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Filières porteuses au Burkina : Le sésame suscite espoir dans la Boucle du Mouhoun

Publié le jeudi 3 novembre 2011 à 01h02min

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Dans le souci de développer davantage les cultures de rente au Burkina Faso, l’on constate que le sésame en tant que spéculation, prend de l’essor grâce à l’accroissement de la forte demande à l’exportation. Les paysans burkinabè s’y adonnent à cœur joie dans les champs, malgré les aléas climatiques qui faussent souvent leurs prévisions en termes de rendement. En tous les cas, l’espoir est permis et ce ne sont pas les producteurs de la région de la Boucle du Mouhoun qui diront le contraire.

Longtemps marginalisée, la filière sésame se place de nos jours comme la 3e culture de rente après le coton et l’arachide. Plante annuelle à tige quadrangulaire dont la hauteur varie entre 60 à 200 cm selon les variétés, le sésame est cultivé sur l’ensemble du territoire national allant des zones sèches à celles humides en dehors des sols inondables. L’initiative du ministère en charge de l’Agriculture d’encourager les producteurs à l’utilisation des semences améliorées a été fortement appréciée par les cultivateurs en ce sens qu’elles leur permettent d’augmenter leurs rendements.

Cette année, avec l’installation tardive de la saison, des producteurs de certaines régions n’en finissent pas de scruter le ciel. Il n’en faudra que deux ou trois pluies pour que la moisson soit bonne. Drissa Fofana, producteur de sésame dans le village de Tonkoroni, à Nouna dans la province de la Kossi (Région de la Boucle du Mouhoun), fait partie de ceux qui attendent cette pluie bienfaisante, Drissa Fofana dispose d’un champ d’une superficie de 5 ha aménagé pour la culture du sésame det d’autres spéculation telles que le mil et le maïs. C’est pratiquement en mi-août qu’il a commencé à semer. La variété utilisée est la ‘’S42‘’. Seulement l’engrais NPK a été appliqué au niveau du sol sans fumure organique. Ses plants au stade de montaison n’ont encore reçu aucun traitement phytosanitaire. A l’entendre, la saison pluvieuse cette année est capricieuse comparativement à celle de l’année dernière.
D’une manière générale, la culture du sésame à un cycle court de 90 jours. La période de semis recommandée se situant en mi-juillet, certains producteurs de la Kossi ont semé jusqu’en mi-septembre compte tenu des caprices pluviométriques. Dans la région de la Boucle du Mouhoun, la variété de sésame conseillée aux producteurs selon Tê Dofini du Service des aménagements des productions agricoles (SAPA) est la ‘’S42‘’. Selon lui, elle est beaucoup plus productive et moins attaquée par les ‘’ennemis’’ de la culture tels que les salmonelles.

A entendre M. Dofini, son rendement à l’hectare (ha) est de 1 500 Kg par rapport au sésame local qui ne donne que 150 à 200 kg/ha. Pour avoir de bons rendements, les ingénieurs agronomes recommandent aux producteurs d’utiliser la fumure organique, soit cinq tonnes à l’ha et cela doit se faire progressivement en une année. Pour les engrais minéraux, un sac de 50 à 100 kg/ha est conseillé. ‘’Les producteurs qui utilisent la variété ‘’S42 ‘’ atteignent 800 à 900 kg/ha. Les conditions de cette semence améliorée sont bien réunies. Il faut faire un labour à plat et semer en ligne. Par contre le sésame local est semé à la volée, il n’est pas issu de la recherche agronomique’’, a expliqué M. Dofini.

Hassim Diarra, producteur semencier depuis cinq ans à Tonséré, localité située à 15 km de Nouna, a une parcelle-vitrine sur laquelle plusieurs spéculations ont été réalisées. Il dispose de deux exploitations de superficies respectives de quatre hectares de la variété de base ‘’R1 ‘’ et de six hectares de sésame local. Son champ force l’admiration. Le sésame de variété ‘’S42 ‘’ a déjà fini son stade de capsulassions. Ce producteur modèle se prépare déjà pour les récoltes en novembre prochain (NDLR : le reportage a été réalisé en fin septembre). Avec les formations qu’il a reçues des cadres du ministère de l’Agriculture, M. Diarra se réjouit de pouvoir respecter toutes les étapes techniques de labour et de traitement et espère faire de bonnes récoltes cette année. « Avant j’exploitais mal mon champ de sésame. Mais à présent, je m’adapte aux techniques de production et de conservation. En plus, la semence améliorée est un produit vendu aussi bien sur le plan national qu’international et je m’applique pour donner des produits de bonne qualité. Avec mes quatre hectares, je compte avoir huit sacs de 80kg/ha’’, a précisé l’exploitant tout joyeux.

