LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Thomas Dougherty, ambassadeur des Etats-Unis au Burkina Faso : "Le Burkina Faso est un partenaire constant et fiable"

Publié le lundi 4 juillet 2011 à 01h13min

PARTAGER :                          

Les Etats-Unis d’Amérique commémorent ce lundi 4 juillet 2011, la Déclaration de leur indépendance. Voilà 235 ans que le grand pays de l’Amérique du Nord a pris son destin en main. L’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire des Etats-Unis auprès du Burkina Faso, Thomas Dougherty évoque entre autre, dans cette interview,

la commémoration de cette date du 4 juillet et les axes de coopération bilatérale.

Sidwaya (S.) : Pourquoi commémorez-vous le 4-Juillet à Fada ?

Son Excellence Thomas Dougherty (T.D.) : Afin de commémorer la grande et belle expérience lancée par notre pays le 4 juillet 1776, à savoir la Déclaration d’indépendance, nous avons décidé cette année de lancer notre propre expérience innovante au Burkina Faso. La Déclaration d’indépendance représente le mouvement d’un peuple, et nous avons donc décidé d’acheminer le personnel de notre ambassade vers les populations vivant dans chacune des treize régions du Burkina Faso - et nous avons débuté par Fada N’Gourma. Ce programme visant à rapprocher et solidifier les liens entre nos deux peuples permettra à une équipe d’Américains de l’ambassade de rencontrer les Burkinabè à travers le pays.

Nous serons en mesure de discuter de notre travail avec des citoyens qui ont rarement l’occasion de nous rencontrer à Ouagadougou. Nous espérons apprendre davantage sur leurs préoccupations, leurs attentes et leurs espoirs pour l’avenir. En tant qu’Américains vivant dans un pays constitué de cinquante États différents et tous uniques, nous comprenons qu’un pays ait des besoins et des spécificités très variées - et nous savons que la diversité enrichit et renforce la démocratie. Les équipes de notre ambassade seront en mesure de discuter et d’appuyer les valeurs et les aspirations que nous partageons. Nous bâtirons des ponts entre nos pays, et forgeront des amitiés et des relations de travail.

S. : Après environ 9 mois passés comme ambassadeur au Burkina Faso, quelle appréciation faites-vous des relations qui unissent le Burkina Faso et les Etats-Unis ?

T.D. : D’abord, laissez-moi vous dire que je suis très heureux d’être ici au Burkina Faso. La plupart de ma carrière diplomatique s’est déroulée en Afrique ou à Washington où j’ai travaillé sur les questions africaines. C’est donc un véritable privilège pour moi d’être ici au "Pays des hommes intègres". Grâce au leadership de l’ambassade des Etats-Unis au Burkina Faso et à l’engagement du gouvernement mais aussi du peuple burkinabè pour les réformes économiques et politiques, les relations entre nos pays sont fortes. J’espère tout simplement pouvoir continuer à développer ce partenariat.

Le Burkina Faso est un partenaire constant et fiable, et nous apprécions le rôle constructif que le gouvernement joue pour promouvoir la stabilité régionale. Le Burkina Faso est un partenaire actif et engagé dans la lutte contre l’extrémisme dans la région, et contribue au maintien de la paix à travers trois bataillons et un escadron au Darfour. Notre partenariat porte ses fruits. Par exemple, nous avons actuellement un compact du Millenium challenge corporation d’un montant global de 481 millions de dollars sur cinq ans et un financement considérablement accru de l’USAID. Ce sont des programmes qui bénéficient directement aux populations du Burkina Faso.

S. : Quels sont les principaux domaines d’intervention des Etats-Unis au Burkina Faso ?

T.D. : Notre coopération continue à croître en raison de nos excellentes relations bilatérales ainsi que l’engagement du Burkina Faso à opérer des réformes politiques et économiques. La Mission américaine travaille avec les Burkinabè - à tous les niveaux - qu’ils soient au sein du gouvernement ou de la société civile. Le Millenium challenge corporation, avec ses partenaires burkinabè, a mis en œuvre un compact d’un montant global de 481 millions de dollars sur une durée de cinq ans pour réduire la pauvreté par l’amélioration de l’agriculture, la gestion du foncier rural, la construction de routes et l’éducation. L’USAID a investi des dizaines de millions de dollars dans un large éventail de programmes pour l’éducation, les soins de santé, le développement agricole et la sécurité alimentaire.

