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SPESS : Les Burkinabè souhaitent désormais que personne "ne règne à vie"

Publié le jeudi 13 janvier 2011 à 01h55min

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Le Syndicat des personnels, des encadreurs et des enseignants du secondaire et du supérieur (SPESS) peint un sombre tableau du système éducatif national. Aussi se prononce-t-il clairement sur le contexte sociopolitique national et international.

Le Syndicat des personnels, des encadreurs et des enseignants du secondaire et du supérieur (SPESS), se fondant sur sa vision du syndicalisme qui est la défense des intérêts des travailleurs et de leurs conditions de travail, trouve que les choses évoluent dans un sens positif, car le syndicalisme d’aujourd’hui n’est plus celui du XIXe siècle. Par conséquent, au-delà de la défense des intérêts quotidiens des travailleurs de l’éducation et de l’amélioration de leurs conditions de travail, le SPESS défend aussi les intérêts de tous les citoyens du Burkina Faso, surtout quand on sait que près de 80% des 16 millions de Burkinabè ne savent ni lire, ni écrire. Depuis les cinq (5) dernières années, les autorités du ministère des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique (MESSRS) ont souvent été à l’écoute des travailleurs de l’éducation à travers leurs organisations syndicales, en témoignent les diverses rencontres et autres cadres de concertation auxquels elles ont été associées.

C’est ainsi que certaines propositions et suggestions formulées par le SPESS ont été prises en compte dans la pratique et dans les plans d’action et les programmes d’activités en cours. Il n’en demeure pas moins que d’autres restent en suspens. Si le SPESS s’accorde avec l’Etat sur les objectifs de l’Education pour Tous (EPT) d’ici à 2015, il ne peut s’empêcher de dénoncer les méthodes et les moyens de sa mise en œuvre. En effet, ce n’est pas en consacrant 20% du budget national à l’éducation, avec des ressources humaines très insuffisantes, des enseignants mal rémunérés, des infrastructures très insuffisantes, des effectifs pléthoriques, un manque criard de matériel scolaire et didactique … qu’on peut rêver d’atteindre les objectifs de l’EPT.

Pour le SPESS, l’Etat devrait consacrer au moins 50% du budget national à l’éducation pour un réel accès à l’EPT. Pour ce faire, le SPESS a trouvé nécessaire de s’appesantir sur un certain nombre de points dans sa déclaration à l’issue de son 3e congrès ordinaire tenu les 2 et 3 janvier 2011 au Centre d’éducation ouvrière à Ouagadougou, déclaration qui a précédé la mise en place de son nouveau bureau national (BN) composé de dix-neuf (19) membres. Ce bureau, avant de dire merci à toutes les délégations venues de partout le Burkina, a présenté une plateforme revendicative minimale à l’intention des autorités du MESSRS. Voilà six (6) ans jour pour jour que le SPESS est né dans le paysage syndical burkinabè. Il est le fruit d’un certain nombre de considérations d’enseignants et de travailleurs de l’éducation, conscients de leurs rôle et place dans la construction de l’œuvre éducative, qui se sont vu obligés de prendre position dans ce monde syndical où les confusions du genre ne font que se développer. Les failles de la dernière grande grève du monde éducatif de 1999- 2000 ont fini par nous convaincre qu’il était nécessaire de mettre au point un mouvement qui sera en mesure d’aller au-delà de la défense des intérêts des militants, pour défendre aussi ceux de l’Etat burkinabè.

Sur le terrain et au bout de six ans d’existence, quels sont les acquis et les insuffisances de notre organisation, le SPESS ?

Pour répondre à cette question il s’est avéré nécessaire de nous pencher sur le thème : "Place et rôle du SPESS dans le mouvement syndical des travailleurs de l’éducation du Burkina Faso." Cette interrogation nous amène à faire un bref aperçu sur la participation du SPESS aux négociations et mouvements de lutte. Au plan des négociations, le SPESS s’est beaucoup intéressé à l’amélioration des conditions de travail des travailleurs de l’éducation en général et de ses militantes et militants en particulier. Il s’est également penché sur l’organisation des examens. Au titre des conditions de travail, une augmentation de 5 000 F CFA sur l’indemnité de logement des inspecteurs de l’enseignement secondaire (même s’il reste 20 000 F CFA pour un retour à la normale qui est de 60 000 F CFA) a été acquise. En outre, le SPESS ne comprend pas qu’après deux ans de formation à l’Ecole normale supérieure (ENS) de Koudougou, les conseillers pédagogiques de l’enseignement secondaire n’aient pas droit à une grille de paiement.

