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Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

Publié le jeudi 14 juillet 2011 à 02h53min

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Le rapport télévisuel des phases terminales des travaux du CCRP donne la position suivante : Abstention des chefs coutumiers de la politique. Nous pensons que ceci est une aberration d’autant plus qu’aujourd’hui, on encourage un développement intégré aux cultures locales dans les pays du Sud et des sociétés humaines en général.

En outre, une telle proposition va à l’encontre de la souveraineté des pays africains dépersonnalisés par l’asservissement aux colonisations occidentales (la France et l’Angleterre en particulier).

En effet, la colonisation a été mise en route en activant une politique de néantisation des autorités locales de ce temps ; elles étaient mises sous cloche, décapitées ou déportées (confère nos livres d’histoire).

Les autorités traditionnelles que l’on appelle aujourd’hui chefs coutumiers, étaient les garants des politiques africaines d’Hier. Sans leurs résistances et leur abnégation, il y a longtemps que l’Africain avait cessé d’avoir une langue.

Dire aujourd’hui, cinquante ans après les indépendances, qu’elles devraient rester muettes en ce qui concernent la politique gouvernementale au Burkina Faso, c’est revenir 150 ans en arrière.

L’institution d’un Sénat ne résoudrait pas le problème si dans ce Sénat, y sera installées des personnalités d’obédience occidentale. Multiplier le nombre de sièges pour le partage du gâteau aux mêmes qui roulent leur bosse depuis un certain temps ne résout pas la crise structo-socio-statutaire qui a secoué notre pays.

Nous croyons savoir que le président Blaise Compaoré lui-même s’est entouré de chefs traditionnels tout récemment ! Si ces autorités qui diligentent une grande partie des populations rurales étaient inutile sur le plan politique, pourquoi cette ouverture ? Pourquoi ceux qui sont au pouvoir ne veulent plus le quitter ? Nous savons tous que c’est le lieu du mieux-être par excellence en Afrique. Le cas des chefs traditionnels, véritables représentants des peuples en Afrique, doivent intégrer une structure qui ne les lèse pas.

Il est temps que nous arrêtons de faire l’autruche. Le Burkina Faso comme tous les pays africains ont besoin de réformes structurelles sur tous les plans. L’imitation servile de l’Occident ne fera que nous tuer davantage, enlevant pour de bon tout avenir aux générations futures.

Car, fondamentalement, les sociétés africaines méritent d’exister par elles-mêmes ; toutes les structures (gouvernement, éducation, recherche, santé, élevage, agriculture, etc.) doivent être gérées par des paramètres propres à nos sociétés.

Ces réformes auraient dû être mises en chantier au lendemain des indépendances, mais on n’a fait qu’être mis en selle par le colonisateur, le remplacer et gérer les affaires courantes, sans jamais chercher à régler les problèmes de fonds. Sans jamais chercher à nous asseoir vraiment par nos moyens et pour le développement de nos sociétés.

L’initiation s’opère par la renaissance, et la renaissance est un cycle long et douloureux pour une reconstruction totale qui passe inéluctablement par la déconstruction de la structure. Le problème n’est pas seulement au niveau de la gouvernance, mais également les structures archaïques léguées par le colonisateur doivent être repensées pour servir le grand nombre.

Evitons des décisions prématurées sur les questions de gouvernance, car les institutions qui sont déjà là, ne sont même pas encore exécutées convenablement. Plusieurs structures établies gagneraient à être revisitées pour une assise plus harmonieuse au service de la personne et de la société.

Evitons une fois de plus la poussière aux yeux, car c’est à nous-mêmes que nous infligions le « couac ».

Nous sommes pour un dialogue ouvert sur un développement intégré aux cultures locales. Pour les questions de gouvernance, il est important que toutes les forces vives apportent leur contribution pour l’édifice commun, les seules voix partisanes ne sauraient construire une nation viable.

Je vous remercie d’avoir prêté attention à cette voix qui n’a décidé de s’exprimer qu’après des années d’étude sur la question du développement de sociétés africaines hybrides.

Votre serviteur :

Kantiébo R Edjou Djomniyo

Docteur en anthropologie

Présidente de Zanadoan

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 14 juillet 2011 à 05:11, par Derme En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

    Madame,

    En ma qualité de simple citoyen de mon pays et sans aucun diplôme en anthropologie, je me permets de donner un point de vue contraire à votre si belle analyse.La place des chefs coutumiers est au palais ou au nayiiri. Nos chefs traditionnels sont le dernier rempart dans nos sociétés africaines.a une certaine époque, ils étaient craints, respectés quand bien même ils n’avaient pas de richesse. Aujourd’hui, nos chefs traditionnels, sont trainés dans la boue et perdent l’estime des populations sensées les aimer et ce à cause de leur implication dans la politique.je souhaite que les chefs restent là où les sujets les ont "élus" pour rester, c’est à dire au nayiiri.C’est en celà qu’ils retrouveront leur légitimité et leur respect, qui sans aucun doute sera d’un grand apport dans la régulation de nos sociétés.

