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Sud-Soudan : A peine indépendants et déjà « non grata »

Publié le vendredi 15 juillet 2011 à 03h15min

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Les Sud-Soudanais n’ont pas fini de se remettre de la liesse populaire qu’ils ont connue, il y a seulement quelques jours lors de la proclamation de leur indépendance du 9 juillet 2011, que déjà se présente une difficulté de taille, que la toute jeune république se devra de résoudre :

Le Parlement du puissant voisin du nord, le Soudan, a voté, mercredi 13 juillet, une loi retirant la nationalité soudanaise aux sudistes. Si l’on se rappelle que le gouvernement de Khartoum avait déjà exclu la double nationalité pour ces mêmes sudistes qui résideraient au nord après l’indépendance, allant même jusqu’à instituer l’obligation d’un permis de travail et de résidence pour ceux d’entre eux qui choisiraient tout de même de vivre au Soudan, on se rend vite à l’évidence que la république qui vient de naître devra faire face à sa toute première équation d’Etat indépendant, et elle n’est pas des moindres.

En dépit du retour progressif de près de 400 000 sudistes observé depuis quelques mois, il reste tout de même plus d’un million de Sud-Soudanais présents sur le territoire du voisin du nord. Et, au regard de l’état d’indigence de la république naissante, le rapatriement de tous ces ressortissants dans les délais impartis ne se fera pas sans de gros inconvénients, même si l’on apprécie que le Soudan leur accorde un délai de grâce de 9 mois pour « régler toutes leurs affaires ».

La décision, vue sous l’angle de la légalité, est pratiquement inattaquable. On est Soudanais ou on est Sud-Soudanais ; les choses sont claires et il n’existe pas d’amalgame possible. Mais une autre analyse laisse voir que la mesure traduit quelque part quelque regret manifeste du Soudan, lequel se voit privé désormais de cette partie de son territoire qui s’apparentait à la poule aux œufs d’or ; car, enfin, on comprend plutôt mal que ce Béchir qui a assisté en personne aux festivités de la proclamation de l’indépendance de son voisin du Sud, a multiplié les propos conciliants à la naissance de ce jeune Etat il y a juste quelques jours, aujourd’hui décide de ce qui n’est ni plus ni moins qu’une expulsion de son territoire de ces populations d’un Etat nouveau-né qui, visiblement, se cherche et mettra un certain temps à voler de ses propres ailes. On avait pensé que Khartoum ravalerait quelque peu son ressentiment -quelque peu légitime, il faut le reconnaître- et songerait à de saines relations de bon voisinage. La première estocade portée au Sud-Soudan n’en montre pas le chemin.

Et pourtant, on a là, désormais, deux Etats indépendants qui ont besoin l’un de l’autre pour prospérer économiquement. On ne voit pas comment envisager un quelconque avenir à l’un ou l’autre sans une coopération loyale entre les deux pays. Tous les deux comptent sur l’or noir ; 70% de cet or noir se retrouvant au sud tandis que pipelines, terminaux pétroliers, raffineries et débouchés maritimes se situent au nord, des accords bien ficelés devraient permettre aux deux nations de profiter amplement des retombées de la vente de ce pétrole que, par ailleurs, d’autres pays leur envient.

En attendant, c’est bien le Sud-Soudan qui, en ce moment, a l’obligation de trouver la solution idoine à son problème de l’heure : comment rapatrier tant de monde en si peu de temps et avec si peu de moyens ?

Une lueur d’espoir cependant demeure : la communauté internationale, avec à sa tête des ténors tels les Etats-Unis, la Chine, la Russie, l’Union Européenne, s’est empressée de reconnaître ce nouveau pays africain, tous ont salué le 193e Etat de la planète et se sont réjouis par avance de son adhésion prochaine à l’ONU. Il leur reste cependant à se montrer plus concrets : le Sud-Soudan naissant, figurant parmi les pays les plus pauvres au monde, a besoin, pour se consolider, de plus que des mots. En dépit de ses richesses virtuelles, il manque, en ce moment, de tout. Pour commencer, on pourrait déjà lui venir en aide en donnant le nécessaire coup de main pour rapatrier ses ressortissants, désormais étrangers au pays de Béchir.

Jean Claude Kongo

L’Observateur Paalga

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