Le reversement des 50% d’une indemnité de logement retenue illégalement au profit d’un fonds de l’habitat (qui a d’ailleurs miraculeusement disparu) de 1984 à 1991 n’est toujours pas effectif. Un de nos points de négociation qui était d’octroyer une parcelle lotie à chaque enseignant qui a été victime des retenues de 12 500 F CFA ou de 25 000 F CFA au profit du fonds de l’habitat en compensation des retenues, n’a jamais trouvé d’écho favorable. En ce qui concerne la suppression de l’indemnité de documentation de 7 000 F CFA des enseignants du secondaire, c’est un oubli qui ne dit pas son nom.

Que dire du refus d’accorder une indemnité spécifique aux enseignants du secondaire quand on sait qu’ils vivent les mêmes conditions de travail que leurs confrères et consœurs du ministère de l’Enseignement de base et de l’alphabétisation (MEBA) ?

A propos de l’octroi d’un kit pédagogique au profit des enseignants, c’est toujours un "black out". Or, on sait qu’aujourd’hui aucun enseignant ne peut nier que dans cette vie difficile où on a du mal à boucler les fins du mois, acheter des documents et matériels didactiques devient un cauchemar. A ce titre, pourquoi ne pas permettre à tout enseignant au moins une fois dans sa carrière de s’octroyer un micro-ordinateur hors taxes hors douane ou par le biais d’une subvention de l’Etat quand on sait que de nos jours ce moyen et outil de travail est indispensable à l’atteinte d’un enseignement de qualité. Quant aux acquis de nos négociations, nous pouvons retenir la transformation du lycée scientifique en Institut des sciences (IDS) conformément à la déclaration d’existence du SPESS de 2004. Cet acte louable a permis au système éducatif de recevoir chaque année plus de 100 professeurs (mathématiques, sciences de la vie et de la terre, sciences physiques), ce qui contribue à réduire le déficit dans nos établissements. Un deuxième fait louable est l’implication des encadreurs pédagogiques (conseillers et inspecteurs de l’enseignement secondaire) dans la certification des examens scolaires du secondaire (BEPC, BEP, CAP, BAC). Ce fait qui était jadis considéré comme utopique est une réalité depuis les quatre dernières sessions et contribue grandement à accroître l’objectivité dans le système d’évaluation certificative.

Au nombre de nos revendications qui n’ont toujours pas reçu d’écho favorable figure la création d’un emploi spécifique de chefs d’établissements. Par cette déclaration, nous réitérons nos vœux de voir la naissance de ce corps de chefs d’établissement, avec un traitement conséquent pour une meilleure gestion du monde scolaire. Ramener l’indemnité de logement des inspecteurs de l’enseignement secondaire à sa position de 60 000 F CFA par mois reste pour nous une nécessité quand on sait que les médecins spécialistes, les enseignants du supérieur et les magistrats qui étaient logés dans la même enseigne ont leur dû. Les conseillers pédagogiques qui ont été injustement traités doivent bénéficier d’une grille de paiement qui leur permettra de percevoir les mêmes indemnités de logement. Pour le SPESS, il est grand temps de majorer toutes ces indemnités de 10 000 F CFA devant cette vie chère qui prive les enseignants de logements décents. Face au déficit croissant d’enseignants, (environ 2 050), le SPESS a toujours négocié le reversement des enseignants diplômés académiques du MEBA au MESSRS. Cette proposition a connu une issue favorable. C’est ainsi que 600 postes ont été comblés avec l’arrivée de nouveaux enseignants du MEBA au MESSRS. Pour ces nouveaux enseignants reclassés, il serait plus intéressant de tenir compte de l’ancienneté de leurs diplômes académiques (cinq ans au moins) afin de leur permettre de concourir aux examens professionnels du CAP/CEG et du CAPES, surtout que certains d’entre eux ont plus de 20 ans d’ancienneté.

Tous ces acquis louables, certes, ont été le fruit des engagements des uns et des autres. Cependant, beaucoup de choses restent à faire.

