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ALTERNANCE AU BURKINA : "Non à la démocratie du silence !"

Publié le lundi 30 janvier 2012 à 00h45min

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L’éventuelle modification de l’article 37 de la Constitution a fait des gorges chaudes au Burkina, et cela, aussi bien dans le rang des caciques du pouvoir qu’au sein de l’opposition. L’auteur du point de vue suivant en retrace les grandes lignes non sans afficher son opposition vis-à-vis de cette modification de la loi fondamentale.

« Nous ne sommes ni les premiers, ni les derniers à réviser... ». C’était déjà en 2004 (in L’observateur Dimanche n° 418 du 21 au 27 mai 2004). C’était déjà au sujet de la révision d’une loi : le Code électoral. Plus d’une dizaine de révisions ..... « L’article 37 n’est pas un wack » (Le révolutionnaire n° 001 du lundi 08 février 2010). « L’article 37 n’est pas sacré ». (L’Observateur Paalga n° 7592 du vendredi 19 au dimanche 21 mars 2010) ; « L’article 37 est antidémocratique » ; « Pourquoi continue-t-on de faire des gorges chaudes sur l’article 37 ? » (L’Observateur Paalga n°7973 du mardi 27 septembre 2011).

Qu’est-ce qui a déclenché cette tempête ? Tout simplement leur projet de modification de l’article 37 de la Constitution pour en supprimer la clause limitative des mandats présidentiels fixés à deux mandats consécutifs de cinq années chacun et qui créait plus de problèmes qu’il n’en résolvait. Les évêques du Burkina Faso qui ont eu « l’outrecuidance » de s’opposer à la volonté divine, non présidentielle, en ont pris pour leur grade ; « Le faux pas des évêques du Burkina » (L’Observateur Paalga n° 7588 du lundi 15 mars 2010) ; « Sermon pour sermon : Blaise Compaoré plus que quiconque est à même d’avoir une vue d’ensemble sur l’évolution du pays. On est pour ou contre lui, mais on est tous unanimes (souligné par moi) sur le fait qu’il a jusque-là préservé la paix sociale. Pour ce faire, pourquoi lui ôter la possibilité de pouvoir continuer cette œuvre si telle est la volonté, celle du peuple et de Dieu ? Sainte mère de Dieu, éclairez - nous (souligné par moi)" (in L’Opinion n° 647 du 10 au 16 mars 2010).

La presse du régime enfonce le clou : « Article 37 de la Constitution : Le Collège des Sages n’a pas eu l’intention de verrouiller pour toujours la limitation » (Le Progrès n°025 du 15 au 25 mars 2010). Le numéro 026 souligne « La grande sagesse de Blaise » et tranche : « Il faut donner un peu plus de temps à Blaise Compaoré pour léguer aux générations futures un Burkina réconcilié avec son histoire. La grande sagesse commande de reconnaître que l’alternance démocratique au Burkina reste à être préparée ». Un quart de siècle, c’est-à-dire une génération entière, n’est-ce pas trop court pour un homme si providentiel, si génial, si indispensable ?

Poursuivant leurs hallucinations, les journalistes de la presse acquise en arrivent à se demander : « Y avait- il eu vraiment un consensus sur la révision de l’article 37 de la Constitution en 2000 ? » Et L’ Hebdomadaire du Burkina de poursuivre dans son numéro 567 du 12 au 18 mars 2010 : « En somme, la faiblesse structurelle actuelle de l’opposition burkinabè rend difficile une alternance par les urnes face au président Compaoré dont on ne présente plus les talents de politique redoutable (souligné par moi) ». C’est pourquoi ses adversaires, voire ses ennemis sont prompts à défendre l’illégalité de la courte échelle pour accéder au pouvoir. La thèse des « bons coups d’Etat », la théorie de la « rétroactivité de la loi » défendue en 2000 (et en 2010) par le Conseil constitutionnel (ajouté par moi), les comparaisons de la situation nationale avec celle du Niger, le verrou de la limitation des mandats présidentiels, tout cela fait partie d’un jeu politicien partisan qui peut difficilement créer le consensus, hier et aujourd’hui.

