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Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

Publié le vendredi 3 juin 2011 à 03h09min

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On peut se convaincre désormais d’une évidence cruelle : la bonne exception de Bobo-Dioulasso aura vécu ! La capitale économique du Pays des hommes intègres avait jusqu’alors vécu presque en marge des récurrentes mutineries intempestives qui minent, depuis de longs mois, Ouagadougou ainsi que la plupart des villes de l’intérieur.

Et on se réjouissait de l’heureuse exception tout en se demandant comment elle avait réussi pareil exploit. On s’était perdu en conjectures, certains expliquant le fait par la bonne vista des autorités politiques et militaires qui y étaient en poste, d’autres l’attribuant à la sagesse ancestrale incarnée par les silures du Houet protecteurs de la ville de Sya. Mais de toute évidence, tous ces parieurs auront eu faux : la soldatesque bobolaise a décidé d’enterrer la bonne exception. Dans la nuit du mardi 31 mai au 1er juin, les bisasses de Bobo sont, à leur tour, entrés dans la danse macabre.

Et ce qui en résultat fut au moins aussi catastrophique que ce que firent, avant eux, leurs compagnons d’armes des autres villes burkinabè : tirs nourris d’armes à feu, violences et pillages furent pratiqués sans retenue et eurent pour effet de terroriser une population surprise qui se croyait à l’abri, épargnée qu’elle était, dans cette cité du Houet qui, jusqu’alors, avait été présentée comme l’îlot de paix entourée d’une multitude de casernes en ébullition.

A l’heure où nous tracions ces lignes, des hommes en treillis quadrillaient les artères de la ville de Sya. Tout est accompli : avec l’entrée en scène des casernes de Bobo et de Dédougou, la boucle est désormais bouclée. L’onde de la mutinerie aura gagné quasiment toutes les casernes militaires de l’ensemble du pays. Ceux qui s’attendaient à une vague accalmie n’auront plus que leurs yeux pour pleurer.

C’est peu de le dire, au Pays des hommes intègres, l’indignation est à son comble dans toutes les couches sociales, et tout le monde se pose de cruciales interrogations : qui sont ces militaires qui prennent les civils pour des canards sauvages qu’ils pillent et sur lesquels ils tirent dès que l’envie leur prend ? Quelle est leur morale, et quelle est leur philosophie ? Et c’est quoi, au final, cette grande muette qui se comporte comme une vilaine horde de soudards incontrôlés, lesquels se repaissent de butin scandaleusement volé dans les boutiques et sur les étals d’honnêtes citoyens ?

Et surtout, surtout, combien de temps durera encore cette psychose qu’on nous impose et qui nous refuse jusqu’à la possibilité de mettre le nez dehors en toute quiétude ? On continue de se demander qui est réellement derrière toute cette chienlit qui a fini de faire son lit au Burkina Faso. Existe-t-il un grand manipulateur caché qui coordonne tout cela, retranché et bien caché dans quelque angle mort ? S’agit-il d’une bien mystérieuse nébuleuse à l’efficacité redoutable ? Ou alors, doit-on parler de fatalité ?

Les dieux auront-ils choisi de punir les habitants de ce pays pour quelque faute passée qui demeure inexpiée ? Si oui, laquelle ? En tout état de cause, et quel que soit l’auteur de ces funestes manifestations de violences gratuite, on l’imagine, l’effet recherché par le sinistre manipulateur peine à demeurer masqué : on recherche le pourrissement du climat social ; et pour l’obtenir, on énerve, on harcèle, on exaspère ; on tient à pousser à la faute.

Les civils déjà sont tombés dans le piège : ce sont eux qui, en représailles des exactions des militaires, ont brûlé des édifices ainsi que des sièges de partis. On le comprend, leur ras-le-bol. Plus inquiétant, le gouvernement lui-même qui commence à donner des signes de nervosité. La récente sortie du ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement laisse percevoir que l’appareil d’Etat commence, lui aussi, à avoir marre de ces désordres à répétition : il fait volontiers état de « surenchère » à laquelle on ne peut pas céder.

Le tout dernier conseil des ministres parle, lui, de « mesures en vue du rétablissement de l’autorité de l’Etat ». De quelle nature seront-elles ? Jusqu’où ira le gouvernement ? Peut-on éviter l’affrontement ? Comment les garnisons accueilleront-elles une quelconque tentative initiée par l’Etat en vue d’une restauration de l’ordre ? On devra attendre pour le savoir. Mais déjà on est en droit de faire le constat suivant : à supposer que la grande muette cherche à s’en prendre à Blaise Compaoré et à son régime, elle doit avoir le courage d’appeler un chat un chat : elle sait où trouver l’un et l’autre.

Le malaise social ressenti par les Burkinabè (vie chère, corruption, dossiers pendants…) ne saurait accorder quelque excuse absolutoire au comportement des bidasses qui, de plus en plus, frise le plus pur des gangstérismes, qui s’en prend impunément à des hommes, des femmes et enfants, tous civils désarmés qui, en désespoir de cause, ne savent plus à quel armée se vouer. Malheureusement, nul ne sait vraiment pour combien de temps encore ce psychodrame vécu à l’échelle nationale durera. On en arrive même à se demander à quoi sert réellement une armée de cet acabit. Mieux vaut être seul que mal accompagné, conseille la sagesse populaire.

