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Alternance au Burkina : Je t’aime moi non plus

Publié le jeudi 20 octobre 2011 à 00h37min

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Si l’on devait établir des statistiques, afin de déterminer les mots les plus utilisés au Burkina Faso en 2011 et 2012, le concept « d’alternance » figurerait en bonne place, sinon en tête de liste ! Alors, une analyse psychanalytique des Burkinabè pourrait révéler qu’ils tiennent à l’alternance, au changement, au renouvellement… Mais, à voir de près, l’on a l’impression que nombre de ces Burkinabè n’aiment pas l’alternance comme ils le proclament ou le profèrent à tout bout de champ, ces derniers temps ! Ou du moins, l’on pourrait dire que le Burkinabè aime bien l’alternance, mais la préfère pour les autres. Et pour cause ! Le constat sur le terrain montre que les comportements de la plupart des Burkinabè démontrent cet état de fait.

Un coup d’œil de part et d’autre permet de le dire : que ce soit au niveau des partis politiques, des syndicats, des associations de la société civile, des ONG…, que la vision la plus partagée par les premiers dirigeants est le plus souvent, loin d’être celle de l’alternance ! Le Premier ministre, Luc Adolphe Tiao, a même été obligé de dénoncer les présidents des Associations des parents d’élèves (APE) et leurs collaborateurs, lors de son discours sur la situation de la nation.

En effet, des présidents de ces structures sont devenus, comme le dirait le chroniqueur Mamane sur RFI, « des présidents-fondateurs et dictateurs très puissants », sans foi, ni loi, guidés le plus souvent, par leurs propres intérêts, au détriment du bon fonctionnement des écoles. De même, les membres des APE, comme ils semblent tirer profit de la situation, demeurent dans un silence complice et coupable, face aux dysfonctionnements, eux-mêmes œuvrant pour être des inamovibles dans le bureau. Dans ce contexte, peut-on parler de transparence, de compte rendu et de bilan des activités des bureaux des APE ? Naturellement, les bilans, surtout financiers, sont rarement faits et les cas de malversations financières dans ce milieu deviennent de plus en plus fréquents.

Il y a donc lieu de tout remettre à plat, pour repartir à zéro, avec des textes clairs pour tous, dès le départ. L’une des règles fondamentales sur laquelle il va falloir insister, par exemple, pourrait être la nécessité que tous ceux qui désirent être membres du bureau d’une APE, aient vraiment un enfant ou soit réellement responsable d’un élève dans l’école où ils veulent se faire élire, avec preuves à l’appui. Outre les APE où la règle d’or semble être l’inamovibilité, la situation de la plupart des associations, syndicats et ONG n’est pas non plus reluisante ! Au sein de certaines associations, les premiers responsables semblent être élus à vie et sont le cœur et les poumons des structures, à tel point que sans eux, tout est aux arrêts. C’est aussi le cas, même dans les organisations syndicales !

La plupart de ces structures ont des présidents qui paraissent intouchables, avec un règne à la ad vitam aeternam.
L’on dira certainement qu’ils sont les hommes de la situation, ils peuvent donc continuer leurs mandats de présidents ou de secrétaires généraux. Les partis politiques n’échappent pas non plus à la règle. Rares sont les partis politiques au Burkina Faso où le président, de son vivant et bien portant, a accepté de son propre gré, de céder la direction de son parti par souci d’alternance ou de démocratie ! Conséquence, il n’y a pas de renouvellement, les idées vieillissent ; les plus jeunes manquent d’espace pour s’exprimer et s’épanouir.

Et le jour où le président, de façon naturelle et inévitable pour tout vivant, n’est plus, il part avec son expérience, ses idées et l’âme de son parti ! Et Dieu seul sait combien de partis politiques n’ont pas survécu au départ de « leur président-fondateur » ! Mais dans ce domaine, l’un des hommes politiques burkinabè qui a eu le courage de céder volontairement, la direction de son parti et qui mérite, de ce fait, d’être félicité, c’est Laurent Kilachiu Bado, fondateur du PAREN ! Lui au moins, il a fait confiance à quelqu’un d’autre, surtout à la jeunesse, en acceptant de se mettre de côté, en accompagnant et en guidant les pas des plus jeunes à qui il a transmis le flambeau. La situation est plus triste quand l’on jette un coup d’œil du côté des individus.

Combien de directeurs généraux ou de simples directeurs sont accrochés, par tous les moyens, à leur postes et sont prêts à tout, pour y rester ? Et si par la force des choses et par nécessité de mouvements des hommes pour une question d’alternance et de renouvellement, on venait à leur trouver des successeurs, c’est souvent la croix et la bannière pour les nouveaux venus. "Le sorti, d’où il est", met tout en œuvre pour l’échec de son remplaçant voire de ses remplaçants. L’objectif est qu’on dise qu’il était mieux. Et pour cela, il utilise ses anciens courtisans et courtisanes pour, si possible, saper les initiatives du nouveau patron. Au regard de ce tableau, faut-il croire que l’alternance est un souci pour les Burkinabè ? Devrait-il avoir des hommes convaincus pour réclamer l’alternance par tous les moyens, quitte à mettre à mal le vivre ensemble dans un pays ? Dans ce contexte de débats sur les réformes politiques et institutionnelles au Burkina Faso, il y a lieu d’être lucide et d’être guidé par un esprit de pardon et de tolérance pour sauver l’essentiel.

Car s’il y a lieu de faire une analyse approfondie, chaque Burkinabè devra faire son autocritique afin que l’on s’entende sur l’option à choisir. Après tout, avant de crier alternance et changement sur tous les toits, chacun devra commencer par balayer devant sa propre porte… Car les "Laurent Kilachiu Bado" ne semblent pas foisonner au Burkina !

Ali TRAORE (traore_ali2005@yahoo.fr)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 20 octobre 2011 à 14:57, par Docker2 En réponse à : Alternance au Burkina : Je t’aime moi non plus

    Bien dit mon pote. Aussi je peux ajouter à tout ce que tu as bien dit le fait que dans certains milieux les jeunes fuient les responsabilités qui ne rapportent que dalle côté financier, si bien qu’ils contribuent à maintenir les anciens à leur poste. certains veulent partir mais personne ne veut les remplacer... Huumm !

  • Le 21 octobre 2011 à 16:33 En réponse à : Alternance au Burkina : Je t’aime moi non plus

    Le poisson pourrit toujours par la tête. si l’alternance était une règle d’or au sommet de l’Etat, les autres suivront. C’est comme pour la corruption et les détournements impunis, cela est de venu naturel parce qu’on voit comment les "dirigeants" se sucrent sans vergogne.

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