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GUINEE : Condé doit se remettre en cause

Publié le jeudi 21 juillet 2011 à 02h21min

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"C’était une tentative d’assassinat et non un coup d’Etat", a laissé entendre le chef de l’Etat guinéen, Alpha Condé, sur un ton empreint d’assurance mais digne tout de même d’un homme échaudé. Que faut-il en retenir ? Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en s’exprimant ainsi, le président Condé tente de minimiser l’attaque dont il a été l’objet, et qui a touché sa résidence, faisant en sus un mort au sein de sa garde prétorienne. Autrement dit, Alpha Condé veut insinuer que ce récent incident n’est pas la rançon de sa gestion et de sa gouvernance politique décriées déjà par certaines organisations de la société civile qui, sans aller avec le dos de la cuillère, parlent même de dérives autocratiques. Bref !

Dans tous les cas, une tentative d’assassinat est souvent plus redoutable qu’un coup d’Etat, surtout quand on sait que depuis un certain moment, la forme policée des pronunciamiento commande qu’on chasse un chef d’Etat du pouvoir sans attenter à sa vie. On l’a vu en Mauritanie, à Madagascar et très récemment au Niger. Certes, un coup d’Etat ou une tentative d’assassinat, dans un Etat républicain, sont des procédés répréhensibles. Mais Alpha Condé lui-même doit avoir l’humilité de reconnaître qu’il y a péril en la demeure en prenant la mesure de la situation plutôt que de se renfermer dans une outrecuidance naïve.

Car, pourquoi en est-on venu à vouloir attenter à sa vie, alors qu’il boucle à peine huit mois au gouvernail ? A-t-il réussi en si peu de temps au pouvoir à se faire beaucoup d’ennemis ? Autant de questions qu’il devrait se poser et y apporter des réponses. En fait, souvent même, on se demande si le professeur Condé, du haut de ses cinquante ans de lutte politique qu’il n’a de cesse de sériner à chaque sortie comme un capital d’expériences à nul autre pareil, prête une oreille attentive à tout ce qui se dit et se trame autour de lui, tant il se montre suffisant. La preuve, si besoin est, est qu’il tient mordicus à son projet de révision de la liste électorale que la quasi-totalité de la classe politique rejette. Reconnaît-il implicitement avoir été mal élu si lui-même trouve irrégulière la même liste qui a servi à son élection ? A vrai dire, Condé en fait souvent trop et n’accepte jamais qu’il a tort. Il sait tout pour avoir duré dans l’opposition si bien qu’il ne se remet jamais en cause.

En tout cas, "cette tentative d’assassinat" doit sonner comme un avertissement. Lui qui, manifestement, voyait venir le danger en découchant la nuit, aurait pu passer de vie à trépas si les assaillants avaient réussi leur basse besogne. Mais ce qui paraît invraisemblable, c’est quand le président Condé affirme tout de go que les assaillants ne pouvaient pas faire un coup d’Etat parce que, dit-il, ils n’en ont pas les capacités, alors qu’on sait bien que sa résidence a été attaquée au bazooka et à la roquette RPG7. Où ont-ils eu ces armes lourdes ? Comment ont-ils pu ourdir leur coup ? Condé doit aller à l’école du président ivoirien Alassane Dramane Ouattara qui, en dépit du contexte sociopolitique délétère, et des entoulourpes à lui tendues, met le pied à l’étrier de la réconciliation nationale. C’est ce à quoi s’attendent également les Guinéens qui pensaient in fine avoir tourné définitivement la page de l’instabilité.

Hélas, les attentes demeurent toujours nombreuses. Et il urge de les satisfaire. Quoi qu’il en soit, ce récent incident ne doit pas donner lieu à une chasse aux sorcières ou à un règlement de comptes dans une Guinée où les tensions communautaires ont pignon sur rue. Pour cela, Condé doit aller au charbon en annonçant un vrai dialogue qui pourra gommer tous ces clivages ethno-régionalistes.

Boundi OUOBA

Le Pays

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