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Editorial de Sidwaya : Jeunesse, démocratie et développement …

Publié le lundi 5 décembre 2011 à 00h49min

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Le Forum national des jeunes, édition 2011, vient d’éteindre ses lampions. Dori, la ville des dunes et des merveilles s’est dépensée avec générosité pour mettre à la disposition de ses hôtes, le nécessaire, l’utile et l’agréable. Elle a mis les petits plats dans les grands pour que le lait coule jusqu’aux pieds des milliers de visiteurs qui foule son sol légendaire. Que de labeur et de dévouement ! Cela vaut bien la chandelle, car l’enjeu est immense.

Il y aurait 73.7 pour cent de jeunes de moins de 40 ans en Afrique et au Burkina. Serait-ce une estimation à la fois approximative et alarmiste ? Il n’empêche ! Ce chiffre suffit à lui seul à nous indiquer que nous avons franchi la ligne marquée : « danger. » Car, parmi les 73.7 pour cent de notre population active, peu ont une profession stable. Les 26.3 pour cent qui restent se composent de travailleurs bien portants ou pas, et aussi de vieillards, de vieux, de malades, d’émigrés qui n’ont plus que leur nom et prénom au Burkina. Autant dire que certains Burkinabè s’agitent plus qu’ils n’agissent.

On comprend que le maître mot des jeunes burkinabè soit aujourd’hui, le mot « emploi. » Mais, que peuvent l’oreille attentive du Président et le forum de 2011 devant une question aussi cruciale ? En d’autres termes : que peut l’Etat burkinabé aujourd’hui pour tous les jeunes du pays, quelle que soit la personne qui se trouverait locataire de Kosyam ?

En vérité, l’Etat peut beaucoup. L’attribut fondamental le l’Etat, n’est-ce pas celui de « pouvoir » ? Et aujourd’hui, malgré les soupçons de bonne et de mauvaise foi toutes ensemble, on peut dire que l’Etat burkinabé fait ce qu’il doit avec ce qu’il a ! Il existe donc dans les dimensions des pouvoirs qui sont les siens. En faveur des jeunes, par exemple, des fonds ont été créés et mis en œuvre pour leur emploi : le FAPE, le FASI, le FAIJ, le FAFPA, etc., fonds disponibilisés dont chacun peut juger de l’utilité et des limites. L’Etat, le premier, s’est rendu compte que l’effort devait être porté encore plus loin. C’est pourquoi, un programme spécial de création d’emplois de 10 milliards de Francs CFA vient d’être lancé. Cette dotation étant approuvée par l’Assemblée nationale pour 2012, le programme est sur de bons rails. Tous les jeunes Burkinabè seront-ils, pour autant, vraiment émergents grâce aux programmes initiés en leur faveur ? Nous venons de le constater : oui !

Ce qu’il faut cependant craindre, c’est notre propre esprit. « Tout est dans l’esprit de l’homme. » Cette petite phrase qui nous vient de l’UNESCO vaut son pesant d’or. Une partie, et pas des moindres, des nouvelles générations de notre pays tardent à décrocher, sur le plan des initiatives, d’avec les anciennes. Et tous refusent de rompre d’avec l’esprit traditionnel qui attend que la famille, le « koro »,… fasse quelque chose « pour moi. » L’Etat, vu par un tel esprit, ne peut être qu’un Etat providence. Ne faisons-nous pas, tous, fausse route ? Quel Etat, peut-il aujourd’hui se présenter comme la providence de son peuple. L’Etat providence s’en est allé, nous avons affaire à des Etats initiative.

Quand on passe dans les quartiers, certains soirs à Ouagadougou, Bobo, Koudougou,… on ne peut pas ne pas sentir quelque chose au cœur. Quelque chose qui inquiète, qui effraie, qui bouleverse. Il y a des milliers de jeunes qui passent la nuit du samedi à dimanche autour d’un thé hypothétique, parlant fort et doutant autant de leur avenir. Pendant ces veillées parfois acerbes, on cuisine les responsables, on les « surdose » ! On se monte dangereusement la tête. On ignore que nombre d’entre ces malheureux responsables ciblés, frappés ou « rapés », n’attendent que la fin de leur mandat pour pouvoir respirer tranquillement l’air du bon Dieu. Jamais plus, ils n’iront se mettre dans un panier de crabes : avec beaucoup de pinces et de hargne !

Trois renoncements s’imposent à nous pour que nous puissions avancer ensemble : que l’Etat renonce définitivement, même en se cachant derrière des fonds, à être la providence des citoyens. Que le citoyen renonce à prendre le « gouvernement » pour sa famille traditionnelle africaine avec un papa au centre… Que les jeunes passent définitivement de la philosophie du « je suis parce que nous sommes » à celle de « nous sommes parce que je suis. ».

Ibrahiman SAKANDE (sakandeibrahiman@yahoo.fr)

Sidwaya

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