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Succesion à la tête de la Commission de l’UEMOA : Ce candidat du Niger qui suscite la méfiance

Publié le vendredi 29 juillet 2011 à 03h41min

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En avril dernier, l’élection de Mamadou Issoufou à la tête du Niger avait consacré la fin de la transition conduite par le Général Salou Djibo sous la bannière du Conseil supérieur pour la restauration de la démocratie (CSRD). A peine les membres du CSRD ont-ils remis le pouvoir que les Nigériens ont commencé à déchanter sur l’intégrité de certains d’entre eux. Ils découvrent avec stupéfaction certains faits commis dans la gestion des deniers publics. Les premiers signaux qui émergent dejà constituent un cas de détournement d’environ deux (2) milliards de F CFA avec, semble –t-il, la complicité d’alors du chef de cabinet adjoint du patron de la junte militaire. Dans cette complicité, le nom de Badamassi Annou, alors ministre de l’Economie et des Finances, revient avec insistance.

C’est pourtant ce même Badamassi Annou qui est annoncé comme candidat pour le compte du Niger au poste de la présidence de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Il y a de quoi s’inquiéter pour l’intégrité de cette institution communautaire si on se réfère aux griefs formulés contre ce candidat et éventuel président.

Le rétablissement de l’Etat de droit, qui a été le grand objectif annoncé de la junte militaire, n’a visiblement pas été toujours accompagné du désir de s’assurer des mains propres chez certains bonzes du CSRD. Celui qui prétend au perchoir de l’UEMOA risque gros dans cette dérive financière dont parle la presse nigérienne.

Dans sa parution du 27 Juin 2011, le numéro 487 du journal satirique nigérien, « Le Canard Déchainé » n’est pas passé par quatre chemins pour lâcher cette bombe : « Détournement de deniers publics : Hassane Alkali a ordonné la sortie de près de 2 milliards de francs du Trésor national ». C’est un coup de massue sur la junte militaire amenée par le Général Salou Djibo, président du Conseil supérieur pour la restauration de la démocratie (CSRD), qui a renversé en février 2010 le régime de Mamadou Tandja pour remettre sur orbite l’ordre constitutionnel nigérien. Le CSRD est d’autant plus concerné que le principal mis en cause n’est autre que le directeur de cabinet adjoint de celui qui est perçu comme irréprochable par une grande partie de ses compatriotes et d’Africains.

Le troubleur de ce jugement parfait s’appelle Hassane Alkali. Comme dans la plupart des régimes sur le continent, celui-ci va abuser de son poste auprès du grand Sachem. Très vite, il s’illustre dans des pratiques peu recommandables. En somme l’un des plus proches collaborateurs de Salou Djibo a ramé à contre-courant de tout ce que lui et ses camarades de la junte dénonçaient et reprochaient aux dirigeants qu’ils ont chassés du pouvoir. Il embarque dans sa sale besogne des personnalités-clés du CSRD dont il bénéficie de la complicité de certains. C’est l’ordre de décaisser environ deux (2) milliards de F CFA des caisses de l’Etat qui va mettre le feu aux poudres.

Une sorte de collusion semble être entretenue entre le directeur de cabinet adjoint et le ministre de l’Economie et des Finances pour extorquer des fonds au Trésor public nigérien qui, pourtant éprouvait de réelles difficultés pour répondre à des besoins de financements publics, notamment la lutte contre la famine, l’organisation du scrutin. Ce pot aux roses n’est peut-être qu’une infime partie du deal conclu entre Hassane Alkali et Badamassi Annou au détriment de l’Etat nigérien. C’est ce que semblent nous dire les lignes suivantes extraites de Le Canard Déchainé.

« Il se susurre également que cette affaire n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan de l’affairisme dans lequel se serait illustré le sulfureux Directeur de Cabinet Adjoint, avec bien sûr la complicité de plusieurs hauts responsables du Ministère de l’Economie et des Finances et du Trésor National. Les irrégularités se chiffreraient à plusieurs dizaines de milliards de FCFA. Les investigations se poursuivent comme l’a d’ailleurs confirmé le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Porte-parole du Gouvernement, Marou Amadou, faisant le compte rendu du Conseil des Ministres du mercredi 22 juin 2011. Ce Conseil des Ministres, faut-il le rappeler, avait mis la main sur une autre affaire, portant sur 1 523 000 000 de FCFA au détriment de l’Etat. Dans cette affaire qui porte également sur des paiements de fausses factures, le même Alhassane Alkaly aurait les mains trempées.

