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INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

Publié le mardi 8 février 2011 à 00h35min

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Autant un attelage a besoin de phare pour trouver son chemin dans l’obscurité, autant un peuple a besoin d’hommes éclairés pour le guider vers son développement. Les intellectuels font partie de cette catégorie. Ils sont ces éclaireurs qui vont au devant d’une armée pour repérer les dangers du terrain, afin d’éviter à leurs troupes de tomber dans des embuscades. Par leurs avis, leurs prises de position, ils sont censés indiquer aux dirigeants, que cela leur plaise ou non, ce qui serait mieux pour leurs concitoyens et concitoyennes, et même pour tous les êtres humains en général.

Tel est donc l’objectif que doit se fixer tout homme ou femme qui se réclame "intellectuel" : être utile à sa nation, à son peuple, à l’humanité qu’il fera avancer par son action et par ses prises de position. Certains auront payé de leur vie leur engagement. D’autres auront été contraints à l’exil. Mais, pour tous, l’engagement aura été au prix de sacrifices énormes. C’est ainsi que les intellectuels africains d’avant les indépendances s’étaient fixé un objectif : la libération du continent du joug colonial. Nelson Mandela, Patrice Lumumba, Léopold Sédar Senghor, pour ne citer que ceux-là, auront été de vaillants combattants de cette libération. Aujourd’hui, les indépendances africaines dont une dizaine de pays viennent de célébrer les cinquante ans, appartiennent à l’histoire.

A présent, l’Afrique est confrontée à de nouveaux défis dont celui de la gouvernance démocratique qui n’est pas sans interpeller les intellectuels du continent. Plus d’une dizaine d’années après le discours de La Baule, la démocratie en Afrique se porte mal et cela n’est pas sans conséquence sur son développement. Comme un bateau ivre, le continent tangue et se cherche une voie, celle qui lui permettra de sortir ses populations des longues nuits de misère et parfois d’oppression. Mais voilà, la voie endogène qui devrait libérer le continent des scories de son passé de terre asservie reste à trouver par la faute de ces mêmes intellectuels africains. Son intelligentsia n’est pas encore à la hauteur, ou du moins, elle n’a pas encore la masse critique nécessaire capable de porter les aspirations des peuples à plus de liberté, de démocratie et de bien-être. Combien sont-ils encore à avoir le sens de l’engagement ?

Combien sont-ils à défendre la cause de la vérité, à se ranger du côté du peuple et de la démocratie ? Bien sûr, il y en a qui tiennent bien leur rang, en se mettant au service de causes nobles, comme défendre la démocratie et contribuer à leur manière au développement de leur pays. Mais il y en a malheureusement qui ont fini par démissionner par couardise. D’autres ont préféré vendre leur âme au diable. Ils se sont mis au service des causes indéfendables, avec pour récompenses le confort et la richesse matérielle. Le sens du patriotisme et de l’intérêt général, rien à faire !

Ainsi a-t-on vu des dames et des hommes, rabattant sur leurs épaules les amples manches de leur habit d’intellectuels, défendre bec et ongles des régimes ayant fait le choix de prendre en otage leur peuple. C’est leur droit, car, qui se dit démocrate doit l’assumer entièrement et accepter que l’autre s’exprime, même s’il ne partage pas l’avis de ce dernier. Mais l’intellectuel africain joue-t-il son rôle d’éclaireur du peuple quand il contorsionne et tord la vérité pour prendre la position d’un chef d’Etat qui dit blanc ce que tout le monde voit noir ?

A l’image des précurseurs du nazisme et de l’apartheid, des cadres qui concoctent des idées et des théories pour accompagner un mauvais dirigeant dans ses errements rendent-ils service à leur peuple ? L’intellectuel qui laisse changer la direction de sa girouette intellectuelle par le vent des enveloppes pleines de billets de banque mérite-t-il de lever la tête parmi ses pairs ? Loyal, véridique, droit, honnête, intègre, objectif, courageux. Combien sont-ils les intellectuels, en Afrique, à pouvoir réunir ces qualificatifs ? Dans ce contexte de morale agonisante qui n’épargne aucun pays du continent, la tendance serait plutôt à taxer beaucoup d’entre eux de "corrompus, vendus, égarés, prostitués, inconstants", etc.

