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BURKINA FASO : Instaurer une sécurité alimentaire durable

Publié le jeudi 10 novembre 2011 à 02h16min

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Du bilan prévisionnel de la campagne agricole en cours présenté par les ministres de tutelle, le moins que l’on puisse dire, c’est que la moisson ne sera pas abondante cette année. Et pire, comparativement à l’année précédente, la baisse de la production a atteint un seuil critique de 16%. Quand on sait que nombre de Burkinabè n’ont pas mangé à leur faim l’an passé, il y a de quoi avoir une inquiétude supplémentaire concernant les jours à venir. Car, faute de pouvoir être renforcé par une récolte conséquente, le contenu des greniers ne va pas tarder à se vider. Une situation dont le marché n’hésitera pas à se saisir pour dicter sa loi.

Le spectre de la crise alimentaire commence donc à planer sur le Faso, et il va de soi que les autorités prémunissent les populations contre toute situation dramatique. L’aveu du déficit céréalier fait par le gouvernement du Premier ministre Luc Adolphe Tiao constitue en soi une bonne avancée dans la recherche de la transparence, en même temps qu’il traduit une certaine prise de conscience de la situation. Le chef du gouvernement avait d’ailleurs déjà donné le ton lors de son discours sur la situation de la nation, en déclarant la saison alarmante dans certaines régions. Mais une chose est de reconnaître l’imminence ou l’existence d’un phénomène, une autre est d’accepter qu’il y a urgence à agir, et une troisième chose est de savoir quelles mesures idoines adopter pour y remédier.

Les ministres en charge de l’Agriculture ont annoncé une panoplie d’actions qui vont de la production, en vue de combler le manque à gagner, au renforcement des capacités des ressources hydrauliques destinées aux cultures de contre-saison en passant par celui des stocks de sécurité. Quant au ministre du Commerce, il a promis l’accompagnement de ces efforts par son département. C’est ainsi qu’il est prévu une taxation des produits céréaliers dans le but de décourager les éventuels candidats à la spéculation, l’adoption de textes pour empêcher l’envolée des prix, l’accroissement du nombre de boutiques témoins et le contrôle du prix de 19 produits. Cet échantillon de mesures qui traduisent a priori la bonne volonté de l’exécutif de venir en aide aux populations et impressionnent par leur nombre ont, malheureusement, déjà fait la preuve de leurs limites de par le passé.

Leur difficile, voire impossible ou inefficace applicabilité ou mise en œuvre leur a toujours conféré un effet palliatif et non curatif, ni à court terme, ni à long terme. L’exécution des coûteux projets de distribution de semences améliorées a produit des résultats, certes, mais mitigés du fait du flou qui a toujours entouré leur gestion. Les tentatives de maîtrise des prix des denrées de première nécessité se sont toujours soldées par des échecs aussi étonnants que révoltants. Même certains détenteurs de boutiques dites témoins n’hésitent pas à narguer l’autorité en fixant les prix à leur guise. Où est donc passée l’autorité de l’Etat censée survivre à la libéralisation du marché comme à toutes les autres formes d’expression de la démocratie ? Celui-ci a-t-il perdu le privilège d’user de cette prérogative ne serait-ce que pour protéger l’intérêt général ?

Car, il ne sert à rien de s’échiner à collecter des vivres à coups de milliards si, malgré les dénonciations de gestion opaque, aucune sincère et efficace décision n’est prise pour juguler ces goulots d’étranglement. Par ailleurs, un grand effort doit être fait pour éviter que les vivres destinés aux populations les moins nanties des zones déficitaires ne tombent dans la panse d’individus cupides qui font plus de dégâts qu’une nuée de mange-mil. Et si tant est que les dirigeants burkinabè veuillent convaincre leurs concitoyens qu’ils sont préoccupés par le sort des plus démunis, ils doivent avoir le souci réel de donner à leurs politiques plus d’efficience à effet durable. Il est évident qu’aucune émergence ne peut s’opérer avec une agriculture inadaptée qui engendre des paysans « mendiants » parce que tributaires de mesures circonstancielles.

