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Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

Publié le mercredi 10 août 2011 à 02h20min

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Au sujet de l’entretien accordé à Jeune Afrique – N° 2638 du 31 juillet au 6 août 2011 par Henri de Raincourt Ministre de la Coopération française, nous vous proposons la réaction de Jean R. Guion, Président du Conseil International de Solidarité avec le Burkina Faso

Vous connaissez probablement l’expression du philosophe Blaise Pascal : « Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà »

Plein de sagesse et de bon sens, Pascal voulait affirmer que la perception de certaines vérités dépend de multiples facteurs : géographique, culturel, sociologique, historique, etc.

Autrement dit, la vérité pour quelqu’un, à un moment ou à un lieu donné, ne l’est pas forcément pour une autre personne d’une autre époque ou d’une autre région !

Montaigne lui aussi avait déjà écrit : "Quelle vérité que ces montagnes bornent, qui est mensonge au monde qui se tient au-delà"…

Blaise Pascal naquit en 1623 et mourut en 1662…
Donatien Alphonse François de Sade, le fameux marquis, naquit le 2 juin 1740 et mourut le 2 décembre 1814…

Quel rapport me direz-vous ?

Aucun à vrai dire, si ce n’est l’expression d’un regret, celui qu’ils ne se rencontrèrent jamais et que la sagesse du philosophe n’a donc pu éclairer un des ancêtres de l’actuel ministre français de la Coopération…

La transmission orale aurait peut-être permis à Monsieur Henri de Raincourt de relativiser, ou de mieux préciser, son analyse récemment confiée aux journalistes de l’hebdomadaire « Jeune Afrique »*.

Vérité en deçà… de la Méditerranée, erreur au-delà ???

Le ministre français a bien raison…« Les temps ont changé » !

Le Roi des Belges n’est plus propriétaire personnel du Congo,
le poste de ministre des Colonies a été aboli,
les indigènes (comme on disait) sont devenus des citoyens libres, même de déterminer leur devenir politique !!!

A cette époque, dans notre vieille Europe, des monarchies régnaient, et règnent encore en toute impunité malgré leurs erreurs politiques ou humaines passées.

Des idéologues, tout aussi communistes que libéraux, massacraient des millions d’êtres humains, dans des camps ou chimiquement, avec le soutien de certains intellectuels occidentaux toujours en cour aujourd’hui…

Des ministres assistaient au sacre de l’Empereur Bokassa, que de Gaulle considérait déjà, en son temps, comme « un cinglé » (Cf. Jacques Foccart).

En ce temps là, les gouvernements duraient quelques jours, ou des années, mais leurs membres pouvaient être secrétaires d’Etat, ministres, président du Conseil, et même président de la République, alternativement ou successivement, pendant 50 ans comme ce fut le cas, par exemple, pour François Mitterrand !

Alors, avons-nous vraiment des leçons à donner, nous Européens, sur le renouvellement du personnel politique qui, à droite comme à gauche et même au centre, est quasiment inchangé depuis 40 ans ?

Avons-nous vraiment des leçons à donner, nous qui nous indignons, à juste titre, des violences en Libye ou en Syrie, jusqu’à nous engager militairement, alors que nous ne trouvons rien à dire sur les exécutions en Chine qui font, selon Amnesty International, 7000 à 8000 morts identifiés par an ?

Avons-nous des leçons à donner nous qui, en France et en Europe, nous lamentons sur les conséquences de ces quinquennats (qu’à droite et à gauche on songe d’ailleurs à remettre en cause) qui nous imposent de quasi permanentes campagnes électorales stérilisant ainsi les débats de société et gelant les indispensables réformes qui en découleraient ?

Avons-nous des leçons à donner à un Chef d’Etat, Blaise Compaoré en l’occurrence, qui a instauré dans son pays, ravagé par des décennies de coups d’état, une réelle démocratie, qui a stabilisé la région ouest-africaine, qui a pacifié la Côte d’Ivoire, qui a rétabli la démocratie en Guinée, entre autres choses, et qui s’est encore récemment « engagé à respecter la Constitution » comme il l’a toujours fait ! Faut-il le rappeler ?

Rien de tout cela ne se serait fait sans la durée, la stabilité, le respect des institutions !
Le progrès dans la conscience de la liberté, c’est toute l’universalité de l’histoire, écrivait Hegel.