Des mutations dans les pratiques culturales

L’agriculture occupe plus de 90% des populations de la province de la Kossi. Les pratiques culturales connaissent une mutation tournée essentiellement vers les cultures de rente. En témoigne les superficies qui y sont consacrées chaque année depuis plus de cinq ans. A côté de la culture de sésame, des producteurs s’essayent à d’autres filières comme le riz pluvial strict. Dans la commune rurale de Nouna à Sobon, Sidiki Démé qui s’est jeté dans la culture du riz tout comme le sésame n’est pas très optimiste de l’état de ses plants. Il n’a sans doute pas semé à temps, d’où son désarroi et sa tristesse affichés. La leçon à retenir par le brave producteur Démé, est qu’avec les changements climatiques, rien n’est prévisible. Il faut toutefois semer à temps de l’avis des conseillers agricoles.

Ces cinq dernières années, la production du sésame a connu un ‘’boom’’ significatif sur le volet commercialisation. La filière peut contribuer à l’atteinte de la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations. Avec une demande dépassant l’offre, la prévision de production des 13 régions du Burkina Faso pour la campagne agricole 2011-2012 est de 150.000 tonnes. Selon le Directeur de la vulgarisation et de la recherche de développement (DVRD), Bouma Thio, le coût du projet de la promotion filière sésame est de 2 410 250 000 FCFA et concerne toutes les 45 provinces du pays. L’objectif étant d’améliorer les revenus et le niveau de vie des ménages ruraux. "Nous avons une demande de 200 000 tonnes avec une production de 90 000 tonnes.

C’est pour cette raison que l’Etat accompagne les producteurs dans la subvention des semences améliorées pour accroître la production afin de satisfaire la demande extérieure’’, a-t-il relevé. Sur une superficie de 30 418 ha emblavée avec une production de 24 334 tonnes pour la campagne écoulée uniquement dans la province de la Kossi, le directeur provincial de l’Agriculture et de l’hydraulique (DPAH), Mamadou Gaston Fanfani dit avoir espoir pour la présente campagne bien que la saison n’a pas été à la hauteur des attentes des paysans. ‘’ De façon générale, la campagne agricole 2011-2012 a vécu un coup assez dûr des aléas climatiques. 39 117 ha de superficies ont été emblavées dans la Kossi et nous envisageons une production de 19 558 tonnes de sésame soit 0,5 tonne/ha. Pour toute la région de la Boucle du Mouhoun, avec une superficie de 80 000 ha, une estimation de 40 000 tonnes sera attendue’’, a t-il indiqué.

La lutte contre la pauvreté doit partir de l’éradication de la pauvreté en milieu rural. Cela doit passer par l’encouragement des producteurs à aller vers des spéculations qui puissent leur permettre d’accroître leur capacité de production et d’acquérir des équipements agricoles plus modernes. Par ailleurs, en plus des appuis divers du gouvernement dans la formation des paysans, à savoir les Champs-écoles, le suivi technique sur le terrain, de la culture à la récolte en passant par le séchage et la conservation, les exploitants de la région de la Boucle du Mouhoun bénéficient du soutien d’autres partenaires. Toute chose qui concourt à mieux outiller le producteur et lui donner une performance dans son activité. Dans la Kossi, le DPAH, Mamadou Gaston Fankani a souligné l’intervention de deux partenaires qui œuvrent énormément pour la promotion de la filière sésame.

Il s’agit de l’OCADES et du Projet d’appui aux filières agricoles (PROFIL). A Dédougou, trois militaires à la retraite reconvertis en producteurs, ont bénéficié du soutien du Programme d’appui aux filières agro sylvo pastorales (PAFASP) depuis 2009, à la demande du Premier ministère. Selon le chef d’équipe de l’Opérateur appui conseil (OAC) du PAFASP, Dasmané Traoré, les bénéficiaires du soutien sont suivis sur le terrain à travers des protocoles signés entre le Programme et les services techniques de l’Agriculture. L’un des bénéficiaires, Adama Ouédraogo dit s’être lancé dans la culture du sésame auparavant sans formation, mais s’en sort à présent bien. Il a acquis un tracteur pour l’exploitation de son champ de 10 ha et reste confiant pour un bon rendement cette année. Il y a un intérêt pour la culture du sésame et l’appui des partenaires financiers explique d’une part, la hausse des superficies et d’autre part l’amélioration des techniques de production pour optimiser le rendement en qualité et en quantité à l’hectare.