Allant plus loin dans la surenchère, un affidé affirme, toute honte bue, que « la limitation des mandats en Afrique, ça ne profite pas aux Africains » (L’Observateur Paalga n° 7586 du jeudi 11 mars 2010). Nelson Rolilhala Mandela, qui a volontairement renoncé au pouvoir, n’était, n’est pas un bon Africain. Ou alors Mandela n’a rien compris, au sens de l’Histoire parce qu’il a été un piètre politicien qui n’a rien fait pour son pays et donc rien fait pour l’Afrique et le monde ! Il faut s’interroger avec Ram Ouédraogo : « Pourquoi ne pas introniser Blaise Compaoré roi des rois ? » (in Le Pays n°4529 du mardi 12 janvier 2010). Plus sérieusement, il faut reconnaître que « les êvêques ont parlé et bien. Leur message, qui rejoint celui de certains partis, a fait tilt » (in San Finna n°595 du 13 au 19 décembre 2010).

Au-delà de la polémique stérile des thuriféraires du régime, le réalisme commande de reconnaître que dans cette affaire du « CDP et de l’article 37 », la seule question valable est : « Une révision garantira-t-elle la paix sociale ? » (cf. Le Pays n° 4674 du lundi 09 août 2010). La réponse à cette question centrale est, incontestablement, contenue dans « La Lettre de l’éditeur » publée dans Le Pays n°4524 du mardi 5 janvier 2010 et intitulée : « Bonjour 2010 ! Protège-nous de toute souillure de l’article 37 ». C’est cela un vrai journaliste ! Un visionnaire ! Un éducateur ! Un PATRIOTE habité par les seuls intérêts de son pays, l’intérêt collectif, le bien commun plutôt que les calculs liés au seul tube digestif.

Mes chers camarades de combat,

« L’avenir en solitaire et en toute tranquillité ! » (Bendré n°581 du lundi 8 février 2010) ; « L’aveuglement » (L’Evenement n°193 du 10 août 2010) ; « L’absolutisme en marche » (L’Indépendant n° 884 du 17 août 2010), le parti au pouvoir aurait pu, aurait dû en faire l’économie. Comment ? En lisant, attentivement, de manière responsable et quasi religieuse leur camarade chargé de l’orientation politique dont l’interview a été publiée par l’Observateur Paalga n°7419 du mercredi 8 juillet 2009. Deux mois et cinq jours après la tenue du Forum des citoyennes et des citoyens de l’alternance (FOCAAL). Ousséni Ilboudo, dans sa note introductive, a raison de se demander : « Manœuvre politique ou lecture lucide de la situation nationale pour quelqu’un qui a pris du recul en traversant son désert ? ». Les responsables (?) de sa chapelle politique n’ont vu dans les propositions du camarade visionnaire qu’un « cadeau empoissonné » (L’Indépendant n°827 du 14 juillet 2009) « un tsunami politique, un big-bang constitutionnel » (Journal du jeudi n° 930 du 16 au 22 juillet 2009) qui a pour seul objectif de les « couler » tous. A qui mieux mieux, les dithyrambes du parti et du président du Faso, croyant rendre service à ce dernier y vont de leur haine et déversent leur bile et leur venin sur un homme jadis très puissant (trop puissant) : « Salif Diallo est en perte de confiance avec le parti et le régime » (Sidwaya n°6469 du lundi 20 juillet 2009), « Salif Diallo, la tentation du phénix » ( in L’Hebdo Du Burkina n°533 du 10 au 16 juillet 2009), « Gorba perd son sang froid » (L’Opinion n°618 du 15 au 21 juillet 2009), soit deux éditos sur lui et « Les tribulations d’un "yesman trop zélé" » (in L’Opinion n°615 du 29 juillet au 4 août 2009).

Des articles au vitriol, écrits avec des plumes trempées dans l’encre des règlements de comptes, de la haine et du dénigrement y compris de leurs confrères du Journal du Jeudi et de l’Evènement... On promet au condamné, avant même de l’entendre, une descente aux enfers. Curieusement, c’est la presse non CDP qui met en exergue le fait que « le coup de poker de Salif sur l’alternance au Faso » (L’Evènement n°167 du 10 juillet 2009) n’a pas pour objet de « mettre du sable dans le couscous de ses camarades » (Le Reporter n° 26 du 15 au 31 juillet 2009). San Finna, dans ses numéros 528 du 17 au 23 août 2009 et 557 du 8 au 15 mars 2010 souligne, fort justement : « il ne sera pas reproché à Salif Diallo de n’avoir pas sonné le tocsin » et considère la "sortie des évêques" sur l’article 37, la « création de l’UPC » et la « levée de suspension de Salif Diallo » comme les « trois évènements qui vont marquer le futur immédiat ». Pour sa part, L’Indépendant fait preuve de clairvoyance politique très fine en titrant ; « interview de Salif Diallo, un courage politique et une preuve de fidélité » (numéro 828 du mardi 21 juillet 2009). Dans son aveuglement, son parti le suspend et le rétrograde au rang de militant de base.

