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NOMINATION D’UN HAUT REPRESENTANT POUR LA CÔTE D’IVOIRE : Les solutions problématiques de l’UA

Publié le lundi 28 mars 2011 à 03h41min

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L’heure est à la quête tous azimuts de solutions à la crise ivoirienne. C’est ainsi que l’Union africaine (UA) vient de nommer son haut représentant pour ce pays, en la personne de l’ex-ministre cap-verdien des Affaires étrangères, José Brito. Ce haut représentant a la lourde mission de mettre en oeuvre les décisions de l’organisation continentale pour une sortie de crise en Côte d’Ivoire. Mais les choses ne sont pas simples. On savait déjà que le représentant de l’UA marcherait sur des oeufs, tant le camp Gbagbo ne fait aucun mystère de son refus de céder face aux injonctions de l’UA de quitter le pouvoir.

En témoignent les démonstrations de force de ses partisans, organisées sous la houlette de Charles Blé Goudé. A cela est venu s’ajouter un autre élément de nature à compliquer davantage la situation. A peine nommé, le haut représentant est récusé par le camp de Alassane Ouattara qui dit ne pas avoir été consulté au préalable et qui l’accuse, au passage, d’être proche de Laurent Gbagbo. De plus, ce haut représentant devait être nommé le plus vite possible à l’issue du sommet qui en a pris la décision. Là encore, l’UA a traîné les pas avant de le faire comme s’il n’y avait pas urgence en la matière.

En principe, si ce haut représentant s’en tient à sa mission, le fait qu’il ait des accointances avec l’un ou l’autre camp importe peu. Il devrait se contenter de faire ce pour quoi il a été mandaté et rien d’autre. De toute façon, il ne devrait, en aucun cas, remettre en cause la reconnaissance de l’élection de Alassane Ouattara par l’UA, reconnaissance que la Maison blanche vient également de faire officiellement. La tâche de José Brito devrait essentiellement consister à mettre en branle les décisions adoptées, notamment le transfert du pouvoir. A moins que cette récusation du camp Ouattara ne soit juste une stratégie, une façon de mettre la pression sur ce haut représentant. Une chose est au moins sûre : jusque-là, les solutions de l’institution africaine dans la crise ivoirienne constituent en elles-mêmes des problèmes.

Déjà, la décision invitant le président du Conseil constitutionnel à organiser la prestation de serment de Alassane Ouattara, a tout d’une maladresse et pèche gravement par son manque de réalisme. En tout cas, tout le monde sait que ce ne sera pas chose aisée d’obtenir du haut magistrat qu’il revienne sur sa décision, qu’il se déjuge. Ce faisant, cette idée n’est pas géniale ; ce n’est vraiment pas une solution brillante. Pendant ce temps, probablement déçue de cette stratégie, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a décidé de se référer directement à l’Organisation des Nations unies (ONU) pour obtenir un renforcement des sanctions contre le camp du président sortant, mais aussi renforcer les pouvoirs de l’ONUCI avec la possibilité d’intervenir militairement "en dernier recours".

La France et le Nigeria s’attellent à faire adopter une résolution onusienne visant à interdire, au moins, l’utilisation des armes lourdes contre les populations civiles. L’UA et la CEDEAO ne sont donc pas sur la même longueur d’ondes. Assiste-t-on à un conflit d’autorité entre les deux institutions ? Il ne serait pas exagéré de le dire au regard de ce qui se passe. Dans le principe, à partir du moment où le dossier est entre les mains de l’institution continentale, la CEDEAO devait désormais se contenter d’agir par son canal. Mais pour faciliter cette complicité, il faut que les deux organisations partagent le même mode opératoire. Ce qui n’est visiblement pas le cas.

En recevant le dossier, l’UA n’a pas continué sur la lancée de la CEDEAO qui était déjà assez avancée sur l’option militaire. L’organisation continentale a certainement déçu l’instance sous-régionale qui a décidé de se remettre en selle. L’organisation ouest-africaine se veut plus pragmatique et semble plus proche de la solution que ne l’est l’UA. A défaut de pouvoir intervenir sur le théâtre des opérations de son propre chef, elle est en quête d’une onction des Nations unies à cet effet. Ainsi, la CEDEAO, contournant l’UA, s’est adressée à l’ONU en désespoir de cause au moment même où le haut représentant en Côte d’Ivoire du continent noir est récusé par une des parties en présence. On se demande à présent ce que fera l’organisation continentale.

Va-t-elle changer de haut représentant ou maintenir à tout prix José Brito ? En cas de changement de personne, quelle garantie a-t-on que l’autre camp ne s’en servira pas pour demander la révocation de ce nouveau représentant ? D’un autre côté, on se demande si l’UA saura soutenir la requête de la CEDEAO aux Nations unies. Les jours à venir nous en diront davantage. Mais, il est plus qu’impérieux que cette relative cacophonie cesse au plus vite et que la quête de solutions à la crise repose sur des procédures harmonisées. Les institutions concernées, surtout l’UA, gagneraient à travailler à cela. Cela aura l’avantage de les crédibiliser et, surtout, d’abréger les souffrances des populations ivoiriennes martyrisées.

"Le Pays"

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