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DEFICIT CEREALIER : "La bonne aide est celle qui met fin à l’aide"

Publié le vendredi 9 décembre 2011 à 02h02min

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A travers ces lignes, l’UDD reconnaît que le déficit céréalier annoncé va contraindre l’Etat à recourir à l’aide internationale. Mais Toubé Clément Dakio enjoint les autorités de développer des politiques agricoles qui puissent sortir le pays de son statut d’éternel demandeur d’aide internationale.

Le déficit céréalier récemment annoncé par les autorités ainsi que les disettes alimentaires pudiquement appelées soudures qui sévissent généralement chaque année de juin à septembre ne sont pas seulement le fait de mauvaises pluviométries, mais sont surtout la conséquence d’une politique agricole nationale inadéquate. On sait que les situations agricole et alimentaire se sont détériorées au Burkina. La production et la consommation alimentaires par habitant sont tombées en deçà des besoins nutritionnels.

Au Faso, un déficit céréalier est synonyme de pénurie alimentaire car ce sont les céréales qui constituent la base de la nourriture de la population. Et si la pénurie alimentaire est importante, elle nécessitera, pour être comblée, le recours à l’aide alimentaire sous forme de dons qui provient généralement des pays industrialisés ayant des excédents agricoles.

La pénurie alimentaire présente les conséquences suivantes pour le Burkina :
- la faim freine la production de produits vivriers ;
- elle freine la productivité du paysan ;
- pour les experts, la faim chronique prépare à long terme, une population à capacités intellectuelles fortement diminuées ;
- la population est en état de sous-alimentation ;
- le bétail est famélique ;
- on dit qu’en 1973, des épisodes atroces se sont succédé au Sahel burkinabè : des gens s’écroulent morts en faisant la queue aux distributions de mil (insolation, inanition), d’autres mouront d’avoir absorbé des semences américaines traitées à l’insecticide, beaucoup survivent en mangeant du son américain vendu pour les animaux.

Les distributions des secours au Sahel ont donné lieu à une telle corruption qu’en 1973, les militaires français de Côte d’Ivoire ont été appelés à remplacer les distributeurs civils et militaires voltaïques corrompus. Les graves conséquences ci-dessus énumérées font de la pénurie alimentaire un véritable fléau. Mais l’aide alimentaire sous forme de dons n’est pas, elle aussi, sans reproche car elle présente les effets pervers suivants par rapport au Burkina, pays bénéficiaire :
- l’aide alimentaire sous forme de dons va entraîner une baisse des prix des produits agricoles locaux décourageant la production des paysans et renforçant la dépendance alimentaire ;
- en accroissant la dépendance du pays, elle retarde son développement économique ;
- elle crée à terme de nouveaux besoins. Par exemple, au Faso, certaines couches de la population ont tendance à remplacer la bouillie de mil du matin par le café au lait avec pain ou croissants :
- l’aide peut être un moyen de pression politique ;
- elle peut développer la mentalité d’assistés chez les bénéficiaires. La pénurie alimentaire et l’aide alimentaire sous forme de dons ont tous deux de graves inconvénients. L’aide alimentaire sous forme de dons apparaît donc comme un mal nécessaire.

C’est pourquoi l’Etat doit prendre la pleine mesure du déficit céréalier, mesurer le danger de la famine et ses conséquences à long terme sur la qualité même de la population et s’il est en face d’une pénurie importante, demander l’aide alimentaire internationale. Il faut dire que l’aide alimentaire présente un avantage pour le pays bénéficiaire car il évite par là des tensions politiques et sociales qui pourraient naître de la pénurie. Par ailleurs, l’Etat n’est pas obligé de débourser des devises pour l’achat de denrées alimentaires. Mais au-delà de la nécessité d’une aide alimentaire et de son urgence pour le Faso, l’UDD demande que l’Etat adopte une politique agricole nationale adéquate de nature à mettre désormais les Fasodé à l’abri de la famine.

En effet, la politique agricole nationale en vigueur, héritée de la colonisation, n’est pas du tout favorable aux cultures vivrières et cela explique, pour l’UDD, le déficit céréalier actuel. Il est incompréhensible que de nos jours où l’on dispose de techniques efficaces de mobilisation des forces productives qu’une sécheresse survenue dans la dernière période de l’hivernage suffise à faire naître le spectre de la faim au Burkina. Pourtant, les responsables du pouvoir CDP disposent de techniques de mobilisation efficaces pour faire voter par les paysans leur candidat à plus de 90% des suffrages exprimés. A cet égard, on parle même de la machine électorale du CDP.

Mais, s’agissant de la production vivrière, on ne comprend pas que les mêmes responsables ne puissent pas mobiliser les paysans ! Faut-il penser que les dirigeants du parti dominant recherchent seulement les avantages du pouvoir, mais refusent d’assumer leurs obligations, dont l’une est de garantir aux Fasodé une sécurité alimentaire dans la dignité, c’est-à-dire sans recourir à l’aide alimentaire sous forme de dons ? Ne faut-il pas douter de la volonté des responsables du CDP de faire émerger économiquement le Faso ?

En effet, comment peut-on sérieusement croire qu’un Burkina dépendant des importations alimentaires, pire de l’aide alimentaire internationale et dont les forces productives sont donc sous-alimentées puisse devenir, à moyen terme, "un Burkina émergent" à moins que ce ne soit par une incantation du chef suprême du CDP, Blaise Compaoré ? L’UDD pense que si, en face d’une pénurie dramatique comme au Sahel en 1972 et 1973, des raisons humanitaires imposent une aide alimentaire internationale à court terme sous forme de dons, ‘’la seule véritable aide consiste à mettre en place les conditions d’une meilleure productivité agricole".

A cet égard, on peut évoquer un proverbe chinois bien connu qui dit ceci : "Donne un poisson à un homme, il mangera un jour ; apprend-lui à pêcher, il mangera toute sa vie". En d’autres termes, la bonne aide est celle qui met fin à l’aide. Ceci, à la réflexion des pays industrialisés qui interviennent dans le développement des pays du tiers monde et aussi à celle de l’Etat burkinabè sur l’aide possible et souhaitable à l’agriculture en pays sous-développés.

Toubé Clément DAKIO Président de l’UDD

Le Pays

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