Si la grande muette burkinabé, en un ultime sursaut d’orgueil, choisit de se saborder ou de se faire hara-kiri pour renaître de ses cendres, recyclée en éléments de police, de gardes forestiers ou de sapeurs-pompiers, elle aura au moins le mérite de redorer son blason et surtout remportera un gigantesque standing-ovation de la part de l’ensemble de cette population qu’en ce moment elle « victimise », torture et terrorise à l’envi. Mais même là, subsiste une bien lancinante interrogation : l’armée burkinabè est-elle, à l’heure actuelle, capable de cette saine introspection ? Si oui, nous avons encore quelque chance de nous en sortir. Sinon ? Nous serons tous condamnés à boire le calice ; et il faudra le boire jusqu’à la lie… alors, on touche du bois !

Jean Claude Kongo

L’Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 3 juin 2011 à 10:14, par Ben En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    Sont ils contre le pouvoir ou le peuple ?
    S’ils pensent que le pays n’est pas bien gouverné alors ils doivent passer à l’action et faire tomber Blaise au lieu de terroriser les populations.
    Si ces agissements continuent les populations vont créer leurs propres milices qui affronteront ces bidasses sans scrupule.

  • Le 3 juin 2011 à 10:26, par Pakd Zanga En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    Avoir le courage d’appeler un chat un chat

  • Le 3 juin 2011 à 10:27, par Pusga En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    Mr Kongo, com dab vous faîtes honneur à la plume. Très bel article !

  • Le 3 juin 2011 à 11:21, par Sam En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    Je crois qu’il faut mettre le burkina sous tutelle de l’O.N.U.
    en attendant de voir le cas de ces VOLEURS

  • Le 3 juin 2011 à 13:19, par Nabangue En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    Tous les burkinabè honnêtes sont déçus du comportement des militaires. Que faut-il faire ?
    1- arrêter tout recrutement de militaire au Faso ;
    2- arrêter tout aprovisionnement des casernes en munitions et en armes ;
    1- suspendre intégralement les salaires de ces voyoux et proceder au dedomagement des victimes jusqu’à concurences des dégats causés ;
    4- faire appel à une armée étrangère pour affronter ces délinquants et les décimer complètement ;
    En attendant, le gyrocopteur pourrait survoler les manifestants et "descendre" un à un ces coupeurs de route !
    Voici mes solutions !

    • Le 3 juin 2011 à 19:24 En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

      L’ARME N’EST PAS UN ARMOIRE.DANS UN ARMOIRE ON PEUT FAIRE ET METTRE TOUT CE QU’ON VEUT.LES MUTINS A BOBO NE SONT PAS DANS L’ARMÉE MAIS......BRAVO AU P.F.APPLIQUER LA POLITIQUE DE LA CAROTTE ET DU BÂTON.ENCOURAGER CEUX QU’ILS VEULENT TRAVAILLER !!!!!!

  • Le 3 juin 2011 à 14:41, par LE PACIFIQUE En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    JE PENSE QUE NOUS SOMMES TOUS FATIGUE DE CETTE SITUATION QUE NOUS CIVIL NOUS VIVONS .
    LES MILITAIRES PENSENT QUE L ARME EST LE SEUL MOYENS POUR FAIRE VALOIRE ET FAIRES LA FORCE AU PEUPLE . C EST UNE ERREURE MONUMENTAL.
    LA REACTION DES CIVILS LEUR SERA FATAL MALGRE LEURS ARMES.
    JE LANCE UN APPELLE A TOUT LES CIVILS . COMME LES MILITAIRES NE NOUS CONSIDERE PLUS COMME LEURS FRERE ALORS NOUS AUSSI NOUS LES CONNAISSONS PLUS .
    COMMENSSONS PAR CES PETITS ACTES
    *EXPLUSER TOUS LES MILITAIRES QUI SONT EN LOCATION DANS VOS MAISON
    *A TOUS LES BOUTIQUIERS REFUSER DE VENDRE QUOI QUE SE SOIT AUX MILITAIRES DANS VOS QUARTIERS
    * NE DONNER PLUS DE CREDIT AUX MILITAIRES
    * LES TAXIMAN REFUSER DE PRENDRE UN MILITAIRE DANS VOS TAXI*
    *AU NIVEAU DES STATION SERVICES REFUSER DE SERVIR DE L ESSENCE AU MILITAIRES.
    COMMENSSONS PAR CES PETIT MESURE D4ABORD VOUS VEREZ QUE SA PORTERA FRUIT. NOUS SOMMES FATIGUE NOUS VOULONS JUSTE LA QUIETUGE POUR CHERCHER NOTRE PAIN QUOTIDIEN
    NOUS LANCERONS DANS QUELQUE JOUR D AUTRE MOTS D ORDRES.
    NOUS N AVONS PAS D ARMES MAIS NOUS AVONS NOS TETE POUR REFLECHIRE

  • Le 5 juin 2011 à 22:04, par tranber depui laftown En réponse à : Mutineries : Armée burkinabè, que nous veux-tu à la fin ?

    mieu vaut un bon soldat valeureuxx que 1000 soldats voyou.il fodra fodra former un nombre reduit de bon soldat ayant le sens du devoir ,de la discipline et de l’engagement pour sa patrie au lieu de former des soldats qui n’aspirent qu’au luxe et a la satisfaction des caprice de leur ventre balonné par des excès de repas riche en calorie et un defaut de sport quotidien.dans l’immediat il fodra dc refaire une revue d’effectif pour extraire la vermine de notre armée.

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