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Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

Publié le mardi 7 février 2012 à 01h11min

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Des députés ont, innocemment, applaudi quand la ministre de l’enseignement de base et de l’alphabétisation (MEBA) d’alors, Odile Bonkoungou, a affirmé, suite à une question orale, devant la représentation nationale : « Des classes sous paillotte, il en aura encore et toujours au Burkina Faso ». Peut-être, parce qu’aucun des enfants de ces acclamateurs ne connaîtrait ce calvaire d’apprendre sous ces abris de fortune. Cette déclaration relève certes d’un zèle mais, à y réfléchir, elle ne mérite aucune acclamation. Que la première responsable de la pépinière du savoir d’un pays tienne un tel discours, cela peut être interprété comme du pessimisme voire du fatalisme pour l’avenir d’un levier du développement sur lequel la nation mise beaucoup et continue d’injecter une part non négligeable de son budget. C’est un aveu qui n’augure pas des lendemains meilleurs dans un secteur qui engloutit, chaque année, des dizaines de milliards F CFA.

Malgré les ressources financières consacrées au Plan décennal de développement de l’enseignement de base (PDDEB) pour briser la fracture infrastructurelle, la persistance des cadres précaires de diffusion de la connaissance au plus bas niveau se pose avec acuité. Le nombre des classes sous paillotte va grandissant sur le territoire national et remet en cause les efforts consentis depuis des lustres pour enlever cette épine du pied de l’éducation nationale.

Toutes les provinces du pays en souffrent. Il n’y a pas une cérémonie d’inauguration ou de normalisation où des hauts-commissaires, des directeurs provinciaux de l’enseignement de base (DPBA), des inspecteurs-chefs de circonscription d’éducation de base (CEB) n’interpellent les plus hautes autorités sur l’ampleur de ce phénomène et ses effets collatéraux sur la qualité du savoir dispensé. Au milieu des contraintes d’une « école gratuite et obligatoire jusqu’à l’âge de seize (16) ans », la récurrence des paillottes ou de la précarité des logements et le retard dans la dotation des manuels scolaires semblent, le plus, « mettre le sable dans le couscous de la promotion réelle de l’éducation nationale ».

Les classes sous paillottes mettent en péril la scolarisation. Elles troublent considérablement l’approche, « l’école pour tous ». Car les cadres précaires du savoir sont des niches d’insécurité aussi bien pour les élèves que les enseignants. Dans un pays où l’harmattan et la canicule sont les plus violents du continent, il y a des raisons pour des élus du peuple de ne pas acclamer les beaux jours des écoles sous paillottes. Ils doivent, bien au contraire, s’interroger sur le fait que la manne, sans cesse croissante, allouée au volet de l’éducation de base ne parvient pas à réduire ce phénomène. Les enseignants et les élèves sont exposés aux maladies respiratoires et aux morsures de reptiles. Ajouté au manque criant de logement pour maître, le déficit de salles de cours et même de tables-bancs est une véritable menace au plein épanouissement de l’enseignement de base.

C’est au prix de leur vie que certains maîtres accomplissent leurs missions, dormant dans des magasins ou des cases rondes. Et des élèves subissent la croix et à bannière. Assis à même le sol dans des abris de fortune, ils sont inconfortablement à la quête d’un savoir difficilement à portée. Il n’y a pas de volonté et de courage qui ne s’effritent pas face à certaines réalités avilissantes et déshumanisantes. Le monde éducatif en général et le corps enseignant en particulier ont beau crier leur désarroi, rares sont les oreilles qui prêtent une oreille attentive à leur complainte, pourtant très justifiée.

Le Burkina Faso a cette manie « d’enterrer des cadavres en laissant leurs pieds dehors ». Cette démarche porte un vrai préjudice à l’aboutissement de nombreuses initiatives. Elle a laissé divers chantiers dans un goût d’inachevé et rangé plein de dossiers dans des tiroirs. Les établissements scolaires à trois (3) classes se révèlent maintenant une mauvaise option pour promouvoir l’éducation nationale. Le relais que devraient prendre les populations tarde à être une réalité. Dans l’état actuel de paupérisation, elles se montrent incapables de remplir leur part de responsabilité. Le processus pour atteindre les six (6) classes, vacille.