Son ministre de tutelle claironne : « Salif s’est expliqué, reste à statuer sur son cas », (L’Observateur Paalga n° 7432 du lundi 27 juillet 2009). En réalité, ce sera « le calme plat, après l’ouragan Salif » (Journal du Jeudi n°932 du 30 juillet au 5 août 2009). Et ce d’autant plus que malgré le « séisme », le même JJ s’interroge : « Et Blaise Compaoré dans tout ça ? ». Preuves que Salif Diallo est un homme politique populaire, la levée de sa suspension le samedi 27 février 2010 (il a été suspendu le 17 juillet 2009) est non seulement annoncée et saluée par toute la presse mais elle est fêtée dans la liesse populaire, notamment au Yatenga (in Le Nord n°03, mars 2010 et Le Pays n°4568 du mardi 9 mars 2010). A l’Evenement qui se demande « Pourquoi Salif revient » (numéro 183 du 10 mars 2010), L’Opinion, encore lui ! ironise : « Au secours, Salif arrive ! » (numéro 647 du 10 au 16 mars 2010).

La presse proche du parti du crucifié de Pâques 2008 lui voue une telle haine qu’elle en veut à ses confrères d’en faire trop pour lui. Sacré CDP. Par contre dans ses numéros 829 du mardi 28 juillet 2009, 831 du mardi 11 août 2009 et 836 du mardi 15 septembre 2009, L’Indépendant révèle « la face cachée de Roch », le président du parti au pouvoir, et analyse, froidement, les « bruit et fureur autour des propos de Salif Diallo », se demande si « Roch a le numéro de portable de Blaise » et conclut qu’à propos de la « sanction contre Salif Diallo, Roch a acheté une bagarre qui n’est pas la sienne ». Si au terme du 3e Congrès extraordinaire du parti, ce fut « Exit l’idée d’une Ve République » (Bendré n°607 du 9 août 2010), l’on peut, légitimement se demander, après les crises scolaires et militaires de 2011 et de l’échec des triples assises nationales, régionales et à nouveau nationales du fameux CCRP, si l’on ne se prend pas parfois, dans les cercles du pouvoir, à regretter d’avoir rejeté les propositions "salvatrices" de Salif Diallo. Même si pour lui « les situations nigérienne et burkinabè ne sont pas comparables », force est de reconnaître que le « coup d’Etat contre Tandja (est un) avis de tempête sur les tripatouilleurs » (L’Observateur Paalga n°7574 du lundi 22 février 2010).

Oui, « Le cas nigérien, ça nous intéresse ! » (L’Indépendant n°859 du mardi 23 février 2010) et les « Conséquences des manipulations constitutionnelles au Niger » ne doivent pas être interdites de comparaison avec le Burkina Faso (San Finna N°556 du 1er au 7 mars 2010) car « contre la tripatouillite aiguë, le vaccin est découvert » (L’Observateur Paalga n°7579 du lundi 1er mars 2010). Déjà en 2008, un observateur avisé affirmait : « les révisions constitutionnelles sont à inscrire dans un contexte global de régression de la démocratie en Afrique ... Toucher aux Constitutions est un crime de haute trahison » (in Le Pays N°4245 du vendredi 14 au dimanche 16 novembre 2008). La capacité prospective est la marque distinctive des hommes politiques avertis. Sur le parti au pouvoir, René Emile Kaboré a été catégorique : « Ils n’ont pas le monopole du présent et encore moins du futur. L’avenir nous départagera » (in San Finna n° 554 du 15 au 22 février 2010).