Ainsi pour le supérieur, le SPESS exige des autorités politiques l’adoption des décrets d’application des différents accords suite à la grande crise qu’ont vécue les universités burkinabè durant l’année académique 2008- 2009 ; l’octroi de l’indemnité de logement de 60 000 F CFA aux encadreurs pédagogiques de l’enseignement secondaire ; le reversement des conseillers pédagogiques dans une nouvelle catégorie de paiement correspondant à la série des P ; l’octroi de l’indemnité spécifique à tout enseignant du secondaire à l’image de celle versée aux enseignants du MEBA ; le relèvement des indemnités d’examen et de correction de l’Office central des examens et concours du secondaire (OCECOS) , le reversement (rétablissement) des retenues illégales de 1984 à 1991 au profit du fonds de l’habitat, ou à défaut, l’octroi d’une parcelle en lieu et place au profit des victimes de ces retenues ; la restauration de l’indemnité de documentation de 7 000 F CFA ; la création d’une indemnité d’encadrement et de recherche au profit des encadreurs pédagogiques de l’enseignement secondaire ; la mise à la disposition des enseignants d’une carte professionnelle dont l’initiative en 1996 n’a pas connu une suite ; le respect des effectifs dans les classes (70 élèves au plus au premier cycle et 60 au second cycle) ; la mise à la disposition des encadreurs, de moyens adéquats pour la réussite de l’encadrement de proximité.

- La création d’un corps des inspecteurs généraux pour ceux qui ont une ancienneté d’au moins dix ans dans l’emploi d’inspecteur ; la réalisation de ces suggestions conduira le SPESS à continuer d’être une force de proposition par l’encouragement à toujours mieux servir, leitmotiv de ses militants. Parmi les propositions dans ce sens nous souhaiterions que ; toutes les séries soient présentes dans les établissements des chefs-lieux de province ; les nouveaux programmes soient mis à la disposition de chaque enseignant et que ces derniers soient formés à leur application ; la réalisation de la note pédagogique et sa prise en compte dans l’avancement ; la gestion efficiente des ressources humaines ; un suivi plus approprié des établissements privés par des inspections régulières, la fermeture de tous les établissements ouverts sans autorisation préalable de même que ceux qui fonctionnent avec des enseignants non qualifiés ; revoir à la hausse les taux d’indemnités pour le transport des affectés ou mettre les véhicules de l’Etat à leur service en cas d’affectation ; revoir le calendrier scolaire (fixer la rentrée administrative au 1er septembre et la rentrée pédagogique au 15 septembre) ; pour assurer une plus grande crédibilité des examens scolaires (BEPC, BEP, CAP, BAC), il faudra faire voyager les copies à l’exemple de la Côte d’Ivoire ; le recrutement d’enseignants en nombre suffisant dans toutes les disciplines ; les résultats scolaires étant les fruits des enseignements des classes antérieures, imposer le régime trimestriel à tous les établissements d’enseignement du Burkina Faso avec l’obligation de deux évaluations et d’une composition pour chaque trimestre ; harmoniser les coefficients de toutes les disciplines, au premier cycle ; une progression annuelle étant imposée pour chaque matière et pour chaque niveau, il serait intéressant d’imposer des évaluations de niveaux équivalents à toutes les classes de chaque direction régionale, c’est la seule condition qui permettra aux élèves d’être équitablement formés.

L’Etat, quant à lui, veillera à l’effectivité de l’enseignement de l’éducation civique.

Dans un ordre revendicatif général, nous ne manquerons pas de dire aux autorités politiques que les conditions de vie des Burkinabè sont dures, pénibles et dégradantes. Nous croyons qu’elles–mêmes en sont conscientes si elles ont trouvé nécessaire de créer un poste budgétaire de 37 millions de F CFA environ pour deux anciens présidents non compris les avantages connexes. Les autres autorités ont aussi leur gâteau à l’horizon. Le SPESS croit que les Burkinabè s’équivalent en droits et en devoirs et que par conséquent, tout Burkinabè mérite que son niveau de vie soit amélioré. Au vu de ce qui est dit, et par le fait que tous les citoyens de notre pays doivent bénéficier des fruits de la croissance, il faudra au moins majorer les salaires des 100 000 fonctionnaires de 25% à compter du 1er janvier 2011, surtout quand on sait que ceux-ci n’ont rien d’autre sur quoi compter que sur ce revenu. Se prononçant sur la situation nationale et internationale, le SPESS affiche clairement sa position de refus catégorique de la révision de l’article 37 de la Constitution. Que ceux qui s’excitent à vouloir expliquer l’inexplicable se rappellent les raisons qui ont conduit à la limitation du nombre de mandats. La crise sociopolitique née de l’horrible assassinat du journaliste Norbert Zongo, le 13 décembre 1998, a conduit les Burkinabè à souhaiter que personne ne "règne à vie" sur eux.

