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BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

Publié le mardi 17 janvier 2012 à 01h50min

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L’année 2012 commence avec des scènes de violence dans la commune de Boussouma dans la province du Sanmatenga (région du Centre-Nord). La journée du 12 janvier dernier y a particulièrement été chaude puisqu’elle a été marquée par des affrontements entre des manifestants et des agents des forces de l’ordre et de sécurité qui, fort heureusement, n’ont pas occasionné de pertes en vies humaines comme c’est souvent le cas mais des dégâts matériels. Au nombre de ceux-ci, l’incendie du domicile du maire, Issiaka Isidore Ouédraogo, dont la gestion des lotissements est remise en cause par les jeunes qui formaient le gros bataillon des croquants du 12 janvier.

C’est donc par un incendie qu’il paie sa ténacité à tenir la session budgétaire du conseil municipal contre l’avis de ses administrés qui demandent avant tout un audit sur des lotissements. Les forces de l’ordre et de sécurité, déployées la veille pour sécuriser cette session convoquée pour la troisième fois, ne lui auront pas été d’un grand secours. Leur présence n’a pas dissuadé ses contempteurs qui ont affronté à coups de pierres le bras armé de la loi qui a fini par battre en retraite pour, sans doute, ne pas avoir à causer des drames qui ne manqueront pas d’en rajouter à une situation nationale délétère. Les images du domicile du maire en flammes, des pans de mur terrassés ou noircis par la fumée, des voitures calcinées, des pneus brûlés sur le goudron, etc. rappellent douloureusement les redoutables images déjà vues un peu partout à travers le pays, l’année dernière, à la suite de la mort de l’élève de Justin Zongo à Koudougou dans la région du Centre-Ouest.

Depuis lors, on a l’impression que les Burkinabè ont du mal à manifester sans casser ou brûler. Dans le cadre de Boussouma, on nous rétorquera peut-être que c’est la première fois qu’il y a des dérapages depuis le début du bras de fer entre le maire et les jeunes en mai 2011. Le message subliminal de cette répartie est que s’il n’y avait pas eu les forces de l’ordre, il n’y aurait pas eu d’affrontements, encore moins de débordement malheureux. Soit ! Mais il ne faut pas aussi oublier que durant la période de braise écoulée, l’on a vu des manifestants brûler et casser alors qu’il n’y avait aucun agent des forces de l’ordre en face. Ceci pour dire que l’argument de la provocation par le bras armé de la loi pour justifier les dérapages ne résiste pas à l’analyse.

Le constat qui est là est que la moindre manifestation donne lieu à des casses et/ou des incendies. Le réflexe et la pulsion incendiaires sont plus forts que tout. Pourtant, le Burkinabè était réputé pacifiste, très peu porté sur le saccage pour manifester son mécontentement ou poser ses revendications. Subitement, il est devenu violent dans l’expression de ses humeurs surtout depuis les événements dramatiques de Sapouy avec l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et de ses compagnons suivi du boucanage de leurs corps. D’aucuns situent le point de départ de cette pulsion incendiaire à partir de ce crime odieux du 13 décembre 1998 dont les circonstances demeurent encore obscures. Depuis lors, brûler et casser seraient devenus des moyens d’expression de colère et de revendication. Il y a lieu d’exorciser cette folie incendiaire pour laquelle tout le monde paie finalement. Par exemple, les biens publics saccagés ou brûlés sont réparés avec l’argent du contribuable, donc de tout le monde.

Un des moyens pour arrêter ce cycle infernal pourrait être le dialogue et la transparence dans la gestion des affaires publiques. Bon nombre de manifestations occasionnant des situations regrettables surviennent du fait de l’absence de dialogue entre les parties, de la mauvaise gouvernance des autorités surtout locales. Pour revenir à Boussouma, on peut dire que si la transparence avait prévalu, si l’obligation de rendre compte était un souci constant, on n’en arriverait sans doute pas à ce bras de fer qui prend en otage le développement de la commune. L’exemple est donné dans des communes de la région du Nord avec un concept comme l’EDIC (Espace de dialogue et d’interpellation communautaire) qui amène les conseils municipaux à rendre compte publiquement de leur gestion aux populations et aussi à répondre à leurs interrogations et préoccupations. C’est une expérience menée par l’Association monde rural (AMR) basée à Gourcy dans le Zondoma, qui gagnerait à être étendue sur tout le pays pour que la transparence, la gouvernance entrent pour de bon dans les habitudes.

Séni DABO

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 17 janvier 2012 à 02:29 En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

    Je suis sûre que ça va encore péter dans ce pays comme l’an passé parcequ’il y a trop d’injustices dans ce pays puisqu’il n’y a pas de justice qui est corrompue et qui est gérée directement par le président du Faso

  • Le 17 janvier 2012 à 08:27 En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

    Vous avez raison mais face à un état dont la mal gouvernance est sa ligne politique principale, la folie incendiaire n’est que la dernière méthode de lutte que le peuple a pour se faire un peu entendre de nos politiciens véreux. L’état, si elle avait contrôlé depuis l’an passé la gestion de la mairie sur les parcelles, on en serait pas là aujourd’hui.

  • Le 17 janvier 2012 à 09:29, par Bokré En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

    Très bel article en ce qui concerne le constat !« le Burkinabè était réputé pacifiste, très peu porté sur le saccage pour manifester son mécontentement ou poser ses revendications » Mais pour l’analyse il faut aller plus loin. c’est déplorable toutes ces formes de manifestations mais vous êtes sans savoir que l’autorité burkinabe ne réagit plus devant une manifestation pacifique.si on ne traite pas les manifestants de personnes qui n’ont rien à faire on dira qu’ils sont montés par des politiciens qui veulent semer les troubles.on n’a plus les dirigeants de 1966 ou des années 70 qui savaient écouter le peuple. Quand les étudiant manifestent pacifiquement les autorités mises en cause ont le culot de poser des question du genre "comment se passe votre grève ?" on ne nargue pas une personne pour ses idées ou ses aspirations ; c’est de l’humiliation !

    • Le 17 janvier 2012 à 12:51, par le Pacifique En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

      Bien vu bokré, il faut ajouter que le processus de dialogue se termine très souvent par des corruptions et même des intimidations de toutes sortes. Voilà, le cas du terrain à Zogona dont nous assistons déjà à des tentatives de corruption dans l’anonymat ainsi que des intimidations. Dites moi est-ce une mise en garde ou une malédiction si on vous profère le dicton Mossi qui dit « si tu refuse le pardon ‘’corruption’’ ; tu accepteras quand on va te souhaiter meilleur santé ». De grâce, ces jeunes ne font que des sit-in pacifiques tout en suivant les procédures administratives comme il se doit. Les incendies ne font pas la solution non plus.

  • Le 17 janvier 2012 à 15:45, par Marcus En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

    la violence tire sa source dans l’aigreur quotiedienne des populations. Chacun veut se rendre justice...

  • Le 18 janvier 2012 à 15:29 En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

    tres tres difficile pour exorciser la folie incendiaire au faso.Le peuple Bbè est traumatisé et il veut le changement.Emi

  • Le 18 janvier 2012 à 18:27 En réponse à : BURKINA : Il faut exorciser la folie incendiaire

    OH !!!!!c est les signes d une revolution.suis pessimiste.tard tard pour le pouvoir.le peuple a soif du changement.a suivre.Noaga

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