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FRONT DES FORCES SOCIALES : "Au Burkina Faso, tout semble aller pour le mieux"

Publié le mercredi 23 février 2011 à 01h28min

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Norbert Michel TIENDREBEOGO

Le Front des forces sociales (FFS) se prononce sur la délocalisation du 8-Mars à Ouagadougou. Selon lui, les raisons invoquées ne tiennent pas la route.

Le peuple burkinabè, et plus particulièrement les populations de la Boucle du Mouhoun, ont été une fois de plus pris au dépourvu par les frasques du régime de monsieur Blaise Compaoré, en ce début de l’an 2011. A la surprise générale en effet, il a été fait état le 4 février dernier devant les corps constitués de ladite région, réunis dans la salle de conférences de la mairie de Dédougou, de la décision par madame Chantal Compaoré, épouse du chef de l’Etat et marraine de la commémoration de la Journée internationale de la femme, de ramener la cérémonie officielle de cette commémoration à Ouagadougou, en lieu et place de Dédougou !

Du coup, le rêve du grand 8-Mars promis et attendu par les femmes (mais aussi les hommes) de la Boucle du Mouhoun depuis un an s’évanouit… Les raisons invoquées pour cette décevante et pitoyable décision ne sauraient guère convaincre. Jusqu’à preuve du contraire, Dédougou (chef-lieu de la région de la Boucle du Mouhoun), n’a pas été décrétée destination infréquentable, ni pour une raison ni pour une autre ; alors ? A moins qu’il y ait une autre considération inavouée ! Le prétexte avancé qui fait craindre que le chantier de bitumage de l’axe Koudougou-Dédougou constitue un obstacle insurmontable est des plus fallacieux.

Le patron de l’entreprise qui en a la charge est natif de la localité, et gageons qu’il n’y fera pas de mauvais travail. En tout cas, les échos qui nous parviennent sur la qualité de ses déviations sont encourageants. Absolument rien à avoir avec l’état des lieux de la fameuse "autoroute" Ouaga-Bobo. Combien de chantiers de bitumage et autres réfections de la route Ouaga-Bobo n’avons-nous pas connu avec tous les désagréments qui s’y rattachent ? Pour autant, le trafic Ouaga-Bobo n’a jamais été interrompu et Bobo-Dioulasso a toujours constitué une destination des plus importantes.

Pourquoi la donne changerait-elle en ce qui concerne Dédougou ? Fallait-il attendre que les braves populations de la Boucle du Mouhoun se trouvent à un mois de l’événement pour venir saper leur moral et les plonger dans le désarroi ? La fameuse marraine ne savait donc pas que des travaux se déroulaient sur cette route ? N’était-elle pas au Burkina Faso lorsque son candidat battait campagne dans cette même localité avec une cohorte de véhicules de tous genres sur cette même route en construction ? Cela date de seulement trois mois, madame la marraine ! Loin de nous l’idée de profiter de la déception des hommes et femmes de la région de la Boucle du Mouhoun en cette douloureuse circonstance, mais seulement, que ceux qui sont au paroxysme de leur règne cessent de se croire tout permis.

Au Burkina Faso, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles : pays qui avance, pays qui progresse, pays qui va émerger dans moins de 5 ans…Tous les moyens sont bons pour festoyer (surtout dans la fraîcheur des climatiseurs), pour abriter les grandes conférences, etc. Dans cette lancée, il y a belle lurette que le 8-Mars, date commémorative de la journée internationale de la femme a été dévoyé en occasion de "Djandjoba" plutôt que d’être une occasion d’introspection et de communion autour de l’idéal de justice, d’équité et d’émancipation véritable de la femme à travers des réflexions pertinentes en vue de solutions novatrices pour l’amélioration de ses conditions d’existence.

Si cet idéal était compris et partagé, les cérémonies officielles de commémoration devraient se tenir dans les localités où il y a le plus de problèmes (analphabétisme, pauvreté, enclavement, exode…). D’où le choix et l’organisation devraient impliquer la responsabilité objective de l’Etat. Qu’importe qui en serait parrain ou marraine ! C’est d’ailleurs le lieu de se demander pourquoi c’est madame Chantal Compaoré qui est l’éternelle marraine de cette journée : de quelles qualifications exceptionnelles jouit-elle pour cela ?

N’y a-t-il pas au Burkina Faso d’autres femmes aussi méritantes ou valeureuses ? d’autres personnalités crédibles ? Au sortir des manifestations de Koudougou, les sommités de la composante féminine de notre pays ont jeté leur dévolu sur la ville de Dédougou pour accueillir la commémoration du 8-Mars 2011. Gouverner c’est prévoir. Cet adage est loin d’être la chose la mieux partagée au sein de la gouvernance de la 4e République, marquée à dessein par un flou entretenu autour des missions régaliennes de l’Etat, qui finissent par choir entre les mains de certains barons et baronnes.