Oui, le Ministre Henri de Raincourt a bien raison, les temps ont bien changé.
Ce qui n’a pas changé en revanche c’est que l’histoire est demeurée un déséquilibre universel de quelques heures de liberté pour des siècles de servitude.

La France a commencé, je dis bien a commencé, à s’affranchir de siècles de servitudes il y près de 250 ans…
L’Afrique tente courageusement de s’affranchir de siècles de servitudes seulement depuis 50 ans !

Ecrire, disait Roland Barthes, c’est ébranler le monde, y déposer une interrogation indirecte, à laquelle on s’abstient de répondre.
La réponse c’est chacun de nous (en l’occurrence chaque africain) qui doit la donner en y apportant son histoire, son langage, sa liberté !

Alors monsieur le ministre, même si je suis persuadé que nous partageons les mêmes valeurs, avons-nous des leçons à donner ?

Qu’il soit bien clair, dans l’esprit de ceux qui me font l’honneur de me lire, qu’il ne s’agit pas ici d’un plaidoyer pour des modifications constitutionnelles, quelles qu’elles soient.
Trop respectueux du libre arbitre des Burkinabè qui, quoiqu’il arrive, seront les seuls à décider du devenir de leurs institutions, je ne me permettrais jamais une telle ingérence !

Car, pour paraphraser Blaise Pascal, encore lui, « le passé et le présent sont leurs moyens, seul l’avenir est leur fin ! »

Par Jean R. Guion
De l’Académie Française des Sciences d’Outre Mer
Président du Conseil International de Solidarité avec le Burkina Faso
Président International de l’Alliance Francophone

* Jeune Afrique 2638 du 31 juillet au 6 août 2011

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Vos commentaires

  • Le 10 août 2011 à 05:03, par ouedraogo En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    C’est ridicule de s’acharner à nous dire que le nord de la méditerranée n’a aucun avis sur l’Afrique. certes, la politique du Burkina ne doit pas se faire par Mr Henri DE RAINCOURT, encore moins par Mr Jean R. COMPAORE. A la limite, je me demande si vous comprenez un peu les citations de Pascal, Montaigne... c’est trop facile de se réfugier toujours dans le passé colonial et néocolonial. si ce dernier existe toujours ne faut-il pas stigmatiser plus nos dirigeants qui le cautionnent que les occidentaux(Sankara que vous méprisez tant ne l’acceptait pas !). Les temps ont changé et c’est l’avenir du Faso qui nous intéresse, si vous êtes nostalgique des années coloniales allez-y mais tout seul svp. soyez un peu objectif la prochaine fois sinon personnellement je ne perdrai plus mon temps à vous lire !

  • Le 10 août 2011 à 06:32, par Aung san suu kyi En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    J’appelle tout le peuple du Burkina à se dresser contre la modification de l’article 37. Les temps ont changé et plus rien ne sera comme avant. N’en déplaire aux griots

  • Le 10 août 2011 à 07:37, par Jourdani En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    l’auteur de ces lignes dit être un ami du Burkina. Non, vous êtes un ami de Blaise Compaoré et ce n’est pas un crime. Vous n’êtes pas obligé de regarder la réalité du Burkina en face. A la différence de vous, nous la vivons au quotidien. Tout autour du Burkina (Mali, Ghana, Niger, Bénin), il y a des alternances politiques et les départs des hommes dits providentiels n’a pas mis à l’existence de ces pays. Et vous voulez nous faire croire le Burkina fera l’exception. Oui il est évident qu’un nouveau au pouvoir au Burkina est pour vous moins d’entrée d’argent, moins de voyages et de suite à l’hôtel silmandé au frais de la princesse, etc. Le Burkina a droit à la démocratie vraie. Ne croyez vous pas ?

  • Le 10 août 2011 à 09:22 En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Deux remarques après avoir souffert en lisant ce charabia :
    - qui à droite ou à gauche songe à remettre en cause le quinquennat en France ? Personne, sinon, donnez des noms et les déclarations faites à ce sujet. Arrêtez de désinformer les gens.
    - Nous ici au Faso, on vous connait ; vous êtes l’ami aveuglé du président ; votre avenir c’est pas votre affaire ; on sait bien que vous voulez la modification de l’art 37, car si le président n’est plus là, que deviendrez-vous ?
    Monsieur Guion, on n’a pas besoin du soutien de votre ministre et de vous même pour protéger notre constitution

