane Prisca Lamoussa, ne l’a « malheureusement pas bien connu ». (L’Observateur Dimanche n°445 du 03 au 09-12-2004). Mais elle confirme ce que tout le monde dit de son père : Amirou Thiombiano a symbolisé l’honnêteté et l’intégrité. Il fut et demeure un maître.

Maître, « Je suis blanc comme neige. » (Sidwaya n°6322 du mardi 16 décembre 2008). « Je n’ai pas d’état d’âme face à un fraudeur. » (Le Pays n°4557 du vendredi 19 au dimanche 21 février 2010). Ainsi parlait un de tes « collègues » ou plus exactement ce monsieur. Ayant reçu, de ses mains, un exemplaire de la Décision n°00639-MFB/SG/DGD du 24/12/2003 portant Code d’éthique et de conduite des agents des douanes, j’ai eu la faiblesse de douter quant au bien-fondé du mandat de dépôt décerné contre cet homme qui n’était pas « n’importe qui ». Oh ! Très vite, je me suis rendu à l’évidence en lisant la presse (entre les lignes). Ma conviction fut rapidement établie qu’effectivement « nous sommes gouvernés par une mafia ». (Bendré n°664 du lundi 24 octobre 2011).

Maitre, Le 4 Août 1984, ton pays, la Haute-Volta est devenu le Burkina Faso, le Pays des Hommes intègres, fiers, dignes, incorruptibles. Combien de temps cela a-t-il duré ? Le temps d’un feu de paille. Par contre, et plus durablement, cela fait un quart de siècle et plus, que l’honnêteté est devenu un délit au pays des Hommes intègres. Les moutons des secteurs public et parapublic se sont mis à brouter, rageusement, sans gêne, sans vergogne, là où on les a attachés. Les nouveaux riches et les voleurs de la République ont franchi une étape supérieure : ils sont devenus arrogants, insolents, veules, viles et comme des tonneaux vides, ils font beaucoup de bruit, trop de bruit. En réponse à ceux qui ont dénoncé cette dérive criminelle, morbide, ils répondaient, invariablement, : « ce sont des jaloux », « des opposants aigris », etc. Un médecin, du haut de la chaire de l’Hémicycle a posé un diagnostic sans complaisance : « la morale agonise au Burkina Faso ». Les rapports du Comité national d’éthique ont mis en exergue et souligné le mal. L’Eglise catholique a apporté plusieurs contributions magistrales : « combattre et vaincre la corruption. Lettre pastorale des Evêques du Burkina Faso » ; « Corruption et lutte contre la pauvreté au Burkina Faso : quelle contribution de l’Eglise catholique ? » in « Justice et Paix » n°005 du 17 au 21 novembre 2008. Rien n’y fit. La presse a tout essayé. Toujours rien.

L’ Autorité supérieure de contrôle d’Etat (ASCE), la Cour des Comptes, les Inspections techniques, etc. créées pourtant par le régime, ont tiré la sonnette d’alarme. La seule réponse obtenue « Y a rien au village » ; « Les jaloux vont maigrir », etc. Le Réseau national de Lutte anti-corruption (REN-LAC) a inlassablement dénoncé le fléau, preuves à l’appui : rien, la vie est belle pour les nouveaux riches. Mieux encore, l’Etat, en reconnaissance des « éminents services » rendus au régime, au système, leur a distribué, à la pelle, des décorations. Le frère député Laurent Bado a soumis au Parlement une proposition de loi sur le délit d’apparence comme contribution à la lutte pour éradiquer le mal, le fléau du quart de siècle. Avec le rire guttural qui les caractérise, ils l’ont rejeté d’un revers de la main et ont continué à boire… tranquillement leur C … E (champagne).

Maître, J’en étais arrivé au point où je racontais que : « Bientôt nous conduirons nos enfants dans un musée et en leur montrant un squelette, nous dirons : voici l’Honnête homme, l’Homme intègre. Il vivait au Burkina Faso il y a mille ans. » L’Eglise catholique, (encore elle !), a lancé aux fidèles « un appel au renversement des systèmes corrompus. » (L’Observateur Paalga n°7554 du lundi 25 janvier 2010). Le combat mené, sans relâche, semble porter des fruits, des résultats. Quoique ce monsieur bénéficie de la présomption d’innocence, Il faut reconnaître et souligner que ses déconvenues actuelles, ses ennuis judiciaires servent la cause de la lutte contre la corruption ; le premier pas fait dans le bon sens, il en faudrait cependant de nombreux autres pour crier victoire car c’est connu :« le poisson pourri par la tête ». Pour paraphraser Nazi Boni, il faut convenir que si l’incubation de la corruption s’est prolongée, c’est que la couveuse (le régime en place) est mauvaise. Quand on sait que ce monsieur, tout en n’étant pas n’importe qui, n’était pas membre du clan qui régente le pays, alors la lutte doit continuer et plus résolument encore.

Maître, Ta grande rectitude de pensée, ton honnêteté intellectuelle, ta probité sans égale dans le milieu des gabelous de ton temps et d’aujourd’hui font de toi un Modèle. Amirou Thiombiano n’est pas mort. Amirou Amidou Thiombiano est une référence d’intégrité immortelle. Qu’aucune des grandes écoles ne porte le nom de ce patriote est incompréhensible. Mais ainsi va le Burkina Faso depuis vingt-cinq (25) longues années. Puisse le véritable drame actuel nous rappeler la vie exemplaire de l’intègre Amirou Thiombiano. Le pays gagnerait à la faire connaître, surtout les nombreux douaniers honnêtes et patriotes.

DORS EN PAIX, MAITRE.

Louis Armand Mihyèmba OUALI

Le Pays

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