Commercialisation et exportation

La filière sésame est utile à l’échelle internationale. Cette céréale entre dans la production de plusieurs produits alimentaires. Depuis un certain temps, une grande partie de cette production est destinée à l’exportation avec plusieurs acteurs à l’appui. Les principaux clients de l’extérieur, selon le responsable de la filière sésame, Thierry Pouya sont les pays de l’Asie et de l’Europe. Dans la sous-région, il y a le Ghana, le Togo et la Côte-d’Ivoire. Le Burkina Faso serait parmi les cinq producteurs de sésame après le Nigeria, l’Ethiopie, le Soudan et le Tchad. ‘’L’essentiel de la production exportée s’exprime sous forme de graine et les quantités produites sont en deçà de la demande. Nous essayons à travers certaines mesures, de booster l’aspect production’’, a noté M.Pouya.

Les statistiques ressorties au niveau de l’Office national du commerce extérieur (ONAC), ont montré que l’exportation du sésame occupe une place importante dans l’économie burkinabè. En effet, de 18 000 tonnes de sésames exportés en 2006, elle est à plus de 60 000 tonnes de nos jours. En 2010, le Burkina a exporté 61 298 tonnes pour une valeur de plus de 27 milliards de FCFA. ‘’Des exportations qui avoisinent 30 milliards de FCFA sont considérables dans le PIB de notre pays’’ a dit en substance le responsable de la filière sésame, Thierry Pouya.

Qu’il soit local ou amélioré, le sésame est recherché à l’extérieur. La variété demandée est la ‘’S42 ‘’. Et les pays européens sont très exigeants sur la qualité. ‘’En 2008, le Burkina a exporté 21 300 tonnes de sésame contre 30 000 tonnes en 2007. Cette baisse était dûe au fait que le produit n’était pas de bonne qualité. C’est d’ailleurs pour cette raison que le ministère de l’Agriculture s’est engagé à accompagner les acteurs sur toutes les techniques itinéraires de cette filière’’, a avoué M.Pouya.

Les producteurs note-t-on, gagneraient en ayant une bonne organisation formelle fiable qui permettrait de bénéficier au maximum, du fruit de leurs efforts. La filière connait des usuriers qui imposent leurs prix par des intermédiaires. Ce qui défavorise du même coup, les producteurs. Par contre, certains producteurs semenciers sont organisés en groupement provincial, régional et national. Leurs semences dites améliorées sont vendues à l’Etat à des prix satisfaisants à raison de 1 500 FCFA le kg. D’autres par contre, bien qu’ils produisent de la variété ‘’S42‘’ s’en sortent difficilement sur le terrain. Au regard de certaines difficultés de commercialisation, le responsable de la filière sésame, Thierry Pouya a révélé que nombreux sont ces producteurs de sésame qui n’ont pas encore ‘’épousé’’ l’idée de contractualisation et de professionnalisation.

Pour eux, il s’agit de produire et de vendre à celui qui achète le plus cher. Ils ne garantissent pas le marché pour les jours à venir. Certains acheteurs signent des contrats avec des producteurs et mettent à leurs dispositions des équipements agricoles tout en imposant leurs prix après les récoltes. ‘’ Cette politique a des limites car ce n’est pas aux producteurs de chercher le marché eux-mêmes. Les exportateurs ont des dispositifs dans les différentes régions et le problème ne devrait pratiquement pas se poser. Nous avons vu également des producteurs qui stockent expressément leur sésame en pensant que les prix vont augmenter. Mais ils oublient que le marché du sésame suit le cours mondial. C’est la raison pour laquelle nous tentons de sensibiliser les producteurs pour qu’ils puissent comprendre », a souligné M. Pouya.