Que les uns et les autres s’en souviennent. Concernant les résultats de l’élection présidentielle du 21 novembre 2010, le SPESS trouve que ce n’est pas normal que dans un pays démocratique, en ce début de 21e siècle, on soit à des scores électoraux de 80,15% pour un candidat à la magistrature suprême contre 19,85% à ses six concurrents. Même au temps de la Guerre froide, Staline ne ferait pas mieux. Ce qui fait plus peur, c’est l’indifférence du peuple burkinabè qui a dans son ensemble un dégoût pour la chose politique. Cette situation résulte de l’action de l’ODP/MT, puis du CDP, parti-Etat qui a trouvé tous les moyens pour anéantir les partis d’opposition. C’est aussi le lieu de dénoncer dans l’ensemble les partis politiques de l’opposition qui, pour des intérêts égoïstes et inavouables, sont incapables de s’unir et de proposer une alternative crédible au peuple burkinabè. Aujourd’hui c’est le "wait and see". Chaque citoyen "broute" là où il est attaché, c’est la course aux intérêts personnels, les votes des indemnités indues, la mise en place d’une armée de colonels et de généraux, l’adoption d’indemnités spécifiques pour les épouses des élus du peuple, l’allocation d’indemnités de fêtes et tout ce qu’il y a comme faveur aux détenteurs du pouvoir. Pour les autres, c’est la corruption, les détournements, le faux et tout ce qu’il y a de cupide. Les honnêtes hommes sont considérés comme des extra-terrestres et les intérêts du pays sont oubliés au profit de ceux de l’extérieur comme la Côte d’Ivoire, le Togo et la Guinée.

Qu’est–ce que le SPESS peut dire sur la situation internationale ?

Commençons par la Côte d’Ivoire, car si la case du voisin s’enflamme, il faut commencer par verser de l’eau sur son propre toit. Le SPESS s’accorde avec les institutions internationales pour dire que la récréation est terminée et que Laurent Gbagbo doit être chassé du trône où il s’agrippe pour avoir été à l’’origine de tous les malheurs de la Côte d’Ivoire, autrement dit, les élections n’auront plus de sens en Afrique. Cette espèce humaine est de la trame des grands dictateurs comme Mussolini et Hitler, qui, eux, ont eu l’avantage d’être des ultranationalistes, des bâtisseurs et des ennemis des autres peuples et non des leurs. Nous osons croire que le plus tôt sera le mieux pour les peuples africains afin que de tels machiavélismes n’aient plus droit de cité. Au–delà de la Côte d’Ivoire, il y a le Soudan qui roule à contre-courant de l’histoire voulant séparer ce que la nature a uni en ce début du XXIe siècle où l’union est une condition sine qua non pour tout développement. Les autres pays africains semblent entrer dans le concert de la démocratie, hormis ceux du Maghreb qui confondent la monarchie à la démocratie.

En outre, ce continent est en proie aux actes barbares des mouvements terroristes comme Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI). Par ailleurs, sur les autres continents, le constat n’est pas toujours reluisant. C’est le cas pour l’Irak qui a été détruit par l’Amérique des Bush et l’Afghanistan qui est sur la voie de la destruction. Au bout du compte, il est grand temps que la voie des peuples soit au chapitre, comme aux Etats-Unis où le parti démocratique a été mis au pilori aux élections sénatoriales, deux ans après la victoire éclatante de Barack Obama.

Le SPESS souhaite une bonne et heureuse année 2011 à toutes et à tous.

Avec le SPESS demain sera meilleur qu’ aujourd’hui !

Fait à Ouagadougou le 3 janvier 2011

Pour le nouveau bureau national du SPESS, le Secrétaire général national

Arouna LANKOANDE

Le Pays

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