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Fait de chez nous : Chaude soirée pour un grin pendant le couvre-feu

Publié le vendredi 17 juin 2011 à 22h49min

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Plus d’une semaine, Doul marche de côté comme un crabe. Ses côtes ainsi que ses jambes ont été lourdement touchées, quand il a pris le mur pour échapper aux coups de celui qui le poursuivait. Doul n’est pas seul à avoir les séquelles de cette soirée chaude dans le grin. Le doyen du grin est lui aussi souffrait, le fait d’être tombé sur son ventre pendant qu’il courait lui aussi pour échapper aux coups de ceinturons des gendarmes. Coïncidence ou une union faite par affinité ? Seuls les éléments du grin peuvent donner une juste réponse à cette question. Ce qui ne souffre pas de débat dans ce groupe, c’est qu’ils sont tous des ventrus. Et selon une source du même grin, aucun d’eux ne pèse moins de 100 kilos. Imaginez donc, un homme de leur gabarit en train de courir !

C’était donc pendant la période du couvre-feu instauré sur le territoire de la commune de Bobo-Dioulasso. Malgré les communiqués du ministère de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité, repris par le gouvernorat des Hauts-Bassins, des citoyens continuaient à circuler en ville aux heures du couvre-feu. Les maquisards et les grins de thé avaient du mal à obéir. Comme nul n’est au dessus de la loi et que le couvre-feu avait été instauré pour la sécurité de tous, la gendarmerie était ferme avec les citoyens hors-la-loi. Doul et ses camarades de grin qui ont pris l’habitude de rester tard devant une concession du quartier, ne se sentaient pas concernés par la mesure.

Les deux premiers jours du couvre-feu, les choses se sont passées comme sur des roulettes pour eux. Tellement sûrs d’eux, ils se moquaient de certains de leurs collègues de service qui obéissaient aux heures du couvre-feu. Ils se sont également moqués des citoyens pris par les hommes de la gendarmerie dans le cadre de leur mission. « Celui qui n’a pas traversé l’autre rive, ne doit pas se moquer de celui qui se noie », dit-on. Ce dicton s’est avéré la troisième nuit du couvre feu pour Doul et ses camarades de grin. Ils avaient tous les yeux braqués sur le damier et chacun encourageait son pote pour gagner la partie de damier.

Seul le fakir du jour s’intéressait à regarder les quelques passants, des hors-la-loi comme les éléments de leur grin. Malheureusement pour le grin, le fakir était allé chercher de l’eau, car celle qui lui servait à faire le thé était finie. Pendant que le groupe était « branché » sur le jeu, le fakir l’interpella. « Les gars, sauvez-vous, la gendarmerie est là ». Cette phrase a causé une panique totale au sein du groupe. Chacun courait comme il le pouvait. Doul qui n’avait plus d’autre choix que de passer par le mur, n’a pas hésité pour le faire. Il a pu franchir le mur. Mais avant de redescendre de l’autre côté, une des briques a lâché. Malheureusement, c’est cette même brique qui lui servait de prise. Dans ces conditions la chute était inévitable. Avec sa masse, il est mal tombé.

Si bien qu’il avait du mal à se relever. Son salut est venu du fait que l’agent de la gendarmerie qui le suivait, avait abandonné quand il a escaladé le mur. Quant au doyen du grin, il a enjambé un fossé. Malheureusement pour lui aussi, il n’a pas pu tenir sur ses jambes et il est tombé sur son ventre comme un enfant qui venait d’être initié à la marche. Il a fallu cette soirée chaude, pour que leur grin obéisse au couvre-feu. Malgré le témoignage de certaines personnes, ce grin continuait de rester dehors. C’est pour nous l’occasion de leur poser cette question d’Isocrate, « les actes ne sont-ils pas des témoignages plus dignes de foi que les paroles » ?

Souro DAO /daosouro@yahoo.fr

L’Express du Faso

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Vos commentaires

  • Le 18 juin 2011 à 01:08 En réponse à : Fait de chez nous : Chaude soirée pour un grin pendant le couvre-feu

    "Comme nul n’est au dessus de la loi et que le couvre-feu avait été instauré pour la sécurité de tous, la gendarmerie était ferme avec les citoyens hors-la-loi."

    Nul n’est au-dessus de la loi, mais quelle loi préconise donc les violences physiques en guise de verbalisation. Et quand ce sont les représentants de cette même loi qui la transgressent, que penser ? Ou alors, ai-je tord et effectivement le gendarme a pleinement le droit d’agresser qui il veut ?

    Il me semble qu’il y a une procédure de prévue pour ceux qui ne respectent pas un couvre-feu, ou bien ? Ne serait-il pas temps, maintenant, une fois pour toute, de vivre avec notre époque ?

  • Le 18 juin 2011 à 14:05, par aliende En réponse à : Fait de chez nous : Chaude soirée pour un grin pendant le couvre-feu

    Tu as raison. Et ce qui est écrit me donne envie de pleurer. Une violence inutile qui s’abat sur nous comme si nous ne sommes rien.
    On n’est abandonné et maltraité par ceux même qui sont sensés nous défendre et nous protéger. C’est vraiment triste quand la loi est violée avec preuve à l’appui et on ne peut rien faire contre. c’est peut-être un des signes de leur faiblesse.
    En tout cas ça ne doit pas continuer si nous voulons un Burkina agréable à vivre !!!

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