La section de la Défense de l’ambassade et les militaires burkinabè travaillent ensemble pour renforcer les capacités de maintien de la paix et offre plusieurs opportunités de formation professionnelle, de missions humanitaires ou médicales. Le personnel du Centre pour le contrôle des maladies apporte un appui au Burkina Faso pour le suivi des programmes de vaccination et le renforcement de la surveillance des maladies ainsi que leur évaluation. Des experts américains du Trésor travaillent côte à côte avec les responsables burkinabè à mettre en œuvre la budgétisation des programmes et à améliorer les prévisions de recettes ; ce qui accroît la transparence fiscale. Notre section économique produit un Guide commercial du pays qui fournit des informations sur le marché et l’économie burkinabè à d’éventuels investisseurs américains, et aide les hommes et femmes d’affaires burkinabè à entrer en contact avec les investisseurs et les marchés américains. Bien que n’étant pas un effort de coopération directe, il est important de noter que plus de 155 volontaires du Corps de la paix vivent et travaillent directement dans les villages burkinabè notamment dans les domaines de la santé, de l’éducation et du développement des petites entreprises.

Nous avons aussi des programmes d’échanges, tels que Fulbright, Humphrey et le Programme de visiteurs internationaux pour le leadership qui sont destinés à favoriser les échanges entre des Américains talentueux et les futurs dirigeants des autres pays. L’objectif de ces programmes est de permettre aux bénéficiaires d’étudier dans nos institutions pour ensuite retourner dans leur pays d’origine et partager leurs connaissances et leurs expériences.

S. : Pourriez-vous décrire mieux les programmes de l’USAID ?

T.D. : Chaque année le peuple américain, à travers l’Agence américaine pour le développement international (USAID), soutient des dizaines de projets au Burkina Faso à hauteur de dizaines de millions de dollars. Cela inclut deux programmes de développement rural d’une durée de cinq années chacun, axés sur les revenus des ménages, l’alimentation et la nutrition. Il existe également un programme de soutien à la production d’un coton de qualité, des systèmes d’alerte qui préviennent la sécheresse et favorisent une meilleure gestion de l’eau. L’USAID a également plusieurs programmes régionaux qui soutiennent l’amélioration du commerce agricole, le marketing et le développement des entreprises au Burkina Faso. L’Initiative du président Obama « Nourrir le futur » lancée l’année dernière englobe et complète ces programmes agricoles en mettant l’accent sur la production des grains alimentaires, leur transformation et leur commercialisation. Trois projets de l’USAID soutiennent directement les efforts du ministère de la Santé visant à étendre la lutte contre le paludisme, offrir des services de planification familiale, prévenir le VIH / SIDA et les maladies tropicales négligées. Nous allons également lancer un nouveau programme cette année pour améliorer l’eau et l’assainissement au Burkina Faso.

Enfin, dans le cadre de l’accord du MCC, le projet de construction des écoles BRIGHT II se poursuit. BRIGHT II continuera le projet initial avec la construction de 132 écoles primaires dans les zones reculées, chacune dotée de salles de classe qui permettront aux élèves de terminer le cycle primaire d’études et proposera des campagnes de mobilisation sociale autour de l’éducation des filles, l’alphabétisation et les programmes des mères-éducatrices. Nous parrainons également un programme de bourses annuelles au profit des filles et avons initié un partenariat sur plusieurs années entre l’institut 2iE de Ouagadoudougou et l’Université de Tuskegee aux Etats-Unis en matière d’eau et de l’ingénierie de l’environnement. Grâce au programme BRIGHT, et dans le cadre de la Journée internationale des femmes, deux jeunes filles burkinabè ont pu voyager aux États-Unis pour participer à des festivités. L’une d’entre elles a même pu rencontrer la Première dame Michelle Obama lors de la cérémonie d’ouverture de l’événement-phare.

S. : A combien estimez-vous l’enveloppe financière consacrée chaque année par le gouvernement américain au développement du Burkina Faso ?

T.D. : Pour citer le président Obama, « notre engagement ne doit pas être mesuré uniquement sur la base des dollars que nous dépensons. Le véritable signe de réussite n’est pas de savoir si nous sommes une source d’aide perpétuelle qui épaule les gens dans le besoin mais de savoir si nous sommes des partenaires dans le renforcement des capacités pour le changement qui transforme ».

Tandis que le montant de l’aide varie, nous constatons que le changement transformationnel intervient à la suite des engagements que nous avons pris au fil des années et qui a pour but d’avoir une incidence directe sur le peuple du Burkina Faso.

Il ya bien sûr les 481 millions de dollars du compact du Millenium challenge corporation qui s’étendra sur une durée de cinq ans. Les programmes de l’USAID investissent également des dizaines de millions de dollars chaque année, et il y a des programmes qui sont financés à travers le département du Trésor américain, le Centre pour le contrôle des maladies, le ministère de la Défense, la Sécurité diplomatique, et d’autres institutions. Le gouvernement américain, à travers l’ambassade, finance de grands projets comme la construction de routes, mais aussi de petits projets comme les forages, l’achat d’outils de jardinage, ou la pose de toits d’écoles.

S. : Le Président américain Barack Obama souhaite des institutions fortes dans les pays africains. Comment le Burkina Faso peut-il renforcer ses institutions ?