Pour tendre vers l’autosuffisance alimentaire et maintenir intacte sa souveraineté, le pays des Hommes intègres doit rompre avec les mesures conjoncturelles au profit de politiques à effet pérenne. Une meilleure organisation de la distribution et de l’utilisation des semences améliorées, de la pratique des cultures de contre-saison s’avère indispensable en amont pour adapter l’agriculture burkinabè aux changements climatiques. L’intervention du ministère en charge du Commerce en aval devra permettre de mettre diligemment en marche le système approprié de maîtrise des prix que le département d’Arthur Kafando a promis de concocter. Le bilan prévisionnel de la campagne est si éloquent et impose que l’on actionne en même temps les leviers de prévention de la famine et d’une autre crise alimentaire. Le tout devant avoir pour principal souci de s’inscrire dans un élan de durabilité.

En même temps que le gouvernement œuvre à constituer au plus vite les stocks d’urgence et de sécurité, il doit veiller à assurer leur sécurité et l’atteinte de leurs cibles. Il doit en outre envisager d’accroître la production de la future saison par des pratiques dont la qualité résistera à l’épreuve du temps et de ses corollaires. Ainsi pourra-t-il instaurer dans le pays, à la longue, une sécurité alimentaire durable.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 10 novembre 2011 à 08:52, par pawelgwindin En réponse à : BURKINA FASO : Instaurer une sécurité alimentaire durable

    Bien dit. Seulement avec des gouvernants qui font toujours semblant de faire quelque chose, on a le temps de creuver 10 fois avant qu’ils n’interviennent.Des paroles aux actes, avec ceux-la, il y a l’éternité.

  • Le 10 novembre 2011 à 09:34, par Donmozoun En réponse à : BURKINA FASO : Instaurer une sécurité alimentaire durable

    C’est ça le Burkina émergent ! un peuple qui ne peut pas se nourrir convenablement ^pendant douze mois dans l’année. Ce n’est pas en continuant de cultiver à la daba que l’on pourra se nourrir. Combien de pays s’étaient engagés à augmenter le budget alloué à la modernisation de l’agriculture ? Je crois que seul le Ghana dans notre sous-région a fait des efforts et commence à récolter les fruits. pendant ce temps comme d’habitude, ce sont toujours les gros mots, les séminaires et autres ateliers à n’en pas finir et au finish,peu de grains pour tous. Si l’état est capable de faire crédit auto aux députés de plusieurs millions ou des institutions comme la CNSS de faire crédit à des "bons types", pourquoi cela ne pourrait-il ^pas se faire en permettant à nos agriculteurs de pouvoir s’équiper correctement ? Ceux qui possèdent les bonnes terres et le l’équipement, ce sont encore les mêmes qui prennent des décisons. une fois que leur compte est bon, ils ne pensent plus aux autres quinze millions de burkinabè. J’ai souvent le coeur meurtri quand je vois qu’ailleurs, une seule personne laboure et entretien des dizaines d’hectares alors qu’ici, on continue de se briser l’échine, pour un résultat qui ne suffira pas pour toute l’année.
    Si en 25 ans de règne, Blaise se débrouillait pour doter le pays de 100 tracteurs par an, on en serait à 2500. ce n’est pas mission impossible au vu de ce qui se passe avec l’argent des contribuables pour l’achat des 4x4 (plus de 60 millions l’unité). Faisons le rapports 4X4/habitant et tracteur/habitant et vous comprendrez très vite que nous sommes passés vraiment à côté de la plaque.J’espère qu’un jour on en arrivera pas à la colère de la faim car ne dit-on pas qu’un homme qui a faim n’est pas un homme libre ?

  • Le 10 novembre 2011 à 21:52 En réponse à : BURKINA FASO : Instaurer une sécurité alimentaire durable

    La politique agricole du pays est mauvaise. Il faut mettre beaucoup d accent sur les regions potentiellements agricoles avec beaucoup d infrastructures ( Routes, barrages, et puits) et d ONG.

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