Une réflexion sincère et agissante doit diligemment être ouverte à tous les niveaux de décision pour amener les parties prenantes à envisager les voies et les moyens de combler ce vide. Si ce ne sont pas des paillottes et des logements précaires en banco qu’elles construisent, quand la classe de CE II intervient, c’est le système multigrade qui s’impose comme l’alternative la plus probante. Soit l’enseignant squatte chez l’un de ses collègues ou fait face à un effectif pléthorique avec une double préparation essoufflant et ennuyeuse, soit il risque tous les dangers avec ses écoliers. Maîtres et élèves sont tout simplement embarqués dans la même galère qui déprime la transmission et la rétention du savoir. Le logis et le lieu d’apprentissage alarmistes.

Les écoles sous paillottes constituent vraiment la plaie béante du système éducatif burkinabè. Et cela n’est pas à l’honneur du pays. Un choix judicieux aurait voulu qu’en attendant de réunir les moyens nécessaires pour ouvrir véritablement les écoles de proximité, l’on se focalise sur des équipements appropriés à équidistance entre plusieurs villages. Il suffit que le site d’implantation obéisse à des critères objectifs plutôt que ceux basés sur la localité du chef, celle d’une personnalité ou d’un bonze du parti. Cela aurait eu l’avantage de doter, un tant soit peu, le pays d’infrastructures scolaires modernes et résolu, du coup, plusieurs problèmes entravant le plein épanouissement de l’éducation nationale.
L’engouement pour « un village, une école », à l’image l’érection des préfectures, a, quelque peu trahi le souci de la qualité de l’élan du gouvernement dans le domaine de l’éducation.

A tout bout de champ, chacun a voulu un siège de l’administration ou un temple du savoir chez lui. A priori, ces revendications ne revêtent rien d’anormal. Bien au contraire. Mais, il y a des préfectures, des communes rurales, des écoles primaires publiques (EPP) ou des Collèges d’enseignement général (CEG) distant seulement de deux (2) kilomètres qui n’ont de ces appellations que de nom. Ce sont des coquilles vides. Car, elle ne dispose pas du minimum. Des ressources ont été dispersées pour un but non atteint. Certaines infrastructures ne servent pas pleinement du tremplin des activités pour lesquelles elles ont été construites.

C’est mieux de cultiver l’abondance, d’accroître les statistiques scolaires, d’affirmer la bonne marche de la décentralisation, de brandir la réalité la mise en œuvre de la déconcentration, de réclamer la proximité tout azimut. Mais dans un pays aux ressources très insuffisantes et très limitées où tout est prioritaire, le bon sens voudrait que soient, habilement, conjuguées l’efficience et l’efficacité pour asseoir des équipements raisonnables répondant au souci de la quantité et de la qualité à tout point de vue.

Tant que la construction des écoles va s’arrêter à trois (3) classes et deux (2) logements, tant que des villages très proches persisteront dans leur égoïsme et refuser des infrastructures communes, tant que les populations concernées par les équipements montreront leur incapacité à assurer la relève des investissements, les écoles sous paillotte seront toujours là mais pour ternir l’image de l’éducation, à la base, du Burkina Faso. Le ministère en charge devrait se préoccuper d’inverser cette tendance que d’entretenir des déclarations, à la limite insultantes, bien que fort applaudies par des parlementaires qui ne réalisent pas l’impact négatif du phénomène sur la qualité de l’offre éducationnelle.

Dorcas Céleste KOIDIMA, (dorcas.koidima@yahoo.fr)

Pour lefaso.net

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Vos commentaires

  • Le 7 février 2012 à 07:07, par aboz En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

    Quand le ridicule peut tuer, il ne faut pas s’étonner qu’un jour ce que l’on sème nous retombe dans la face...Comment après 25 ans de la lutte pour l’éveil social et la conscience patriotique pour le bien être de tous et toutes sans distinction on en soit rendu là ?

  • Le 7 février 2012 à 08:37, par paris 7 En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

    Merci à Dorcas pour cette analyse perspicace ! Que les choses changent !!!!

