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Situation nationale : Quand l’opposition joue dans le flou

Publié le samedi 18 septembre 2004 à 18h35min

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A l’occasion du sommet extraordinaire de l’Union africaine consacré à l’emploi et à la lutte contre la pauvreté en Afrique, 17 partis politiques qui se reconnaissent dans un "front pour l’alternance alternative" ont produit un véritable réquisitoire contre le régime du président Blaise Compaoré.

En politiques avisés, les animateurs de l’opposition burkinabè ne pouvaient laisser passer une si belle occasion pour mettre à mal la gouvernance Compaoré. Du reste, c’est de bonne guerre. L’opposition a donc fait une sortie politique tonitruante. Elle a donné de la voix, et tous les étrangers qui doutaient encore de l’existence de la contestation au Faso ont été bien servis.

Les 17 partis signataires de la déclaration ont mis le doigt là où ça fait mal, et de ce point de vue-là, ils ont marqué des points.
Paradoxalement, cette sortie, aussi brûlante soit-elle, révèle les faiblesses de l’opposition burkinabè. On constate, en effet, que cette déclaration n’a pas fait l’unanimité au sein de la grande famille de l’opposition.

Ainsi, le parti du professeur Joseph Ki-Zerbo n’en est pas partie prenante. Son secrétaire national à la communication a été on ne peut plus clair à ce sujet. Le PDP/PS se désolidarise du groupe, du moins pour ce qui est de l’initiative de cette déclaration. Le problème reste donc entier pour l’opposition, qui n’arrive toujours pas à montrer une capacité à s’unir autour de l’essentiel. S’il est vrai que cette sortie médiatique peut porter un coup au pouvoir Compaoré, son effet est atténué par le fait qu’elle reste à usage externe.

Or, ce qui déterminera la mobilisation des Burkinabè autour des partis politiques est beaucoup plus les solutions de rechange proposées plutôt que des attaques en règle contre le pouvoir. Le combat de l’opposition n’aura de sens que si les hommes qui dirigent les partis abandonnent les mesquineries politiques qui font le nid de la division et de l’exclusion. Le peuple a aujourd’hui besoin d’être rassuré sur les inconnues des lendemains d’alternance.

L’opposition burkinabè a mal à son unité. Et c’est sur ce terrain que les populations l’attendent. C’est de sa capacité à faire un vrai front que dépendra la confiance que le peuple placera en lui.

Même les militants les plus avisés ne se retrouvent plus dans cette cacophonie. L’exemple type est donné par la dernière déclaration au bas de laquelle Ram Ouédraogo, le président du Rassemblement des écologistes du Burkina (RDEB), a apposé sa signature, alors que Ki-Zerbo ne l’a pas fait. Cette situation est en effet difficile à comprendre, quand on sait que le PDP/PS et le RDEB forment un même groupe parlementaire à l’Assemblée nationale. Pour tout dire, c’est la confusion totale, et c’est un véritable miracle si les militants réussissent toujours à se retrouver.

Gilbert Noël Ouédraogo, qui a opté pour une "opposition responsable", n’est pas à l’abri de cette critique. Les différents contacts qu’il a noués ces derniers temps en inquiètent plus d’un. On peut légitimement se demander comment un libéral bon teint peut nouer alliance avec des sociaux-démocrates au détriment d’autres libéraux. Le chef de file de l’opposition n’a pourtant pas hésité à s’afficher avec les leaders de l’opposition sénégalaise. Ceux-ci sont pourtant de farouches adversaires du président Abdoulaye Wade, porté au pouvoir par une formation libérale (le Parti démocratique sénégalais).

La confusion s’installe davantage quand il est question de tracer des stratégies communes pour les opposants africains. La logique aurait pourtant voulu que l’ADF-RDA soutienne le PDS du Sénégal et l’aide à réussir afin de prouver l’utilité d’une politique d’obédience libérale au Burkina. En outre, on peut s’interroger sur les suites et les raisons de l’amitié entre le président de l’ADF-RDA et le leader de l’opposition guinéenne Alpha Condé, qui non seulement est social-démocrate, mais en plus est l’ami du CDP au pouvoir au Burkina. Toute cette embrouille ne fera que brouiller encore plus la donne pour les élections de 2005.

Adam Igor
Journal du jeudi

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