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PROCES DE PARTISANS DE KADHAFI : Le CNT fait de la diversion

Publié le mardi 7 février 2012 à 01h11min

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Le dimanche 5 février dernier, en Libye, 41 partisans de Mouammar Kadhafi devaient comparaître devant « une juridiction militaire ». L’un des chefs d’inculpation retenus contre eux est d’avoir soutenu l’ancien régime contre la révolution du 17 février. Mais à la demande de la défense, le procès a été renvoyé au 15 février prochain. Il est tout à fait normal que des partisans du défunt guide répondent un jour de leurs actes. On a cependant envie de se demander si c’était opportun de déclencher la machine judiciaire dans une Libye mise en lambeaux par une guerre fratricide et qui peine jusqu’ici à se stabiliser. A ce que l’on sache, le pays a connu près de 4 décennies de régime d’exception avec la quasi-inexistence d’institutions judiciaires dignes de ce nom.

Où a-t-on donc trouvé, illico presto, cette fameuse justice militaire qui se dit en mesure d’offrir un procès équitable aux anciens dignitaires du défunt régime ? Qui compose cet appareil judiciaire ? Cela ne fait aucun doute. La justice qui a la charge de juger les partisans de Kadhafi, porte la marque de fabrique du CNT (Conseil national de transition), l’organe politique de la révolution libyenne. On a donc peur que ce procès ne soit un procès à la Mongole, en référence à ce jugement moyenâgeux où le général vainqueur de la guerre s’érigeait à la fois en procureur, président du tribunal et juge d’instruction.

Or, s’il est vrai que la justice est mère de la paix et de la stabilité, celle des vainqueurs instaure une paix précaire. En tout cas, le risque de bafouer les droits des accusés est grand. A l’étape actuelle de la reconstruction d’une nouvelle Libye démocratique et respectueuse des droits humains, le CNT qui en a la charge devrait avoir d’autres priorités que de se lancer à la poursuite des caciques de l’ancien régime. A moins de faire de la pure diversion. On sait du reste que le CNT est lui-même constamment sommé par la rue de quitter le pouvoir. Il y a donc de bonnes raisons de croire qu’il s’empresse de juger des partisans de l’ancien régime pour calmer la vindicte populaire qui réclame incessamment son départ du pouvoir transitoire.

Au fait, plus qu’hier, chercher aujourd’hui à châtier des partisans du régime déchu, c’est s’attirer la sympathie du peuple libyen qui y voit la cause de tous ses malheurs. Mais cet opium aura-t-il les effets escomptés ? Rien n’est moins sûr. En Tunisie, comme en Egypte, ces manœuvres dilatoires ont déjà montré leurs limites. Et, le fait de traîner un Hosni Moubarak couché sur une civière, tout ex-président qu’il est, devant la justice, n’a empêché en rien le peuple égyptien de descendre dans la rue pour réclamer le départ des généraux du pouvoir. Le CNT libyen ne semble pas en tirer toutes les leçons.

Boulkindi COULDIATI

Le Pays

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