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UTILISATION ANARCHIQUE DU CYANURE ET DU MERCURE : Une menace écologique pour le Burkina

Publié le jeudi 21 juillet 2011 à 02h21min

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Jamais les rejets sur les sites miniers n’ont été convoités à ce point dans tout le Burkina. Dans le contexte de la crise sociopolitique qu’à connue le Burkina, la chienlit s’est installée dans le secteur minier. Et malgré l’arrêté interdisant l’orpaillage à partir du mois de juin de chaque année, ça travaille sur les sites d’exploitation artisanale de l’Est à l’Ouest et du Nord au Sud. Tout cela sans que l’Etat ne les en dissuade. Le plus grave, c’est qu’avec l’utilisation des produits toxiques comme le cyanure pour traiter le minerai, les orpailleurs font courir le risque d’une catastrophe écologique au Burkina.

Fandiora. Cette bourgade située à 30 km de Banfora va-t-elle se réveiller un matin avec des cours d’eau complètement pollués ? Le risque est grand, selon des sources proches des services de l’environnement dans la zone. Ce serait la conséquence d’une bataille judiciaire pour le contrôle des rejets des sites aurifères de Fandiora. Au centre de cette affaire, il y a d’une part, l’ingénieur des mines, Aristide Boudo, détenteur de 3 autorisations d’exploitation artisanale des sites aurifères de Daramandougou 1, de Wuoné et Wuo-Panga depuis 2003 et renouvelés en 2009 par la direction générale des mines, de la géologie et des carrières du Burkina.

D’autre part, il y a trois orpailleurs, à savoir Rasmané Ouédraogo, Ousséni Ouédraogo et Hassami Kaboré, qui, en décembre 2010, font comparaître Aristide Boudo devant le tribunal de Banfora, pour « obtenir l’enlèvement des terres provenant des trous du site aurifère de Fandiora ». Ceux-ci soutiennent devant le juge qu’ils se sont installés sur le site avant le sieur Boudo (en 2002) et qu’ils ont, par la suite, acheté des tas de sable avec le chef coutumier de Fandiora et le conseiller du village pour un montant de 20 millions de FCFA. Aux termes des débats, le juge Zoumana Tindé, président du TGI de Banfora, constatant l’existence d’une convention de vente entre les orpailleurs et le chef du village de Fandiora, a ordonné l’enlèvement des rejets querellés par les requérants.

Les rejets traités avec des produits interdits

Aristide Boudo fait appel de cette décision à Bobo mais il sera également débouté. Pendant ce temps, les 3 orpailleurs au lieu de s’en tenir à la décision de justice, enlèvent d’autres rejets non concernés. Aristide Boudo se retourne contre eux avec une plainte pour vol. Et même s’il gagne son procès en mars 2001, il n’aura son attestation d’ordonnance de référé que le 18 mai dernier. Près du site aurifère de Fandiora, les orpailleurs avaient commencé à traiter les rejets avec des produits interdits comme le cyanure. Au mépris des textes en vigueur. Que dit le Code minier ? Deux problèmes peuvent être relevés dans la situation. D’abord, l’enlèvement des rejets pose problème même si le tribunal a donné raison aux orpailleurs. En effet, les produits du sol et du sous-sol appartiennent à Aristide Boudo depuis 2003, date de l’acquisition de ses autorisations d’exploitation artisanale des sites aurifères de Daramandougou 1, de Wuoné et Wuo-Panga.

Dans l’esprit du Code minier, c’est lui qui est responsable devant l’Etat et, à ce titre, il lui est imposé des obligations au plan social, sécuritaire et environnemental. On ne peut donc déménager des rejets sur un autre site et on ne peut les exploiter sans une autorisation ; c’est ce que dit l’article 62 du Code minier : "L’exploitation autre que minière des masses constituées par les haldes, terrils de mines et par les résidus d’exploitation de carrières est soumise à une autorisation d’exploitation lorsqu’elle est entreprise par toute personne autre que le titulaire d’un permis d’exploitation ou le bénéficiaire d’une autorisation d’exploitation pour la superficie où se trouvent ces masses. Toutefois, ce dernier doit en faire la déclaration à l’Administration des mines".

Faire respecter les lois

C’est donc au mépris de la règlementation minière que les orpailleurs opèrent tranquillement dans la zone sans aucun égard pour l’environnement. Selon les services de l’environnement, c’est toute la Comoé qui est en danger. En effet, les exploitants artisanaux s’installent souvent à côté des cours d’eau et des puits pour traiter leur minerai. Quand on connaît la dangerosité du cyanure et du mercure, on peut imaginer les conséquences que ces activités interdites par la loi pourraient avoir sur la santé humaine et animale. C’est pourquoi, le ministère des Mines, des Carrières et de l’Energie doit impérativement entreprendre un certain nombre d’actions. Il s’agit d’abord de sensibiliser les autorités politiques, administratives, judiciaires et policières sur le Code minier afin que chacun sache où s’arrête ses prérogatives. "Nul n’est censé ignorer la loi".

Ensuite, le département doit se donner les moyens de faire respecter les lois dont il est chargé de l’application. En effet, l’arrêté interministériel (ministères en charge des mines, de l’Administration territoriale et de la sécurité) interdisant l’orpaillage en saison pluvieuse court du 1er juin au 31 octobre de chaque année. Deux zones sont définies. Pour la première, (Régions de la Boucle du Mouhoun, des Cascades du Centre-Sud, du Centre-Ouest, du Centre-Sud, des Hauts-Bassins et du Sud-Ouest) l’activité est interdite du 1er juin au 31 octobre. Pour la 2e zone (Régions du Centre, du Centre-Nord, du Nord, du Plateau cental, du Sahel et de l’Est), la période concernée se situe entre le 30 juin et le 30 septembre. Mais, les premiers concernés ont décidé de jouer les hors-la-loi au vu et au su de tout le monde.

Il ne faudrait donc pas s’étonner que les éboulements sur les sites d’orpaillage ne s’arrêtent pas parce qu’il ne faut pas compter sur les orpailleurs pour respecter les règles de sécurité. Au lieu de visiter les grandes mines, le ministre Salif Kaboré a intérêt à diligenter des sorties sur tout le territoire national pour fermer les sites d’orpaillage où l’on continue de travailler jour et nuit.

Dayang-ne-Wendé P. SILGA

Le Pays

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