  • Le 7 février 2012 à 13:23, par Salif En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

    Bonjour et merci beaucoup pour cet article qui dit tous sur l’enseignement au Burkina.En effet les écoles à trois classes sont toujours présents peut être que certains députés ou corps d’État ne le savent pas :"il y a trois classes ou du moins trois paillotes,soit ils font CP1,CE1et CM1 pour une année et l’année suivante ils font le reste où ils font deux classes cumulées c’est à dire CP1etCP2 ensemble,CE1 et CE2,puis CM1 et CM2 ensemble et c’est le cas le plus rependu" Cela signifie que l’enseignent doit donner deux cours distincts à des élèves de niveau différents assis sur une même table ou à même le sol. Et avec tous cela ont nous parle de Burkina émergent en2025 je ne sais pas c’est quoi ils appellent ÉMERGENT à moins que se soit le fait de se faire exploiter à coût de 10% ou la construction d’infrastructures routier qui ont pour but de nous faciliter l’importation massive de produits étranger tout en fermant nos usines de production.Si c’est l’émergence à laquelle je pense c’est que nous avons pas encore amorcer le pas.

  • Le 7 février 2012 à 14:13, par Bila En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

    Qu´avez vous contre les paillottes ou du moins que cachez vous sous votre "La paille de l´école burkinabè ? Je suis né dans une case. J´ai acquis mon éducation de base dans une case et dans la brousse sous les karités et les tamariniers... Certes votre article montrent les nombreuses difficultés dues à la gestion et au manque de logistique adéquates du système tant bien au niveau de l´éducation
    qu´à d´autres niveau, mais de là à fustiger les écoles sous paillotte... Savez vous que dans un monde où la course au savoir, je dis bien au savoir est des plus âpres tous les moyens sont bons pour y accéder ? On peut apprendre à lire et à écrire sur le sol en utilisant son doigt où un morceau de bois. Tenez vous bien les grecs, les hébreux, etc. le faisaient...
    Avec une bonne conscience professionnelle, l´essentiel est de passer le relais des connaissances.
    Je ne suis ni un avocat de Mme Bonkoungou, ni un bonze profitant des milliards investis dans l´éducation de base mais je trouve qu´elle a une vision juste. Voulez vous attendre que des duplex soient construits pour donner accès au lire et au écrire à vos enfants ? Moi pas. Même sous les arbres et la pluie je le ferais. Et tenez vous bien par mon intermédiaire plusieurs écoles à trois et six classes ont été construites dans plusieurs localités du Burkina.
    Si vous considerez le taux de l´analphabétisme et celui de la croissance de la population, vous comprendrez qu´il ne faut pas attendre que "l´Etat" ou que patati et patata fassent ceci ou cela pour faire "le boulot". Le Burkina ne pourra vraiment avancer que lorsque vous et ceux qui pensent comme vous auront compris que les classes sous paillotte et même sous les arbres et les buissons sont et resteront nécessaires. Ou alors vous donnez un autre titre à votre article et laissez Mme Bonkoungou en Paix. je ne la connais pas mais je suis de son point de vue pour la vulgarisation du savoir. Sincèrement !

    • Le 7 février 2012 à 14:37 En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

      tu t’es trahi toi meme car t’es bien un avocat et peut etre avocat l’ex ministre et aussi tu es du cdp et j’ajoute meme que t’es consul honoraire
      en tout cas tu veux essayer de nous faire avaler que le régime que tu soutiens a fait du bon boulot mais malheureusement ils ont échoué pcq tout comme la santé,l’agriculture,l’éducation n’a jamais été leur priorité.
      d’ailleurs ils n’ont jamais eu de vision puisque ces gourous naviguent a vue a la recherche d’autres priorités comme les cantines
      va,on se connait dans pays

      • Le 7 février 2012 à 16:49, par Sou En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

        Qu’on suspende la participation des ETALONS à la CAN pendant au moins dix ans et on mettra fin aux PAILLOTTES au Pays.