En attendant de voir la suite, l’on se pose plusieurs questions : Alhassane Alkaly a-til seul pris l’initiative d’instruire le Ministre de l’Economie et des Finances ? Le Ministre Badamassi Annou peut-il recevoir des ordres du Directeur de Cabinet Adjoint du Président du CSRD ? Comment cette transaction frauduleuse a-t-elle pu échapper aux différents services de contrôle de l’Etat ? Quand on sait que les marchés concernés datent de décembre 2008 du temps du Ministre de l’Economie et des Finances de l’époque, Mahamane Ali Lamine Zeine qui aurait refusé de procéder à leur règlement du fait des irrégularités qui les caractérisent. Les réponses à toutes ces questions ne tarderont pas à tomber, des réponses qui feront « tomber des têtes » dont celle du sieur Alhassane Alkaly qui sera, le premier, sous la guillotine ». In Le Canard Déchaîné ».

L’équipe de Mamadou Issoufou qui veut mettre les pendules de la Nation à l’heure et jeter les nouvelles bases d’une espérance serait alors tenté de se lancer aux trousses de ces dignitaires du CSRD. Lesquels semblent n’avoir pas joué franc jeu dans les principes de la bonne gouvernance pendant la transition. Si Badamassi Annou venait à être épinglé avec des preuves irréfutables dans cette affaire, c’est du coup ses chances de se voir couronner à l’international qui risquent de voler en éclats. Pour le moment, il est soupçonné d’avoir permis, par son laxisme, un acte irrégulier ayant abouti au détournement d’une forte somme. On lui reproche de ne s’être pas opposé à ce coup, d’avoir été permissif, sinon intéressé dans l’affaire.

Si sa responsabilité quelconque venait à être établie, c’est dire qu’il faut craindre également pour les destinées de l’UEMOA avec un président peu rigoureux. C’est de la locomotive économique de nos pays qu’il s’agit, d’où l’exigence qu’il faut avoir sur la qualité des hommes qui la conduisent.

Un goulot pour le Niger, un risque pour l’UEMOA

L’affaire de détournement de deniers publics mettant en cause Badamassi Annou intervient au moment où le Niger s’investit pleinement pour l’élection de son candidat au prestigieux poste de Président de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Mais c’est le moment d’être vigilant.
Tout en portant une attention particulière sur la gestion des marchés publics et sur les finances des Etats membres, il serait bien d’inscrire l’Union dans une certitude que de placer son avenir entre les mains d’une personnalité qui, visiblement ne connaît pas les fondements de l’intégration consacrés par le Traité de 1994 mais qui se trouve aussi mouillée par des détournements.

En même temps qu’il galvanise la démocratie nigérienne, le lièvre ainsi levé aide au salut de l’Institution.
L’écho des malversations relayé par « Le Canard Déchaîné » est sans ambages : « Le grand mal reste à venir. C’est le trésor national qu’il va transformer en caverne d’Ali Baba. Le 15 mars 2011, soit trois jours après la tenue du second tour de la présidentielle qui a consacré la victoire du candidat du Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme, Issoufou Mahamadou, devenu Président de la République par la volonté des urnes, Alhassane Alkaly encore sous la robe de Directeur de Cabinet Adjoint du Président du CSRD instruit le Ministre de l’Economie et des Finances, Badamassi Annou pour la prise en charge (c’est-à-dire le décaissement) de divers marchés d’un montant de 1 857 179 750 F CFA exécutés en décembre 2008 ». Les personnes commises par le CSRD à la gestion des Finances publics ont voulu « se lécher » une dernière fois les mains avant de quitter la barque du pouvoir. Et ce, en dépit de la mauvaise passe des ressources propres à leur pays.

Cette révélation doit ouvrir l’œil et le bon des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’UEMOA qui devront user d’une grande lucidité dans le choix du successeur de Soumaïla Cissé. Il faut écarter, à tout prix tout risque. Avec le retour tant souhaité à la normalité en Côte d’Ivoire, l’Union doit prendre un souffle nouveau. Cela requiert des « mains totalement propres » pour mieux gérer les finances communautaires et conduire avec brios les nombreux chantiers.

IS


Encadre

Comme dans la plupart des pays africains, une simple injonction d’un Directeur de cabinet, même adjoint, d’un Chef d’Etat suffit à l’ordonnateur national reconnu au ministère de l’Economie et des Finances de mettre le Trésor public sous perfusion pour satisfaire des desseins personnels. Voilà le sens que revêt cette correspondance de Alhassane Alkali à Badamassi Annou.

L’Indépendant

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