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CORRUPTION AU BURKINA : "Les privilégiés s’enrichissent, les simples citoyens s’appauvrissent"

Publié le mardi 14 décembre 2010 à 02h28min

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Ceci est le message du Secrétaire exécutif du REN-LAC à l’occasion de la 5e édition des Journées nationales de refus de la corruption.

La communauté internationale célèbre le 9 décembre 2010 la journée mondiale de lutte contre la corruption. En communion avec la communauté, le Réseau national de lutte contre la corruption (REN-LAC) célèbre cette journée sous le thème "La corruption, un obstacle au développement du Burkina Faso". Ce thème, à la fois un complément et un approfondissement de celui de 2009 (Corruption et Pauvreté), traduit nos préoccupations en matière d’impact profondément négatif de la corruption sur le développement. Le REN-LAC invite les citoyens et tous les acteurs de la lutte pour l’intégrité et la transparence à se mobiliser avec lui autour du thème suivant : "La corruption, un obstacle au développement du Burkina Faso". Pourquoi ce thème de réflexion ? Le Burkina, selon la nomenclature internationale consacrée, est un pays pauvre très endetté auquel diverses thérapies ont été administrées en vue de booster son développement.

Ainsi, le programme d’ajustement structurel, le cadre stratégique de lutte contre la pauvreté et la stratégie accélérée pour le développement durable, etc., assortis de plans pluriannuels de développement de la santé (PNDS), de l’éducation de base (PDDEB), de gestion des terroirs, d’appui aux filières agro-sylvo-pastorales, etc. ont été mis en œuvre. Des résultats quantitatifs ont été obtenus, mais aux dépens de la qualité : des taux élevés de scolarisation et de rétention des élèves dans le système scolaire sont annoncés, occultant le fait que les taux similaires auraient pu être obtenus avec les programmes antérieurs au PDDEB si l’on avait appliqué à leurs résultats scolaires, les méthodes statistiques du PDDEB.

De même, malgré le nombre plus important d’infrastructures sanitaires construites sous le PNDS, diminuant ainsi le rayon d’accès des populations aux dites infrastructures, l’appauvrissement de la qualité des prestations est allé crescendo, obligeant les populations à utiliser du pis-aller comme les soins à domicile incontrôlés, les médicaments de la rue, les médecines parallèles prestées par des aventuriers, etc. Même dans le domaine très contrôlé et surveillé par la communauté internationale comme les Objectifs du millénaire pour le développement, le PNUD est obligé de faire le constat que le Burkina ne pourra pas les atteindre en 2015. La corruption généralisée par suite de l’impunité de ses auteurs explique en grande partie les bases du sous- développement du pays.

En effet, des investissements mal adaptés, parce que réalisés du fait de la corruption des décideurs, sont voués à être repris, et donc sources de dépenses supplémentaires et de gaspillages (cf. les avenants multiples). Les mauvais contrôles de l’exécution des investissements par des contrôleurs corrompus, entraînent également des reprises de travaux, sources de coûts supplémentaires pour l’Etat, c’est-à-dire le contribuable. Nombreux biens et services sont surfacturés par suite des pratiques non concurrentielles telles, les marchés de gré-à-gré ou sans appel d’offres, mobilisant toujours plus d’argent à l’Etat pour obtenir une même quantité de biens et de services. Enfin, l’esprit d’entreprise est émoussé, l’opérateur économique burkinabè étant valorisé non par sa compétence et sa capacité technique, mais plutôt selon l’importance des pots-de-vin qu’il peut verser ou selon son appartenance à la sphère du pouvoir.

"La lutte contre la pauvreté reste un vain mot"

Dans ces conditions, la lutte contre la pauvreté reste un vain mot. D’une part, les taux de corruption pratiqués dans l’économie sont répercutés sur les prix et c’est l’économie du pays qui supporte les surprix injustifiés, la différence étant empochée par des fonctionnaires ou des hommes politiques qui auront abusé de leur pouvoir pour servir leurs intérêts privés. En outre, pendant que les privilégiés s’enrichissent, les simples citoyens s’appauvrissent, soit parce qu’ils sont rackettés et sont obligés de payer des services généralement gratuits, soit parce qu’ils paient le surcoût dû à la corruption par l’augmentation des prix ou par l’augmentation des impôts que l’Etat sera obligé, tôt ou tard, de décider. Toutes ces pratiques, même limitées au seul domaine économique sont anti¬développement.

Déjà en 2009, le secrétaire général des Nations unies disait ceci : "Les deniers publics dérobés par esprit de lucre sont autant de ressources en moins pour la construction d’écoles, d’hôpitaux, de routes et d’installations de traitement des eaux. Quant au détournement de l’aide extérieure, pour alimenter des comptes bancaires privés, il sonne le glas de grands projets d’infrastructures. La corruption permet que des médicaments contrefaits ou de mauvaise qualité soient écoulés sur le marché et que des déchets dangereux soient déversés dans des décharges et océans, et les personnes les plus vulnérables sont celles qui en pâtissent le plus". Pour le Directeur exécutif de l’office des Nations unies contre la drogue et le crime, la corruption menace la sécurité, entrave le développement et sape les institutions démocratiques, spécialement dans les régions du monde les plus vulnérables.

Elle déforme les marchés, limite la croissance économique et décourage les investissements étrangers. Dans le secteur public, la corruption sape les services publics et la confiance dans le gouvernement (message à l’occasion de la journée anticorruption 2010). Le Burkina Faso dont les ressources financières sont, pour l’essentiel, constituées d’aides et d’emprunts, ne peut longtemps tolérer de telles pratiques corruptrices. C’est pourquoi, nous avons tous un rôle à jouer : faisons nôtre cette devise de "ne jamais accepter ni offrir de rétribution illégale". Engageons-nous pour honorer notre dévise.

Pr Blaise SONDO Secrétaire Exécutif du REN-LAC

Le Pays

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