LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

SORO-IB : Une querelle de personnes qui menace la république

Publié le jeudi 21 avril 2011 à 23h33min

PARTAGER :                          

Le duel Alassane Dramane Ouattara (ADO) - Laurent Gbagbo est en passe de prendre fin. Par contre, il en est un qui semble prendre le relais au risque de détruire l’image que l’opinion se fait de la république qui se met progressivement en place : la bagarre de chiffonniers à laquelle se livrent les deux légendaires chefs de l’ancienne rébellion du nord ivoirien : Guillaume Soro et lbrahim Coulibaly (IB). Pourquoi donc cette animosité qui semble survivre au temps ?

Dans les négociations en cours en Côte d’Ivoire, IB ferait-il monter les enchères ? A moins que ce ne soit Guillaume Soro qui voudrait profiter de son avantage pour neutraliser définitivement son ancien compagnon ? En tout cas, la chamaillerie entre les deux hommes doit bien faire plaisir à certains de l’ancien camp présidentiel. En revanche, il est loin de faciliter la tâche à ADO. La Côte d’Ivoire commence à renaître, et il faut éviter de semer le trouble et la confusion dans les esprits. Les tiraillements entre Soro et IB sont d’autant plus inadmissibles qu’ils interviennent dans un contexte vraiment flatteur. En effet, tour à tour, d’anciens partisans de Gbagbo, non des moindres, reconnaissent officiellement le nouveau pouvoir et demandent que les armes se taisent.

Cela, n’en déplaise aux oiseaux de mauvais augure. Parmi ces têtes pensantes et dirigeantes du Front populaire ivoirien (FPI), demeurées discrètes jusque-là, figure entre autres le chef du parlement, Mamadou Koulibaly, reconnu comme un des modérés du régime défunt. Comme lui, d’autres cadres du parti et de l’ancien régime, commencent à donner le sentiment que le FPI n’a pas que des inconditionnels à Gbagbo. Il y a bien d’autres voix qui sont conscientes que perdre le pouvoir, ne signifie pas pour autant la fin du monde. Certes, il existe encore quelques poches de résistance, notamment à Yopougon où les échanges de tirs se poursuivent toujours entre les milices pro-Gbagbo et les Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI). Néanmoins, il se dégage le sentiment que non seulement le parlement pourrait reprendre ses activités, mais encore le président du Conseil constitutionnel, Yao N’Dré, pourrait procéder à la prestation de serment du seul chef de l’Etat reconnu des Ivoiriens et de la communauté internationale : ADO.

Tout ceci, au nom de la nécessaire réconciliation nationale, et partant, de la restauration de l’Etat de droit. Aussi convient-il que des frères du nord qui n’en ont pas encore totalement fini avec les suppôts de l’ancien régime, s’abstiennent bien de faire ce que les adversaires politiques ne sont pas encore parvenus à faire : saboter l’œuvre de réconciliation nationale, et surtout de reconstruction de la Côte d’Ivoire. Le moins qu’on puisse dire, c’est que ADO n’a certainement pas besoin de cet autre conflit fratricide. Il apparaît toutefois que seule son intervention pourrait mettre fin à ce jeu sordide entre Soro et IB.

ADO et son régime doivent savoir faire preuve d’égards à IB dont la contribution aura tout de même été décisive dans l’effondrement du régime dictatorial. On doit reconnaître la combativité de ses hommes, laquelle aura permis de sauver les populations civiles d’Abobo des bombardements ignobles du camp Gbagbo. La chute du dictateur a certainement été facilitée par la bravoure de cet homme et de ses compagnons d’armes. Il faut savoir utiliser cet homme, d’autant que non seulement la république lui est redevable, mais encore il a des hommes sous son commandement. De son côté, IB doit également savoir être modeste. Car, dans cette république naissante qui va exiger plus d’égalité et de justice, chacun devra s’efforcer de perdre un peu, pour que la nation gagne plus.

Dans cette perspective, il faudra "se jeter un peu d’eau froide sur le cœur", éviter d’être trop exigeant, et laisser travailler les hommes de bonne volonté. Un minimum de rigueur morale, de dépassement et d’impartialité doit donc être observé.

En particulier, IB doit comprendre que trop de prétentions pourraient nuire à la république. ADO a une grandeur d’esprit et IB le sait. En venant se rallier, il a explicitement reconnu son autorité. Il lui faudra rassurer les uns et les autres en rompant absolument avec l’esprit putschiste, et accepter de bon coeur de rentrer dans les rangs. Il peut bien reprendre sa place dans l’armée républicaine à rebâtir ; mais dans les conditions qui auront été déterminées de manière officielle. A défaut, seuls le dialogue et la négociation devraient être les seuls recours. Il est temps de mettre fin à cette crise qui frise l’infantilisme, surtout qu’elle date des débuts de la rébellion, il y a bientôt dix ans. Il appartient surtout à ADO de jouer les médiateurs. Il doit tout faire pour réconcilier Soro et IB. Il lui faut parvenir à éteindre rapidement cet incendie car du travail reste à parachever au niveau des milices.

Au besoin, le chef de l’Etat ivoirien peut recourir aux sages de la région, les deux "frères ennemis" venant tous du nord de la Côte d’Ivoire. Les traditions africaines regorgent de recettes dont nul ne saurait s’affranchir, pour autant qu’il ait une certaine considération pour cette culture qui constitue véritablement pour chaque fils et fille de ce continent, le dernier recours face à tout péril.

Parce qu’il est redevable tant à Soro qu’à IB, ADO doit mettre rapidement fin à cette guéguerre qui pourrait le distraire de ses obligations, et même empoisonner la vie du système qu’il s’échine à mettre en place pour sauver les Ivoiriens et la Côte d’Ivoire. Une querelle de personnes ne doit pas rejaillir sur la république. Aussi Soro et IB doivent-ils arrêter leur manège. Car, l’ennemi commun rôde encore autour du palais, et rien n’est jamais définitivement acquis.

"Le Pays"

PARTAGER :                              

Vos commentaires

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Changement climatique : La planète envoie des signaux
Déchets plastiques : Ces « voisins » qui nous envahissent