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LE BURKINA ET KADHAFI : Une communication gouvernementale brouillée

Publié le jeudi 8 septembre 2011 à 03h30min

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C’est dans ses pires moments que l’on reconnaît ses vrais amis, enseigne l’adage. Si l’ex-leader libyen en fuite guettait une opportunité pour savoir qui éprouve un amour fraternel réel et désintéressé pour sa personne, il aurait maintenant une occasion en or en cette période où il vit la même situation qu’un pestiféré. A moins qu’il ne soit définitivement atteint d’une mégalomanie incurable, Mouammar Kadhafi doit bien se rendre enfin à l’évidence que bien de ses pairs africains qu’il prenait pour ses inséparables alliés le craignaient plus qu’ils ne l’aimaient. La preuve en est que, depuis que son régime est aux abois et que lui-même est obligé d’entrer dans la clandestinité, les dénégations dont il fait l’objet de la part de certains de ses homologues africains n’ont point attendu sa totale neutralisation.

A l’image de Saint-Pierre qui, à l’approche de l’inculpation du Christ, et avant même que le coq fît entendre son chant crépusculaire, a renié ce dernier par trois fois. L’ancien dirigeant libyen en cavale, parce que traqué par les plus puissantes forces de la planète, par rebelles interposés, est devenu si encombrant que la simple évocation de sa probable présence dans un pays suscite ipso facto un démenti savamment pondu par les autorités en place. L’attitude du Burkina, qui dit ne pas vouloir de Kadhafi, après avoir tenu il y a quelques jours un discours plus bienveillant, accrédite cette thèse.

Accorder un refuge, par ces temps qui courent, à un dirigeant vomi par la communauté internationale qu’il a narguée à suffisance, pourrait donc être considéré comme un crime. L’on comprend donc pourquoi le gouvernement burkinabè a tenu à remettre en cause toutes les allégations et supputations citant son pays comme étant une des destinations probables de Kadhafi. Certes, aucune information fiable n’est disponible sur le point de chute de ce dernier jusqu’aujourd’hui. Il est également vrai que sa difficile localisation ne fait qu’en rajouter au flou engendré par le foisonnement des hypothèses contradictoires ou vite réfutées. Le jeu de pingpong auquel se livre le pouvoir de Ouagadougou en termes de communication sur cette affaire brouille les cartes.

En effet, il y a à peine deux semaines, Djibrill Bassolet, ministre burkinabè des Affaires étrangères, émettait la possibilité pour son pays d’accorder l’asile à Mouammar Kadhafi. Et voilà qu’à présent, son collègue de la Communication, Alain Edouard Traoré, exprime l’impossibilité pour le Burkina de l’accepter sur son territoire. Si fait que l’on ne sait plus à quel ministre et à quelle version se fier. La peine que l’on éprouve à suivre la logique diplomatique de la 4e République est d’autant plus grande que pendant le laps de temps qui s’est écoulé entre ces deux sorties à contenu antinomique, aucun coup de théâtre n’a été observé dans le conflit libyen. La donne n’a donc pas changé au point de nécessiter une reconsidération de sa position à la tête de l’Etat.

Plusieurs interrogations s’imposent dès lors. Le ministre Bassolet avait-il commis une bourde en parlant un peu trop vite ? Le porte-parole du gouvernement burkinabè était-il chargé de recadrer les choses lors de ses récentes déclarations à la presse ? Pourquoi, dans ce cas, ne l’avoir pas fait plus tôt ? L’actuel chef de la diplomatie du Faso passe pour un des piliers du régime de Compaoré, en ce sens qu’il a toujours fait preuve d’une discipline militaire et d’une prudence diplomatique, rompu qu’il est à l’art de la négociation.

Si fait que l’on peut douter qu’il ait pris de façon unilatérale cette initiative de se prononcer sur une question aussi délicate que l’asile du colonel libyen sans au préalable en référer à sa hiérarchie. Mais quand on sait que le ministre Traoré non plus ne se hasarderait pas à exposer une position personnelle contraire à celle du président Blaise Compaoré dans cette affaire, l’on se rend alors compte de toute la complexité du sens à donner à cette contradiction diplomatique. Dans tous les cas, que cette dernière option de l’exécutif burkinabè ait pour but de rectifier ce tango diplomatique ou s’inscrive dans la veine d’une révision de position, le constat que l’on peut en tirer, c’est que l’image de la diplomatie burkinabè en sort quelque peu ternie.

Quand les autorités burkinabè n’excluaient pas l’éventualité d’accueillir Kadhafi, elles savaient pertinemment que la victoire du Conseil national de transition était inéluctable. Elles n’étaient pas non plus sans savoir qu’elles avaient ratifié le Traité de Rome et sont, par conséquent, censées livrer à la Cour pénale internationale tout individu sous mandat d’arrêt. En somme, elles avaient donc toute la latitude nécessaire d’éviter de servir à l’opinion nationale et internationale une communication aussi brouillée et qui, avouons-le, fait un peu désordre. Toutefois, osons scruter l’avenir avec espoir, tout en espérant que la dernière version gouvernementale sera définitive et constituera le début d’une autre politique qui viserait à ne plus laisser des personnalités infréquentables venir se la couler douce au pays des Hommes intègres.