Cette prédiction a-t-elle commencé à se réaliser ? « Roch, Mahama, Simon, Abel et compagnie : ressaisissez-vous. Nul n’est éternel ! » a écrit Bendré dans son numéro 587 du lundi 22 mars 2010. Le conseil gratuit a-t-il été entendu ? Après Simon qui a annoncé (depuis février 2011 ?) qu’il ne briguera plus de mandat municipal et qui a confirmé cette annonce (San Finna N°623 du 1er au 31 janvier 2012), Roch vient de jeter les armes en annonçant : « Il est temps que le parti donne l’exemple » (Le Pays n°5030 du lundi 16 janvier 2012). Plus précisément : « ... Cela fait quelques années que je suis à la gestion du parti, donc je pense qu’il est temps que nous donnions l’exemple au niveau du CDP que nous sommes dans l’alternance... ». « Le CDP et l’alternance : un simple effet de mode ? » S’est légitimement interrogé Le Pays susmentionné. Ou alors « Roch se barre (-t-il) avant qu’on ne le barre ! », in L’Observateur Paalga n°8047 du mardi 17 janvier 2012. Le Président de son groupe parlementaire pourra toujours continuer ses recherches pour trouver la réponse à sa question :« L’alternance fonde-t-elle seule la démocratie ? » (Sidwaya n°6417 du mercredi 6 mai 2009).

Mes chers Camarades et Frères,

Très modestement, j’ai essayé de contribuer à la réflexion depuis novembre 2010. Dans une interview accordée à l’Evenement, j’ai exprimé le sentiment très net que « la pirogue est arrivée au sable » et que « le Burkina est à la fin d’un cycle », tant pour l’opposition que pour la majorité (Evénement, Hebdo n°001 du 5/11/10). De janvier à décembre 2011, j’ai soumis à la critique une demi-dizaine de contributions écrites, publiées par la presse. Oh ! bien des personnes incapables de lire l’Histoire, m’ont peut-être pris pour un prétentieux. Des" camarades" m’ont même interpellé de manière peu amène. Des propos amènes ont été échangés avec les « intellectuels » dévoyés et les patriotes broyés par la machine à corrompre, à niveler, à laminer du parti au pouvoir. Non, non et non à la démocratie du silence. « La liberté est l’idéal pour lequel de tout temps et à travers les siècles, les Hommes ont su lutter et mourir » (Patrice Emery Lumumba, défunt Premier ministre du Congo). Alors, vous qui avez mené le bon combat, dormez du sommeil du juste.

Louis Armand Mibyèmba OUALI

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 30 janvier 2012 à 13:06 En réponse à : ALTERNANCE AU BURKINA : "Non à la démocratie du silence !"

    Article très intéressant ! c’est très bien de rappeler les propos des ceux qui sont pour la révision de l’article 37.
    Chacun devra assumer ses actes devant l’histoire. C’est ainsi que l’on retiendra que Roch Marc KABORE a dit que c’est anti démocratique de limiter le mandat présidentiel.

  • Le 30 janvier 2012 à 14:13 En réponse à : ALTERNANCE AU BURKINA : "Non à la démocratie du silence !"

    Esprit gourmatché ou lobi ??? On sent ue tu es abonné à tous les journaux du Burkina !!!!!

  • Le 30 janvier 2012 à 17:00, par Achille En réponse à : ALTERNANCE AU BURKINA : "Non à la démocratie du silence !"

    Même au sein du CDP il y a des gens qui attendent que Blaise Compaoré cède la place pour qu’ils tentent leur chance. Si Blaise ne veut pas quitter, ils passeront par d’autres voies pour atteindre leur objectifs.
    Alors ceux qui veulent la paix, faisons en sorte que l’alternance par les urnes soient une réalité. Sinon le pire est à craindre.

  • Le 31 janvier 2012 à 01:08, par Mechtilde Guirma En réponse à : ALTERNANCE AU BURKINA : "Non à la démocratie du silence !"

    Absolument et très juste, Monsieur le Député et très cher ami

  • Le 31 janvier 2012 à 10:03, par Luluan " Le monde a change" En réponse à : ALTERNANCE AU BURKINA : "Non à la démocratie du silence !"

    Merci Walli. Il ne faut pas se taire. Ce pays nous appartient tous, CDP ou pas, Politique ou pas politique. Les thuriferaires du pouvoir parlent aujourdh`hui d`alternance.Euripide avait raison de dire, "le temps revele tout et n`attend pas d`etre interroge Il est bavard".

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