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ADO : Maintenant, il faut faire vite et bien !

Publié le lundi 23 mai 2011 à 02h42min

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Acte 1 : prestation de serment d’Alassane Dramane Ouattara le 5 mai 2011 ; acte II : investiture de ce dernier le 21 mai devant le ban et l’arrière-ban des sommités du monde entier ; ce qui n’est pas sans rappeler l’investiture d’un grand président de France il y a 30 ans le 21 mai 1981, François Mitterrand. 21 mai, date fétiche ?

L’enfant de Dimbokro sera-t-il à la Côte d’Ivoire ce que celui de Jarnac fut pour l’Hexagone ? Cet événement aurait pu être célébré en une seule fois en vertu de l’article 39 de la Constitution ivoirienne, mais il a été subdivisé pour permettre à cette communauté internationale d’être présente à cette célébration de la renaissance ivoirienne et de la démocratie.

On lui doit bien ça à cette communauté, sans laquelle la Côte d’Ivoire serait toujours en proie à la guerre civile postélectorale. Et que dire même du travail titanesque abattu avant les 1er et second tour de ce scrutin majeur ? 23 chefs d’Etat et une soixantaine de délégations ont fait le déplacement à Yamoussoukro, et plus de 20 milliards ont été dépensés pour cette cérémonie.

Pour un pays qui émerge des méandres d’une longue crise, était-ce nécessaire de faire de telles dépenses somptuaires ? Certes l’événement est unique et il fallait mettre les petits plats dans les grands, et la Côte d’Ivoire reste la Côte d’Ivoire, mais le coût de cette investiture paraît exorbitant. Si on y ajoute celui de l’élection qui fut la plus chère de la sous-région ces dernières décennies...

Mais enfin un nouveau départ du pachyderme sous-régional vaut bien quelques milliards. Premier symbole de l’ébauche de cette Côte d’Ivoire de l’après-Houphouët, le choix de Yamoussoukro pour cette investiture.

De Grand-Bassam, la première capitale (1893), bâtie sur les confluents du fleuve Comoé, à Abidjan (1933) en passant par Bingerville (1990), les centres de décisions politiques et administrative du pays eurent tous des avantages comparés : passage vers les pays de l’intérieur, en ce qui concerne Grand-Bassam, hommage au gouverneur Binger pour Bingerville, site salubre et propice aux grandes infrastructures pour Abidjan.

Yamoussoukro a aussi son histoire, comme choix pour être le hub politique : lorsqu’en 1983, le père de la Nation décida du transfert de la capitale vers ce qui n’était alors qu’une bourgade située à 240 km au nord d’Abidjan, ce fut scepticisme et raillerie, même du refus de la part de certains de ces compatriotes, notamment son irréductible opposant d’alors, Laurent Gbagbo, qui était contre ce projet, en particulier “la transformation du village d’Houphouët en capitale”.

Pourtant, c’est le même Gbagbo qui confiera la réalisation des travaux à l’architecte Pierre Fakhoury, et qui fera sortir de terre le Palais présidentiel, le Sénat, l’Assemblée nationale...

Ironie de l’histoire, Houphouët ne verra pas son rêve se réaliser (sauf en ce qui concerne la basilique), mais là où il est, il doit être fier de voir que son fils spirituel ADO y sera pour diriger sa chère Côte d’Ivoire.

Le second symbole réside dans le discours inaugural du nouveau président. Avec son débit posé, ADO a déroulé ce qu’il ferait de la Côte d’Ivoire les 5 prochaines années, non sans avoir remercié les partenaires pour sa victoire, en particulier la France à travers Nicolas Sarkozy, véritable guest star de cette cérémonie, le facilitateur, Blaise Compaoré, le Nigérian Goodluck Jonathan, président en exercice de la CEDEAO, l’ONU et son chef, Banki-moon, ainsi que l’aîné Abdoulaye Wade. Obama, le grand absent, a aussi été salué.

Deux gros chantiers attendent le champion du RHDP : la reconstruction et la réconciliation, autrement dit un travail matériel et spirituel. Il lui faudra œuvrer à faire décoller l’économie, exsangue, pour que le pays retrouve son lustre d’antan ; car un bilan des successeurs d’Houphouët met à nu le fait que les Ivoiriens ont toujours vécu sur ce qu’a construit le “vieux”. Pratiquement aucune plus-value ne s’y est notablement ajoutée après le passage du président-planteur.

Il faut de l’argent, mais ADO et la Côte d’Ivoire sont crédibles, et Dieu seul sait que les bailleurs de fonds vont ouvrir les vannes pour inonder la lagune Ebrié de “feuilles” à commencer par les PTF, les partenaires techniques et financiers.

Mais le plus dur pour le président ADO sera de raccommoder les lambeaux dans les cœurs. Le constat de l’après-crise postélectorale est que le “vouloir vivre ensemble”, un des fondements, selon Ernest Renan, pour former une Nation a foutu le camp en Côte d’Ivoire. La réconciliation est un impératif immédiat pour le 5e président ivoirien.

De ce fait, la commission “Dialogue, vérité et réconciliation”, présidée par l’ex-PM Charles Konan Banny, est le prélude à un nouveau rapprochement de tous les Ivoiriens.

De même, sa disposition à ce que justice, y compris celle de la CPI, se fasse participe de cette volonté d’apaisement, d’où cet appel réitéré à la Fondation Houphouët-Boigny pour la paix : “Panser les plaies, expier les fautes individuelles et collectives, écrire une nouvelle page ; de cette catharsis doit émerger une Côte d’Ivoire nouvelle”.

Pour cela, la chasse aux sorcières ne doit pas avoir cours. Qu’il œuvre à ce que les relents communautaires cessent, que, par exemple, il mette fin à ce sentiment de Bété d’être les mal-aimés actuellement en Côte d’Ivoire. ADO devra faire toutes ces choses vite et bien, hic et nunc, car l’état de grâce ne va pas durer, et même ceux qui l’ont élu ne peuvent pas se nourrir de promesses électorales, qui n’engagent que ceux qui y croient.

La Rédaction

L’Observateur Paalga

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