  • Le 10 août 2011 à 09:41, par SEYDOU En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    c’ est tout simplement ahurissant !Voilà les gens aiment dire ,l’occident à mis 250ans pour apprendre la démocratie et donc nous autres africains devront aller à notre allure ,à notre rythme.cela daccord quand il s’agit de nous administrer lesP.A.S et autres programmes là on tient pas compte de notre rrythme quand il s’ agit de construire des bunkers plus cossus qu ’en europe on tient pas compte de notre rythme .quand il s’ agit de rouler dans des limousines derniers cri , là aussi on tient pas compte de notre rythme.pourtant le portugal n’ avait pas le niveau de développement du ghana en 1960 ;allez y donc comprendre les choses

  • Le 10 août 2011 à 10:30, par windin En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Bel article ! Les incultes qui s’égosillent tous les jours à condamner les démocraties africaines sans discernement, lisez bien cet article et soyez plus tolérants désormais !
    Quoi qu’on dise, Blaise COMPAORE a joué un rôle précieux et appréciable pour le développement en cours du Burkina Faso !
    Mais je suis d’accord qu’il faut qu’il parte pour sortir la tête haute !

  • Le 10 août 2011 à 10:34 En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    RIEN A AJOUTER .

  • Le 10 août 2011 à 10:47, par parigo En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Tres bien dit ...seul le peuple burkinabè est maitre de son destin...

  • Le 10 août 2011 à 11:02, par Tapsoba En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Que les francais aient des lecons à donner aux africains ou pas(ils ne font d ailleurs que suivre le cours de l histoire qu ils croyaient pouvoir en défendre le contraire en Tunisie d abord mais malheureusement...),nous ,nous voulons l alternance en 2015 à la tête de notre nation BURKINA FASO.Au demeurant,ce débat n est que franco-francais ;car,les peuples africains en général et burkinabè en particulier n ont pas attendu vos lecons pour se réveiller.

  • Le 10 août 2011 à 11:08, par saga En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Merci à cette personnalité pour son analyse. Mais entre nous, y a t-il plus ingérence que ça ?

  • Le 10 août 2011 à 11:19, par Bonnet En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Merci M. Jean R. Guion. Joli rappel de l’histoire.
    Cool. Trop fort. Et curieusement même ceux qui demandent la révision de notre article 37 de la constitution là n’arrivent pas à trouver ces arguments là. Ca se comprend. Ils ne sont pas de l’Academie.

    Il serait bon que vous fassiez un petit rappel des causes la Révolution française pour nous aider à comprendre les choses. Et nous dire si les Français avaient eu tort en 1789.

    Aussi, un Président Français a t’il deja fait 27 ans au pouvoir ? La question n’est pas que Blaise n’a pas instauré une démocratie. Mais comme celle ci a ses exigences, notamment l’alternance, nous demandons juste le respect de ces exigences. L’histoire de notre peuple nous enseigne aussi que cet article 37 a été rédigé dans sa version actuelle à la suite d’une crise qu’a connu le Pays et comme on ne veut plus de crise, on demande de le garder en l’état. C’est pas démocratique ça ?

    Etait ce normal que des étudiants humilent le Gl De Gaulle qui a libéré la France ? Pourquoi l’ont-ils fait ? Aider nous à comprendre. Au moins vous vous comprenez les réalités du Burkina. Ce que vous dites la est si vrai qu’on peut être ministre, gouverneur, .... et chez nous, tous nos ministres qui ont été débarqués à la suite des événements de mars avril mai sont en train d’être nommés ambassadeurs. Question de "turn over" !!!???

  • Le 10 août 2011 à 12:04 En réponse à : Blaise le Philosophe… et Blaise le Politique !

    Monsieur Guion, vous faites ce que vous reprochez à votre ministre ! Vos propos ne sont ni plus ni moins qu’une intrusion, une ingérence dans les affaires internes du Burkina.Vos écris me rappellent un certain maître Verges et autres dans la crise ivoirienne. Comme vous le dites, nous savons que notre président, Blaise Compaoré, est sage et qu’il saura prendre les décisions sages qui sied pour nous épargner le pire au Faso. Ceci étant, épargnez-nous de vos dissertations philosophiques dignes de l’époque coloniale. Je pense que les écrits du genre condamnent davantage le président Compaoré qui n’en a vraiment pas besoin à cette époque critique de l’histoire de notre pays. Laissez-nous trouver une solution interne à nos problèmes, car comme a su bien le dire un de vos compatriotes, la France (pardon les Français) n’ont pas d’amis mais des intérêts.

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