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Report du second tour ivoirien : Ce n’est pas Blaise qui s’en plaindra

Publié le jeudi 11 novembre 2010 à 02h45min

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Si c’est pour le bien du peuple, une petite entorse à la Constitution ne fait pas beaucoup mal. Mieux, il ne s’agit pas là d’une modification de l’article sur la limitation des mandats, fort heureusement.

L’objectif est plutôt d’encourager une alternance paisible. Initialement fixé pour le 21 novembre 2010, le 2nd tour de la présidentielle en Côte d’Ivoire est prévu pour le 28 novembre 2010. Un report d’une semaine avec, pour maître d’œuvre, le gouvernement, inspiré par la Commission électorale indépendante (CEI).

Pareille décision est, bien sûr, en porte-à-faux avec l’article 36 de la loi fondamentale, qui stipule que le 2nd tour doit être organisé tout au plus deux semaines après les résultats du 1er tour, mais elle a une caution juridique de taille : il a suffi que, par un tour de passe-passe juridique, le Conseil constitutionnel l’approuve pour le plus grand plaisir des observateurs de la scène politique ivoirienne.

Il est fort probable que la nouvelle date puisse permettre aux différents acteurs de mieux se préparer : les candidats et leurs états-majors respectifs, l’exécutif (dans le domaine de la sécurité surtout) et les membres de la CEI, qui sont certainement sortis éreintés du 1er tour.

Mais s’il y a bien quelqu’un qui ne trouvera pas à redire face à pareille annonce (s’il n’en est d’ailleurs pas l’un des instigateurs), c’est Blaise Compaoré : le 21 novembre 2010, c’est aussi le 1er tour de la présidentielle dans son pays, le Burkina Faso ; fâcheuse coïncidence, puisqu’il y est candidat ainsi que facilitateur du dialogue interivoirien.

Déjà que les regards des Burkinabè semblent plus tournés vers ce qui se passe en Côte d’Ivoire que vers leur propre campagne électorale, il ne manquerait plus que cette situation pour tout compliquer.

Du fait de cette attitude, peut-on d’ailleurs leur reprocher d’ignorer la poutre dans leur œil alors qu’ils voient la brindille dans celui du voisin ? Les liens séculaires qui existent entre les deux nations permettent de répondre à la question par la négative.

Certes, les deux scrutins n’ont pas le même degré de suspense : au Pays des hommes intègres, tout est visiblement plié, et l’actuel locataire du palais de Kosyam ne risque pas de perdre son moelleux fauteuil présidentiel, sauf tremblement de terre …Mais le jour des deux élections, pouvait-il avoir une oreille attentive à ce qui se déroule chez lui et une autre à ce qui se passe chez Gbagbo et Ado ?

Il a beau avoir un représentant, en la personne de Boureima Badini, sur les bords de la lagune Ebrié, difficile tout de même eût été pour lui ce genre d’exercice. Autant donc dire que ce report le comble d’aise. Sitôt expédié son scrutin du 21 novembre 2010 et après avoir obtenu son score « à hauteur d’homme » (Ndlr : en 2005, il a obtenu plus de 80% des suffrages, ce qui a suscité un documentaire hagiographique intitulé « Une victoire à hauteur d’homme »), il se consacrera à temps plein à sa mission de Facilitateur.

Le report ayant été décidé et accepté, vivement, que le « match-retour » ait lieu à la date prévue. Cependant, le changement de date n’a pas que des avantages. Le risque, c’est souvent d’ouvrir cette boîte de Pandore qu’est l’éternel changement de date. Les acteurs politiques ivoiriens le savent très bien. Dans l’Accord politique de Ouagadougou, le chronogramme de l’élection était étalé sur une dizaine de mois. Il a finalement fallu attendre trois ans pour que le projet soit réalité.

L’exemple de la Guinée est également assez édifiant à cet égard. C’est vrai que le 2nd tour y a eu lieu même si, jusqu’à présent, ses résultats ne sont pas connus, mais les multiples rendez-vous n’ont cependant pas donné grand-chose, ils ont plutôt pourri encore davantage l’atmosphère sociale. Vivement, que le pays d’Houphouët Boigny puisse éviter ce genre de travers, pour le plus grand bonheur de ceux qui y vivent, de leurs voisins les plus immédiats et de la communauté internationale.

Issa K. Barry

L’Observateur Paalga

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