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Situation nationale : « Se renfermer dans le carcan de la discipline du CDP ne va pas changer les choses », Lassina Ouattara, membre du conseil national du CDP

Publié le jeudi 21 avril 2011 à 01h05min

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Lassina Ouattara, membre du conseil national du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), était hier mercredi 20 avril 2011 dans nos locaux. Il est venu donner son opinion sur les événements qui secouent le Burkina Faso depuis un certain temps. Militant du parti au pouvoir depuis sa création et suppléant du député Mélégué Maurice Traoré dans la Léraba, M. Ouattara estime que l’apaisement de la tension sociale passe par la tenue d’un congrès extraordinaire de vérité au sein du CDP.

Quelle lecture faites-vous de la situation nationale ?

•La situation nationale m’interpelle à plus d’un titre. D’abord en tant que citoyen et ensuite en tant que militant du parti au pouvoir. Ce qui s’est passé interpelle tous les Burkinabè et chacun doit faire son devoir, donner sa contribution à la réflexion qui, j’espère, va aboutir à des réformes concrètes afin d’apaiser un tant soit peu le climat sociopolitique dans lequel se trouve le pays.

Quand vous parlez de contribution, quelle est la vôtre ?

• En parcourant le micro-trottoir que vous avez réalisé hier (Ndlr : L’Observateur paalga n°7864 du mardi 19 avril 2011), on se rend compte que tout le monde se dit que le malaise est profond. Je pense qu’il ne faut pas occulter les problèmes, il faut les inventorier et ouvrir un débat démocratique permanent et régulier. Aujourd’hui, le gouvernement est dissous pour obligation de résultats. Si on en est arrivé là avec l’exécutif, notre parti, qui est un parti leader au Burkina, a également obligation de résultats.

Notre secrétariat exécutif, qui nous sert de gouvernement interne, doit tenir en urgence un congrès extraordinaire où il nous faut rompre avec les vieilles habitudes qui consistent à différer ou à noyer les problèmes en raison de la proximité avec des échéances électorales. Nos congrès sont devenus des rendez-vous manqués parce que les militants et les citoyens ne peuvent pas se prononcer librement, et ce sont ces problèmes qui refont surface aujourd’hui. Cette fois-ci, il faut s’asseoir, se dire franchement ce qui ne va pas et déterminer ce qui doit être fait.

Pourquoi avez-vous préféré lancer cet appel à un congrès extraordinaire du parti par voie de presse ?

• En tant que militant, nous participons à des rencontres du parti. Quand vous venez à de tels fora animé de bonne foi et débordant souvent de propositions et que l’on ne vous donne pas l’occasion de vous exprimer, vous les reportez à la prochaine fois. La situation est ainsi depuis un certains temps : le cadre du débat est balisé et on remet les vrais problèmes à plus tard. Se renfermer dans le carcan de la discipline du CDP ne va pas changer les choses d’autant plus qu’une rencontre dans ces conditions connaîtra le même sort que les précédentes.

C’est ce qui m’a amené à interpeller plus d’une personne pour que chacun joue son rôle. Quand je prends les catholiques qui, chaque année à travers la lettre pastorale, donnent une opinion qui déplaît, qui peut faire gloser, cet exemple de droiture et de courage avec lesquels sont présentés les problèmes tels qu’ils les voient doit être suivi. Je voudrais bien voir la communauté musulmane se prononcer, de la même façon, sur la chose publique.

Je ne lui demande pas d’être partisane mais de donner de la voix pour une cohésion sociale. Malheureusement, chez nous (Ndlr : au CDP) on a l’habitude de jeter le bébé avec l’eau du bain. Si tu soulèves un problème, tu vas te retrouver avec des sanctions sur ta tête. Je ne cherche pas à traîner le parti dans la boue, je demande un débat. Notre siège a été attaqué alors que nous venons de sortir victorieux d’une élection et parmi les casseurs, il y avait certainement des militants et des électeurs du CDP. C’est un message fort qu’il nous faut décrypter.

Quelle est l’opportunité de votre réaction maintenant ? Ne voulez-vous pas profiter de la situation de crise sociale qui prévaut dans le pays pour émerger au sein du parti et sur la scène politique ?

• Nous, la jeunesse du parti, nous voulons que le débat soit à tous les niveaux. Ce que je refuse, c’est d’être avec le parti depuis ses débuts et de se retrouver par la suite naufragé. Prenons l’exemple du Front populaire ivoirien (FPI) en Côte d’Ivoire. Je ne peux pas préjuger de l’avenir de ce parti dans le pays, mais pour avoir conduit les choses d’une certaine manière les militants risquent de raser les murs si les premiers responsables n’y prennent garde.

La jeune génération que nous sommes est interpellée. Je refuse de contribuer à la construction d’un édifice et d’assister les bras croisés à sa démolition. Je n’ai pas besoin de la situation pour émerger. Je suis membre du Conseil national du CDP et suppléant du député Mélégué Maurice Traoré. J’ai donc d’autres moyens de tirer mon épingle du jeu.

Vous appelez les membres de votre parti à un « congrès de vérité ». Quelle date vous préconisez pour la tenue de ces assises ?

• Sans délai ! La Cocote-Minute s’est calmée un peu mais les populations attendent de voir. Et notre parti ne doit pas rester en marge des choses, la démocratie doit demeurer dans ce pays pour nos enfants et nos petits-enfants. C’est pourquoi je prends le risque de m’exprimer, car on ne peut pas être dans cette situation et se taire. Ce serait être complice.

Entretien réalisé par Hamidou Ouédraogo et Moumouni Simporé (Stagiaire)

L’Observateur Paalga

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