« Le Pays »

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Vos commentaires

  • Le 8 septembre 2011 à 11:00, par boulgawal En réponse à : LE BURKINA ET KADHAFI : Une communication gouvernementale brouillée

    Nous oublions une chose tres important a preciser.
    Blaise et kadafi n"etais plus ami, avant la crise en liby ,le courant entre les deux n"etais ca. Il faut bien preciser cela que s’etait fini .il ya des chose qu"il faut comprendre .Kadafi na jamis donne quelque chose au Burkina parcqu’il aime le faso ..Kadadafi en profitait egalement du soutien des pays comme le burkina et d’autre pour se faire valoire sur plan diplomatie ..Les donsde Cadafi etait empoisonne.. .

  • Le 8 septembre 2011 à 11:47 En réponse à : LE BURKINA ET KADHAFI : Une communication gouvernementale brouillée

    Quelque soit ce qui s’est passé, le Burkina était prêt à accueillir et Kadafi cela n’était pas mauvais. Le Burkina a été sommé par la France après le discours de Bassolé de revoir les choses, c’est pourquoi le PF a dépêché le Ministre porte parole pour rectifier. En somme, notre attitude à la Libye est dicté malheureusement par la France

  • Le 8 septembre 2011 à 12:03 En réponse à : LE BURKINA ET KADHAFI : Une communication gouvernementale brouillée

    La contradiction au sommet de l’État traduit deux choses à mon sens :
    - Primo, aucun Ministre, en réalité, ne peut donner une position même de principe sans s’être référé au grand Sachem ! C’est toujours l’obligation d’avoir le point de vue de l’autre que personne ne peut et ne veut prendre des initiatives, au risque de se faire taper sur les doigts : c’est la règle de la pensée unique qui prévaut au Faso au sommet de l’Etat burkinabé !!.
    - Secondo : Ne nous voilons pas la face, qu’elle qu’en soit la "vomissure" que représente Kadhafi aujourd’hui, disons tout de même qu’il a des droits. Le droit d’asile est un droit universel. Ceux qui ont fait partir Kadhafi savent ce qu’ils veulent et attendent de ce pays. Ce n’est pas parce que les "faiseurs" du droit international ne veulent plus de lui aujourd’hui qu’il faut lui renier ses droits de demander protection et notre devoir de le protèger ! Quel danger il représente après avoir été dépouillé de tout : sa seule grande gueule ne suffit plus !
    les indésirables algériens et autres que le Burkina a accueilli sur recommandation de la France avaient ils plus de droits que ce monsieur....?

  • Le 8 septembre 2011 à 13:28, par Belco En réponse à : LE BURKINA ET KADHAFI : Une communication gouvernementale brouillée

    Quand on dit souvent qu’il faut mettre les gens qu’il faut à la place qu’il faut, voila les conséquences. Djibril c’est un sodja il ne sait pas tourner en rond. Il a dit ce qui etait décidé, voila que Alain T. est appelé à dire le contraire par force.
    Le Burkina ne savait que le Guide pouvait demander à venir au Faso, voila pourquoi Djibril a dit haut et fort cette déclaration qui est loin de la réalité.
    Maintenant que les choses serieuses se presentent vous dites le contraire. Alain T. savait même que c’etait de la comédie qu’il jouait dans son interview, a travers sa maniere de parler ca voyait bien, qu’on l’a fait dire du n’importe quoi. Pauvre Africains ; la peur va vous tuer tous , ou est votre independance ? Jan ping, Omar Konaré, Jacob Zouma, ATT, ou etes vous ????? C’est aujourd’hui que les africains de l’Afrique doivent vous attendre. Nous ne voulons pas que demain on vienne citer en disant qu’il a lutté pour l’unité de l’Afrique ; ca sera trop tard ; dite merde aujourd’hui à ces impérialistes avec à la tete la France. La jeunesse africaine à honte de ses dirigents.

  • Le 8 septembre 2011 à 16:57, par Ralph En réponse à : LE BURKINA ET KADHAFI : Une communication gouvernementale brouillée

    Les présidents africains sont des pantins à la solde de l’occident. Pour une fois que quelqu’un prenait l’argent de son pays pour tirer l’Afrique vers l’avant vous n’êtes même pas capable de le soutenir, à cause de vos "fauteuils". Nous tous savons pourquoi les européens se sont acharnés sur la Libye et malgré le démenti d’un ancien directeur de la DST française sur les prétendus bombardements de Kadhafi contre son peuple, certaines personnes continuent de croire à cette fable montée de toute pièce. Cela me fait très mal que le seul pays qui avait jusque-là échappé à l’emprise des occidentaux se voit manipulé pour une soit-disante question de liberté ou je-ne-sais-quoi d’autre, chose dont le peuple libyen disposait du simple fait de son indépendance vis à vis de ces vautours qui apparaissent sur toutes les chaines du monde comme des sauveurs tout simplement parce qu’ils ont "dégelé les fonds de la Libye"(!!!), très certainement en prenant le soin de s’approprier les intérêts que cet argent a pu produire....

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