      • Le 7 février 2012 à 17:15, par Bila En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

        Je ne suis ni consul ni cdp. Je suis un "burkinbila" qui ne plane pas à votre hauteur. Je vole beaucoup plus haut que l´auteur de cet article en matière de vision quand à la construction du Burkina. Surtout en matière de l´éducation (puisque c´est de cela qu´il s´agit). Vous semblez savoir ce qui se cache sous "la paille" de l´auteur. Et si vous n´êtes pas convaincu, reliser attentivement ce que j´ai écrit et vous comprendrez que vous êtes aveuglé par ce qu´on appelle "la politique du jour".Vous faites des affirmations gratuites sans fondement quelconque. Et estimez vous heureux que j´ai daigné répondre à votre aboie. Ouvrez vos yeux et dépassez la vision en noir et blanc : cdp=mauvais, pas cdp=bon (ie. facon naive de voir). Mme Bonkoungou, je répète que je ne la connais pas, a vu loin. Vous par contre êtes peut être traumatisé par la galère et vous cherchez un coupable. Avez vous au moins un miroir ? Jetez-y un coup d´oeil et vous saurez qui vous rend aigri. C´est à cause des individus comme celui-là que vous verrez dans le miroir qu´il est difficile d´avancer et rassurez vous ils sont nombreux. Aussi bien dans l´opposition comme vous (je suppose)que dans le cdp. Et je ne les rate jamais. Recevez l´expression de ma très Haute Considération.

      • Le 7 février 2012 à 17:18, par Bila En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

        Je ne suis ni consul ni cdp. Je suis un "burkinbila" qui ne plane pas à votre hauteur. Je vole beaucoup plus haut que l´auteur de cet article en matière de vision quand à la construction du Burkina. Surtout en matière de l´éducation (puisque c´est de cela qu´il s´agit). Vous semblez savoir ce qui se cache sous "la paille" de l´auteur. Et si vous n´êtes pas convaincu, reliser attentivement ce que j´ai écrit et vous comprendrez que vous êtes aveuglé par ce qu´on appelle "la politique du jour".Vous faites des affirmations gratuites sans fondement quelconque. Et estimez vous heureux que j´ai daigné répondre à votre aboie. Ouvrez vos yeux et dépassez la vision en noir et blanc : cdp=mauvais, pas cdp=bon (ie. facon naive de voir). Mme Bonkoungou, je répète que je ne la connais pas, a vu loin. Vous par contre êtes peut être traumatisé par la galère et vous cherchez un coupable. Avez vous au moins un miroir ? Jetez-y un coup d´oeil et vous saurez qui vous rend aigri. C´est à cause des individus comme celui-là que vous verrez dans le miroir qu´il est difficile d´avancer et rassurez vous ils sont nombreux. Aussi bien dans l´opposition comme vous (je suppose)que dans le cdp. Et je ne les rate jamais. Recevez l´expression de ma très Haute Considération.

    • Le 7 février 2012 à 23:25, par le Naton En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

      Mr Bila votre position est peut-être compréhensible dans la mesure ou nous sommes un pays a ressources limites.Mais,je t’informe que dans le mois de décembre 2011 le premier ministre en tourne dans le ziro a été surpris de voir dans un village de la province des élèves assis a même le sol pour recevoir des cours.Dans sa réaction, il s’est dit être étonné de voir, en 2011 ,dans ce pays une telle situation,il a félicité le courage des enseignants et a promis une école construite dans les normes pour ce village.A l’heure ou je vous dresse ces lignes , l’école est presque achevé.Alors, Dorcas n’a t-il pas raison ? Mme BONKOUGOU et RAKISWILIGRI ont été nuisible pour l’éducation de base au BF.

      LE NATON

  • Le 7 février 2012 à 14:50, par kalambanga En réponse à : Entrave à l’éducation de base : La paille de l’école burkinabè

    Encore la chasse aux sorcières. expliquez-moi comment un pays ou il ya 6 enfants en moyenne par femme en âge de procréer, ou environ 20% des enfants ne sont connu des services publics qu’à l’âge de 6 ; 7 ou 8 ans car non déclarer on peut arriver à 100% de taux de scolarisation lorsqu’on est autour de 75%.
    expliquez-moi comment on peut refuser un enseignant à une centaines d’enfants dont les parents vous présentent une paillote alors que votre buget ne peut pas couvrir tous les besoins de construction du moment ?

    Enfin, au lieu de pourfendre le Ministre BONKOUGOU et les députés qui ont applaudit, dites-moi quand et comment et avec quels moyens vous et vos zélateurs allez résorber les paillotes.
    Trouvez-nous juste un ministre qui nous dira quand et comment avant de jeter l’oprobe sur les autres qui ont leurs acquis. Quel que soit l’auteur de la phrase il est plus proche de la réalité que vous. Proposez.

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