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Autant le dire… : Eleveurs - agriculteurs : la bombe à retardement

Publié le vendredi 6 janvier 2012 à 01h02min

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Il est mieux de s’attaquer pendant qu’il est encore temps à ce qui sera inéluctablement, tôt ou tard, une crise à résoudre. Il s’agit de la cohabitation entre agriculteurs et éleveurs dans les campagnes. Actuellement, dans les villages, le problème est bien réel. Et ses manifestations sont multiples. Dans un village du Burkina où j’ai séjourné juste avant les fêtes, j’ai assisté à des palabres entre éleveurs et agriculteurs qui, heureusement ont trouvé leurs solutions au village.

Un producteur qui n’a pas encore fini de récolter son champ reçoit régulièrement la visite des bœufs d’un éleveur. Selon ses dires, il a pris le temps de prévenir le pasteur. Au moins plus de trois fois. Malgré tout, il continue de conduire ses bœufs dans son champ. Las de se faire comprendre, le producteur aurait menacé le pasteur à l’aide d’une arme à feu. Mais rien n’y fit. Il continue de venir paître ses animaux dans son champ.

Une matinée, l’éleveur découvre l’un de ses bœufs mort au bord du champ du producteur. Apparemment, le bœuf portait des impacts de balles. Les deux se déportent chez le conseiller municipal du village. Pendant deux jours, ils n’arrivent pas à trouver une solution. Le producteur ne reconnaît pas avoir tué un bœuf. Alors que l’éleveur veut qu’il reconnaisse son forfait. Ils vont se traîner pendant longtemps. Avec l’intervention des uns et des autres, les deux parties acceptent de laisser tomber. Mais des discussions, on retient que le producteur n’avait pas le droit de tuer un animal.

Autrement, s’il estime que des bœufs ont fait des dégâts dans son champ, il devait prévenir l’autorité compétente pour qu’un constat soit dressé afin que l’éleveur, s’il est coupable, le dédommage. Mais cette procédure peut prendre beaucoup de temps. Et très souvent, elle n’aboutit même pas. Ce qui pourrait souvent expliquer « l’auto-justice » des producteurs.

A leur décharge, les éleveurs en cette période, ont également besoin de fourrage pour leurs animaux. Alors que de fourrage, il y en a que dans les champs des producteurs. Qui eux aussi, sont par moments éleveurs. Par conséquent, réservent leurs champs pour leur bétail. Tout ceci parce que les feux de brousse ont brûlé toutes les herbes sèches dont les animaux pouvaient se nourrir en attendant la prochaine saison. De ce côté, se pose un autre problème dont nous avons toujours parlé dans ces colonnes. Il s’agit des feux de brousse et de la coupe abusive du bois. Chaque année, à travers plusieurs opérations nous plantons des arbres.

Les députés en plantent. Les membres du gouvernement en font de même ; que dire des associations de ceci ou de cela ? Tout le monde en plante. Ce sont ainsi des millions d’arbres qui sont plantés chaque année. Et qui malheureusement sont enflammés par les feux de brousse juste quelques mois après. Si les arbres que nous plantons et que nous nous invitons à protéger n’échappent pas à notre action, que dire des arbres et herbes qui poussent d’eux-mêmes dans la nature ?

C’est faute de fourrage dans la nature que les pasteurs se retrouvent dans les champs des producteurs avec toutes les conséquences que cela comporte. Aussi, il semble important, voire urgent de trouver une solution à cette situation qui, si elle demeure, pourrait compromettre un jour la paix sociale. Que nous nous plaisons à vanter.
Ce sont d’énormes millions de francs CFA que nous dépensons chaque année pour participer à des conférences nationales ou internationales sur l’environnement et les changements climatiques. Ce sont autant de francs que nous dépensons pour planter des arbres.

Mais, en retour nous ne faisons rien pour changer notre comportement. Et toute honte bue, nous accusons les autres d’être les pollueurs de notre environnement. Donc source de nos problèmes. S’il doit y avoir des changements de comportements, c’est à tous les niveaux. Et nous y gagnons tous. Ça coûte quoi de réveiller les trois luttes ? La lutte contre les feux de brousse, la divagation des animaux et la coupe abusive du bois. Les éleveurs en profiteront, les producteurs également, de même que notre environnement et la paix sociale.

Dabaoué Audrianne KANI

L’Express du Faso

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