    • Le 5 juin 2014 à 15:06, par Dr kantiebo En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

      Monsieur Derme, merci de vous intéresser au sujet, mais sachez que la chefferie traditionnelle n’est pas une vitrine mais une structure politique. Les chefs traditionnels travaillent pour ce pourquoi ils ont été nommés, diriger et travailler à l’épanouissement de leur société. Ce n’est pas en restant les bras croisés, regardant les politiques leur prendre tout qu’ils seront utiles. Je pense qu’il faut aménager un plan structurel qui les prennent en compte honorablement et non les voir comme un rempart d’une tradition qui elle même est piétinée dans ses fondements mêmes. Excusez cette réponse tardive monsieur mais je crois que le chantier de la construction de notre pays est ouvert et cette brique pourrait servir car rien n’est vraiment fait encore en ce qui concerne nos démocraties africaines balbutiantes. Il faut faire confiance aux chefs traditionnels au lieu de ne les consulter que pendant les élections. Une assemblée des chefs traditionnels non dirigée par des politiques pourrait valablement travailler mieux que le sénat que les politiques cherchent à mettre en scelle malgré les frais exhorbitants à sacrifier.

  • Le 14 juillet 2011 à 09:47, par Le Gonze En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

    Je ne suis pas d’avis avec vous, docteur Kontiébo. Il faut justement les écarter car ils constitutent une partie du "problème" Burkinabé...

    Ils se sont laissé entrainer dans des dédales dont ils ne peuvent ressortir indemmes !

  • Le 14 juillet 2011 à 11:29 En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

    Sauf votre respect Dr, je crois que vous abordez le sujet du mauvais côté. Vous, moi, tous autant que nous sommes faisons de la politique dans nos relations avec nos familles, amis collègues, connaissances etc. On ne peut interdire cela à personne ! Mais ce qui pose problème est la possibilité qu’on donne aux chefs coutumiers de se présenter aux élections municipales, législatives ...

    • Le 5 juin 2014 à 15:13, par Dr kantiebo En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

      Monsieur, si vous voulez préserver les chefs coutumiers, il faudra penser une structure par laquelle ils participeront à la politique officielle du pays. Nous savons tous que ces personnes sont utiles et travaillent pour la société ; pourquoi ne pas les inclure dans un plan structurel où ils seront reconnus comme tel et auront une enveloppe attitrée pour ce qu’ils sont et font. Le débat est ouvert pour la constitution de nouvelles structures viables pour nos sociétés.

  • Le 14 juillet 2011 à 11:32, par Un autre Koro En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

    Merci Princesse de Bonyolo.
    Relevez aussi la servilité, le tubedigestivisme des chefs coutumiers ou du moins d’une large majorité des chefs coutumiers qui n’écoutent que leur ventre et leur portefeuille.

  • Le 14 juillet 2011 à 11:47 En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

    Dr, personne n’écarte les chefs coutumiers. On leur dit tout simplement de jouer leur rôle de fédérateurs, au-dessus de la mêlée. Que vaut l’autorité d’un chef coutumier partisan sur un de ses sujets qui est opposant, notamment lorsqu’on est en droit d’interpréter sa décision comme étant politique ? Si les successions a la chefferie traditionnelle commencent a poser problème au point de devenir une préoccupation nationale c’est du au fait de l’ingérence des politiques dans ce domaine pour en tirer un profit. Quelle place accorderiez-vous aux sociétés qui sont sans chefs ? On risque de voir des sociétés s’entre-déchirer pour instituer une chefferie qui n’existait pas en leur sein, juste pour pouvoir tirer profit de la nouvelle donne (si tel est qu’on donne satisfaction aux chefs coutumiers). Je pense donc que le moindre mal est d’"écarter les chefs coutumiers" si leur donner plus de dignité s’appelle "les écarter". Fraternellement !

    • Le 5 juin 2014 à 15:34, par Dr kantiebo En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

      Merci de l’intérêt porté à l’article monsieur.
      Vous voyez vous même que les chefs coutumiers ne se sont pas laisser écarter. Je pense qu’ils peuvent intervenir dans la politique de notre pays mais en étant dans une structure créée par l’état ; ainsi ils seront plus ou moins rémunérés pour leur fonction puisqu’elle est utile pour la société. Tout ceci est possible dans un état démocratique. On n’est pas tenu de n’imiter que les structures occidentales, nous pouvons faire une démocratie à l’africaine, ceci serait plus adéquat que la création d’un sénat.

  • Le 15 juillet 2011 à 01:16, par rayan En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

    Depuis longtemps je croyais que l’on avait compris que nos chefs traditionnels ne devaient pas se mêler de la politique partisane. Pour fédérer, il faut être impartial. Comment un chef traditionnel CDP peut-il juger d’un cas où une des parties est un membre du parti sans trancher pour lui ?
    Soyons sérieux ! Que les chefs traditionnels restent dans leurs palais et que quand il n’y a plus de recours entre les hommes, ils interviennent avec les religieux pour apaiser et recoudre.

    • Le 5 juin 2014 à 16:05, par Dr kantiebo En réponse à : Réformes politiques : "N’écartons pas les chefs coutumiers"

      Monsieur Rayan, sauf votre respect, les chefs traditionnels sont des personnes comme vous et moi. Ils doivent vivre de quelque chose. Pourquoi les gens font la politique au Burkina ? C’est pour être des chefs, mais des chefs qui palpent des sous. s’il n’y avait pas d’argent en politique, il n’y aurait pas de politiciens. Les chefs ne gagnent rien que par leur propre sueur, eux qui sont déjà chef. Il faut croire que c’est tantant d’être un chef qui gagne. Bref, il faudra intégrer les chefs dans les appareils d’état, une fois leur enveloppe en poche, ils laisseront le jeu politique aux politiciens puisque, eux, ils sont déjà chefs. Je vous remercie pour la réflexion, car seul, il n’y a pas de débat.

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