Rien que pour son accueil ce jeudi à l’aéroport international de Ouagadougou, le programme de la rencontre au Sommet a subi un important chamboulement. Ainsi, la réunion conjointe des ministres Ivoiriens et Burkinabè n’a pu démarrer qu’après 18 h, alors qu’elle était prévue pour 15 h. Ce n’est pas évident que le Premier ministre et ministre de la Défense, Guillaume K. Soro, qui arrive en principe ce matin même, puisse mobiliser autant de monde.

Ce n’est un secret pour personne, le leader du Rassemblement des Républicains (RDR) est très populaire au Burkina Faso, où il compte de nombreux partisans, Ivoiriens comme Burkinabè. Cette popularité d’ADO au pays des Hommes intègres a été démontrée de la plus belle manière, pour ceux qui en doutaient encore, lors de sa dernière visite officielle le 16 mai dernier. Pour évoquer cette forte sympathie vouée au Chef de l’Etat de Côte d’Ivoire par des habitants du Burkina, certains ont parlé d’ « Adôlatrie ». Et le présent rendez-vous de Ouagadougou est certainement une autre grande occasion pour le Président Ouattara de communier avec ses innombrables fans.

Mieux, même quand ils se retrouveront à quatre, c’est-à-dire avec le Président Blaise Compaoré et les Premiers ministre Soro et Tiao, ADO devrait pourvoir faire grosse impression. Cela, pas parce que la Lagune Ebrié qu’il dirige depuis quelques mois, pèse plus que le Faso, à bien des égards. Mais, parce qu’en tant que Grand économiste devant l’Eternel, rompu aux arcanes de l’économie, l’ex-directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI) est visiblement le mieux placé pour faire passer ses idées. Surtout compte tenu du contexte international où l’économie ne cesse de dominer le politique. Le désormais ex-Premier Italien, Silvio Berlusconi, ne dira pas le contraire, lui qui vient de perdre son fauteuil de Chef du gouvernement du fait des aléas économiques.

C’est vrai que comparaison n’est pas raison, l’Afrique n’étant pas l’Europe. Mais, disposer de compétences en économie constituent certainement des atouts pour les dirigeants à l’heure actuelle. Et fort des prévisions du FMI et de ses yeux d’expert international, ADO l’a récemment affirmé : « La Côte D’Ivoire va rebondir sur le plan économique ». Et pour que la majorité de ses compatriotes participent à cette œuvre de reconstruction économique, il a parcouru des pays de la sous région pour exhorter les membres de la diaspora ivoirienne à rentrer au bercail. Mais, au regard des soutiens dont il a bénéficié et continue de bénéficier au-delà de sa patrie, le Président Ouattara a l’obligation de faire en sorte que toute la sous région rebondisse économiquement.

Cela passe évidemment par la mise en œuvre concrète d’un certain nombre de projets intégrateurs viables dont il est question au cours de cette deuxième rencontre au Sommet Côte d’Ivoire – Burkina Faso : le renforcement et la fluidité des échanges, la bonne coopération dans les secteurs porteurs (enseignement, transports, commerce, Infrastructures, agriculture, diplomatie, culture, etc.). Le Président Laurent Koudou Gbagbo avait eu en son temps la présence d’esprit de l’exprimer en des termes sans équivoques, à savoir que l’axe Ouagadougou –Yamoussoukro doit devenir le pivot de l’intégration sous régionale, à l’image du pacte Paris – Berlin au sein de l’Union européenne.

Aujourd’hui, le moment est venu pour Alassane Dramane Ouattara de peser de tout son poids pour que les propos de son prédécesseur ne restent pas lettres mortes. Le faire, pour ADO sera non seulement inscrire en tant qu’homme d’Etat son action dans la continuité des engagements de son pays. Les hommes passent, les institutions demeurent. Mais, ce sera surtout l’occasion pour lui de renvoyer l’ascenseur à ces milliers, voire millions d’âmes qui le portent jalousement dans leurs cœurs de part et d’autre de la frontière. Bref, le temps est, peut-être, venu pour le patron du RDR d’être le digne « Fils » d’Houphouët Boigny.

Grégoire B. BAZIE

Lefaso.net