Preuve que la patrimonialisation tant redoutée et tant décriée n’est plus à venir ; elle est déjà en marche à grands pas au pays des Hommes intègres". Au moment où le choix de Dédougou s’opérait pour abriter la cérémonie officielle du 8-Mars 2011, d’aucuns savaient la région enclavée… Depuis 1991, le Chef de l’Etat n’a eu de cesse de promettre aux laborieuses populations de cette région aux nombreuses potentialités, son désenclavement par le bitumage des axes Bobo-Dédougou-Tougan-Ouahigouya et Koudougou-Dédougou, puis Yako-Tougan et Boromo-Dédougou. 1991-1998 ; 1998-2005 ; 2005-2010.

En trois (3) mandats successifs, invariablement les mêmes promesses non tenues, la même déception à l’instar de beaucoup d’autres régions dont les espoirs ont été déçus d’une élection à une autre. On en est ainsi réduit quelque part à attendre les réalisations du MCC (Millennium challenge compact) américain pour meubler des bilans aussi vides que faux. "Il ne sert à rien de s’apitoyer sur le sort d’un esclave qui se satisfait de sa condition d’esclave". « Le Burkina a besoin d’un peuple de convaincus et non de vaincus. » A la décharge de ceux qui se paient la tête des Burkinabè, il est à déplorer le fait que les populations se plaisent à suivre complaisamment les marchands d’illusions et à céder à toutes sortes de manipulations. Il est temps de se réveiller !

Nous ne doutons pas que certains pourraient hâtivement faire croire que nous sommes des oiseaux de mauvais augure qui voudraient profiter d’une petite malencontreuse incompréhension pour semer la discorde. Qu’à cela ne tienne ! Il en a toujours été ainsi sous ce régime. Chaque fois qu’un ou des Burkinabè fait ou font les frais de la mal gouvernance, le pouvoir s’empresse de procéder à des menaces et intimidations, des achats de conscience et autres balbutiements mensongers pour rattraper ses dérives. Tout ceci explique en partie le fait que les élites de notre pays, les forces vives et autres personnes avisées aient choisi le silence pour laisser faire, ou préfèrent simplement migrer vers la majorité présidentielle en espérant un meilleur devenir. Ne dit-on pas chez les mosse que "si vous ne pouvez rien contre le voleur, il vaut mieux l’accompagner avec son butin et dans ses œuvres" ?

Ce qui n’est autre chose que de la lâcheté et non de la sagesse ! Le Front des forces sociales (F.F.S) quant à lui ne saurait fuir ses responsabilités face à cette autre dérive des cercles du pouvoir qui font et défont la vie de la République au gré de leurs humeurs. Le 8-Mars 2011 peut et doit se tenir à Dédougou, avec ou sans madame Chantal Compaoré comme marraine ! C’est cela aussi la République. Le choix de Dédougou est souverain et ne relève que de l’autorité de l’Etat incarnée par le ministère de la Promotion de la femme. Toute autre considération ne relève que de la forfaiture.

En tout état de cause, quand il s’est agi d’organiser la célébration de la Journée mondiale des lépreux à Dédougou, le gouvernement ne s’est pas embarrassé de précaution et de prudence quant à l’état de la route. De surcroît, Dédougou n’a pas marchandé sa mobilisation pour témoigner sa solidarité envers les autorités et les malades atteints de lèpre. Et pourtant des gens sont venus de Ouaga et d’ailleurs ! Nous comprenons difficilement que madame Compaoré puisse user de sa qualité de marraine pour instruire un ministre de la République de faire ou de ne pas faire des choses décidées par l’Etat. Nous attendons que les experts éclairent notre lanterne.

En attendant, le F.F.S marque son entière solidarité avec les populations de la région de la Boucle du Mouhoun face à cette décision injuste et injustifiée que le parti condamne fermement. Nous invitons les femmes à s’approprier les valeurs cardinales de justice, de dignité et d’émancipation incarnées dans la célébration du 8-Mars en tant que journée de réflexion, d’introspection et de bilan en vue de dégager des pistes pour un avenir meilleur. Le 8-Mars est né d’une longue tradition de lutte. Cette commémoration est le rappel historique d’une victoire sur l’injustice et les inégalités.

Que le gouvernement du Premier ministre Tertius Zongo se prononce ! Autrement, se contenter de dépêcher une émissaire pour aller simplement informer les populations de la décision unilatérale de la marraine (épouse du chef de l’Etat) de délocaliser la cérémonie fera jurisprudence. Nous souhaitons bonne fête aux femmes du monde entier, en particulier celles qui ont compris que seule la lutte libère, et qui sont prêtes à s’y engager.

Le Président national Norbert Michel TIENDREBEOGO

Le Pays

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