Ces intellectuels africains-là jouent plus aux charlatans qu’aux éclaireurs. Des charlatans qui diagnostiquent les maux de leur société et qui, pour des intérêts nombrilistes, s’emploient à les dissimuler avec des arguments insidieux. Mais il est encore temps de changer la donne. L’intellectuel est celui qui prend une position, la défend jusqu’à ce qu’on lui démontre la preuve du contraire. L’Afrique a besoin d’intellectuels qui l’aident et non pas de sophistes qui excellent généralement dans des argumentations séduisantes et fallacieuses. Un intellectuel n’est pas un griot, encore moins un encenseur mais un guide dont les idées éclairent. Pour tout dire, l’intellectuel est celui-là qui, par sa sagesse et sa clairvoyance, est au service du peuple.

"Le Pays"

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Vos commentaires

  • Le 8 février 2011 à 01:45, par Inoussa Verité En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    Tres bon article. A vrai dire nous sommes des charlatans dangerux pour notre continent.

  • Le 8 février 2011 à 05:42 En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    Merci pour ce point de vue qui est une prise de position. felcitation a l’auteur. Qu’ecoutent ceux qui sont reclame intellectuel.

  • Le 8 février 2011 à 09:25 En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    cet article fait allusion à la crise ivoirienne sans le dire expressement, à moins que je me trompe. Il faut se mefier de vos vérités, Gbagbo n’est pas defendable mais vouloir amener les intellectuels dans un raisonnement étroit qui les confinerait à choisir entre x et y sans autre analyse sur les déterminants vrais de la crise ivoirienne n’est pas honorable.

  • Le 8 février 2011 à 09:34 En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    cet article fait allusion à la crise ivoirienne sans le dire expressement, à moins que je me trompe. Il faut se mefier de vos vérités, Gbagbo n’est pas defendable mais vouloir amener les intellectuels dans un raisonnement étroit qui les confinerait à choisir entre x et y sans autre analyse sur les déterminants vrais de la crise ivoirienne n’est pas honorable.

  • Le 8 février 2011 à 09:59 En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    Très bel article. Merci au journal le "Pays".

    Le sujet est d’autant d’actualité surtout lorsqu’on sait que
    des intellectuels africains et non des moindres tels que Achille Benbé, Calixte Beyala... pour ne citer que ceux là, se font des defenseurs sans scrupule de l’indéfendable allusion
    faite à ce qui se passe au pays d’Houphouét.

    Heureusement, pour nous aujourd’hui le monde est un village
    global où l’information n’a pas de frontière, ce qui fait
    que la vérité finit toujours par rattraper le mensonge,
    souvenez vous des prétendues armes de destruction massive
    en Irak...

    A bon entendeur salut.

  • Le 8 février 2011 à 11:29, par arouna En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    Bjr
    Après lecture de votre article sur les intélectuels africains,la seule chose à dire à votre rédaction est merci pour l’analyse.
    L’afrique de ce temps perd beaucoup les pédales car je pense que ces soient disant intélecs ne sont que des pagailleurs intélecs. Si non, dans la bouillabaise que patogent lU.A qui ne peu prendre une décision seule sans la caution des nations Unies et de l’Occident, fait honte à l’Afrique.Allez y comprendre, presque tous ces pays africains qui vivent d’aumone et d’aides extérieurs interdisent à leur population la mendicité.
    Ces intélecs africains laissent à penser comme s’ils sont dans la classe des corrompus.
    Et l’ONU dans dans tout çà. On ne sait plus quel rôle elle joue maintenant.

  • Le 8 février 2011 à 15:45, par Pousga En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

    Merci pour cet article.

    Il faut reconnaître a eu à un certain moment de grands intellectuels ; mais aujourd’hui nous sommes à la recherche de race d’intellectuels. Aujourd’hui ceux qui se prétendent comme tels (Calixte Belaya, Monenlembou et autres)sont de véritables criquets pèlerins dévastant les caisses noires des palais présidentiels. Ils sont même pires que les criquets pélérins

    • Le 14 février 2011 à 11:29 En réponse à : INTELLECTUELS AFRICAINS : Eclaireurs ou charlatans ?

      C’est vrai que je n’avais aucune considération pour Calixte BEYALA qui passe son temps à recopier les textes des autres pour prétendre qu’elle écrit des livres. Par contre j’avais du respect pour Achille BEMBE. Il tenait la route. Il était au CODESRIA a Dakar, une grosse organisation de recherche. Et Vlan, voilà que cet égyptologe "casse sa pipe" en défendant l’indéfendable. Et l’autre qui a écrit "je suis noir mais je n’aime pas le Manioc". Et lui aussi vlan ! C’est dégoutant ! Mais cela dit, si l’on a vu le grossier montage fait par des camerounais qui a passé à la RTI, l’on sent que ces gars on brouté, brouté, brouté ! Dommage, ils sont des clercs (diplômés) mais pas des intellectuels au sens sartrien du terme !

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