De la transformation du sésame

L’aspect transformation n’est pas très développé au Burkina Faso. Cette transformation est essentiellement artisanal et semi-artisanal. Les femmes sont les plus nombreuses dans ce maillon et s’adonnent principalement à l’activité artisanale pour l’extraction de l’huile de sésame, des pâtisseries, des croquettes ou gâteaux faits de mélange de graines de sésame et du sucre ou de sel. A Boromo, dans les Balé, une localité située à l’Ouest du Burkina à environ 176 km de Ouagadougou, la transformation et la vente de ces gâteaux, communément appelée ‘’Bènè’’, occupent plus le temps de la majorité des femmes et des filles. A la gare de Boromo, ces vendeuses, (plats ou assiettes de ‘’Bènè’’ en main), vous souhaitent la bienvenue en ces termes : Tantie "Bènè Bé !" Tonton ‘’Bènè Bé !’’ Juste pour attirer votre attention sur leurs produits de vente.

Ces commerçantes maîtrisent toutes les heures d’arrivée et de départ de toutes les compagnies de transport qui arrivent à la gare et profitent se faire de la clientèle. Adjara Gué excelle depuis trois ans dans la transformation et la vente des croquettes. Son seul point de vente est la gare de Boromo qui ne tarit jamais de monde. Le plat-mesure du sésame est acheté à 1 100 FCFA pendant la période de soudure. Dans cette activité, elle dit pouvoir acquérir un bénéfice variant entre 1 500 à 2000 FCFA.
Pour valoriser la transformation du sésame, une jeune association dénommée Faso-Gnatagua regroupant 16 femmes est née dans les Balés en 2010. Son objectif : rechercher des partenaires financiers pour la mise en œuvre d’un projet d’extraction de l’huile de sésame.
La filière sésame est incontestablement une des principales sources de revenus pour beaucoup de ménages en milieu rural comme urbain au Burkina Faso, et il faudra que les acteurs, les autorités politiques redoublent d’ardeur au travail pour plus de qualité sur la chaine de valeur de la filière.

Afsétou SAWADOGO

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 31 octobre 2013 à 10:18, par Hai Rai En réponse à : Filières porteuses au Burkina : Le sésame suscite espoir dans la Boucle du Mouhoun

    Cette filiale est très interessante à mon avis. Je pense que je n’hesiterai pas pas à m’adonner à cette culture. Merci au Ministère pour ces informations.

  • Le 25 octobre 2014 à 03:10, par sidy ahmeth En réponse à : Filières porteuses au Burkina : Le sésame suscite espoir dans la Boucle du Mouhoun

    Salut ! monsieur ou mme j’ai bien lue votre rapport sur le sésame et j’apreci. je voulez vous dit je suit un cultuvateur de sésame aux senegal . je voulez vous demande est qu’ont peur etre des colaborateur sur le travaille,par ce que j’ai des hectar ici aux senegal sur la region de zihgaisor et st luis "walo".merci de me contacte sur le numero 0022177316701 OU sidyleboss@hotmail.

  • Le 18 février 2015 à 12:47, par NACANABO Dramane En réponse à : Filières porteuses au Burkina : Le sésame suscite espoir dans la Boucle du Mouhoun

    Salut monsieur ou mme j’ai lu votre rapport, çà m’a beaucoup informé sur le sésame. Je suis un étudiant à l’Université de Ouaga. Je vais bientôt soutenir mon mémoire dont le thème porte sur le sésame.

  • Le 16 avril 2015 à 19:38, par EGBARE Mèhèza Afizetou En réponse à : demande d’informations

    salut
    je suis une étudiante en entrepreneuriat. dans le cadre de mes études il nous a été demandé d’écrire un document de projet et je me suis intéressée au sésame que j’aime beaucoup et dont les vertus ne sont pas encore connues de la population togolaise. Afin de compléter mon document de projet, je voudrais savoir s’il existe au Burkina Faso un presse à huile doté d’un système de filtration d’huile de sésame. Si cette machine existe, je voudrais que m’envoyer une facture pro forma si possible. Compte tenu du peu de temps qui nous a été accordé ; je vous prie de bien vouloir me répondre le plutôt possible. Merci pour votre compréhension et votre coopération !

  • Le 29 août 2017 à 07:30, par RAVELOARIJERY Bakolimalala En réponse à : Filières porteuses au Burkina : Le sésame suscite espoir dans la Boucle du Mouhoun

    Nous commencons juste la culture de sesame. et nous avons besoin de faire une multiplication de semence sur une superficie de 12,5 ha
    Pourriez vous nous indiquer comment trouver la variété de semence S42 que vous utilisez et combien coûte le kg jusqu’à Antananarivo Madagascar.

    Mes sincères remerciements

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