T.D. : Les Etats-Unis ont été fondés par des gens qui ont décidé de prendre en main leur destin, des gens qui ont décidé de créer un pays fondé sur les principes fondamentaux de liberté et de justice. En tant que citoyens d’une démocratie, nous avons tous le pouvoir de tenir nos dirigeants responsables de leurs actes, et de bâtir des institutions qui servent le peuple. Pour ce faire, nous devons nous impliquer dans nos gouvernements et ne pas demeurer des spectateurs passifs. Nous devrions chercher à nous informer et nous inscrire pour voter, mais aussi à nous impliquer dans les activités de la société civile.

S. : La question des réformes politiques et institutionnelles préoccupe les Burkinabè. En tant qu’observateur, quelles réformes faut-il, selon vous, au Burkina ?

T.D. : Nous suivons de près les discussions actuelles. En tant qu’observateurs extérieurs, nous espérons et attendons que toutes les réformes politiques proposées reflètent pleinement la volonté du peuple du Burkina Faso.

S. : Vous avez déménagé à Ouaga 2000, un quartier chic mais peu fréquenté par les Ouagalais, en lieu et place de Koulouba, situé au centre de Ouagadougou. Pourquoi cette option d’aller implanter l’ambassade loin des quartiers populaires ?

T.D. : Nous n’avons pas quitté Koulouba ! Oui, l’ambassade a déménagé, mais le Centre culturel américain demeure à Koulouba et nous sommes sur le point d’entamer une rénovation complète du site pour accueillir une nouvelle salle informatique, des conseillers d’orientation et des événements spéciaux, tels que la projection de films, la promotion de la musique et des présentations. Je suis sûr que vous connaissez également le Centre américain de langues sur l’avenue Bassawarga.

Par ailleurs, l’ambassade fait fonctionner trois "Espaces américains" à Bobo Dioulasso, Fada N’Gourma et Zorgho. Ces espaces ont des livres en anglais et en français, des films et des magazines, ainsi que des ordinateurs que les membres peuvent utiliser. Plus tard cette année, quand nous visiterons les communautés burkinabè à travers le « American Roadshow », nous installerons de nombreuses bibliothèques américaines, avec des livres en anglais et en français, des films et des magazines. De plus, nous allons rendre l’accès à Internet disponible dans tous les "Espaces américains".

Avec l’augmentation de nos programmes de coopération au Burkina Faso et l’approfondissement de nos relations bilatérales, notre personnel a augmenté considérablement au cours des dernières années. L’ancienne ambassade de Koulouba n’étant plus à même d’accueillir tous nos employés, nous avons construit une grande ambassade qui reflète notre engagement à long terme avec le Burkina Faso.

S. : Y a-t-il des risques que le Burkina Faso soit parmi les pays ciblés par le réseau terroriste Al-Qaïda ?

T.D. : Il est bien connu qu’AQMI est actif dans la région du Sahel. Le gouvernement burkinabè est à la fois conscient de ce problème et travaille pour faire face aux risques liés à la sécurité des Burkinabè et des expatriés qui vivent ici. En tant que membre du partenariat trans-saharien contre le terrorisme, le gouvernement du Burkina Faso participe à des exercices d’entraînement à la fois au Burkina Faso et dans la région.

S. : Sous couvert de la lutte contre le terrorisme, les Etats-Unis ont étendu leur présence dans le monde entier. L’Afrique restait jusqu’alors un peu de côté mais devait elle-aussi accueillir des bases américaines en Algérie, à Djibouti et à Madagascar à travers le projet Africom. Qu’en est-il exactement ?

T.D. : Juste une précision, les Etats-Unis ont une base à Djibouti, mais pas en Algérie, ni à Madagascar ou ailleurs en Afrique. Cela dit, AFRICOM, ou Africa Command, se consacre exclusivement au continent et s’occupe des relations militaires américaines avec 53 pays africains. L’objectif d’Africom est de travailler avec les gouvernements locaux, en collaboration avec le Département d’État et d’autres structures, pour créer un environnement plus stable qui favorise la croissance politique et économique. Grâce à des programmes de coopération de sécurité tels que l’exercice Flintlock - une opération militaire très réussie - AFRICOM est engagé à aider les nations africaines afin de leur permettre de mieux assurer leur propre défense.

Au Burkina Faso, le gouvernement américain a contribué à former et équiper les trois bataillons burkinabè de maintien de la paix et offrira une formation militaire supplémentaire cette année. Le Burkina Faso fait aussi partie du programme américain de Lutte contre le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne (TSCTP) en vertu duquel l’USAID lance un programme de 5 millions de dollars sur trois années ayant pour but de venir en aide aux jeunes de la région du Sahel peu scolarisés et sous-employés.

Enok KINDO

Sidwaya

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique