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Séismes au CDP : Attention à l’implosion

Publié le mardi 14 septembre 2004 à 07h29min

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Il est des faits qui, mis bout à bout, peuvent édifier, surtout lorsqu’on est en politique. Pour le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) qui connaît actuellement de sérieuses secousses, la crise rampante a commencé presque à l’insu des principaux responsables. Pourtant, le parti a commencé à s’embourber sérieusement depuis la campagne pour la dernière consultation législative.

Il y a des hésitations qui vous envoient de lourdes factures difficiles à payer. Le CDP avait eu cette bonne idée d’instituer le système du collège électoral. Le pays fut applaudi par une bonne partie de la communauté internationale. "C’est de la démocratie, ça !" "Tiens, le Burkina donne des leçons." Puis, le mégaparti est reparti à ses anciennes formules à travers lesquelles le CDP seul choisit ses candidats, impose ses hommes, lesquels ont été décriés après un ou deux mandats par les populations du nid électoral concerné.

De cette antipathie conçue et produite en laboratoires CDP sont nés les départs, les transferts d’affections politiques et surtout le ravivage des querelles interpersonnelles et inter-compartiments de la géante organisation politique. Les militants populaires, dans leurs fiefs, ont fondu sur l’électorat pour discréditer les autres "protégés" par les pontes du parti. Effet d’entraînement : les mécontents ont discrédité parfois, sans le savoir, le CDP.

Les autres éléments ayant participé à l’érosion du parti se retrouvent dans le comportement de certaines têtes de proue de l’organisation politique. Pendant qu’à certains niveaux on trouve des hommes et des femmes qui se tuent au travail pour donner une bonne image au parti, et partant au président Blaise Compaoré, il y a juste à côté des M.C. pris dans les vertiges de leur propre marketing. En voulant s’adresser à l’opposition comme pour dire "Voyez, j’ai de la classe et je ne fais pas dans le mégotage", ces M.C. ont atteint un électorat vautré dans sa pauvreté. Cet électorat a senti ces comportements frisant la luxure comme une sorte d’injure. Alliant le verbe aux actions, des pontes du CDP ont appuyé sur la cote de popularité du parti.

Les derniers séismes régionaux ne sont donc pas à isoler de tout ce qui précède. Le maire de Bobo-Dioulasso et le député Salia Sanou ont toujours été de grands adversaires, ce n’était pas un secret pour les observateurs avertis. Mais les deux hommes avaient eu jusque-là la décence de ne pas jeter leurs divergences et leurs conflits d’intérêts sur la place publique. Maintenant, c’est chose faite, et les militants qui ont fait le voyage de Ouagadougou n’ignorent plus rien des dissensions qui existent entre leurs chefs politiques. Pis, ils doivent comprendre que le CDP d’aujourd’hui n’est pas celui d’hier. Les données ont changé, tant et si bien que la pagaille gagne certains rangs. Il y a encore quelques années, de tels écarts auraient systématiquement donné lieu à une expulsion pure et simple du parti. Mais Sanou et Koussoubé ne sont pas seuls à laver le linge familial en public.

Dans une adresse au secrétaire général de la section provinciale CDP du Yatenga, les délégués des 15 secteurs de la ville de Ouahigouya s’insurgent contre "la mauvaise gestion" de ladite section. Ils accusent le secrétaire général de poser des actes et de travailler avec des individus de moralité douteuse, toutes choses qui gênent le fonctionnement du CDP. Dans leur déclaration, les signataires reviennent sur la gestion du scrutin législatif de 2002 qu’ils ont estimée mauvaise. Ils s’arrêtent également sur le problème récurrent des parcelles à Ouahigouya, en passant par l’opacité qui entoure le renouvellement des bureaux dans les secteurs et les villages.

Toute cette atmosphère sulfureuse est impropre à la consommation, à quelques encablures de l’élection présidentielle. En 2002, le CDP avait vraiment vacillé. Pour l’élection qui pointe à l’horizon, les CDPistes peuvent être surpris. L’opposition burkinabè a commencé, depuis 2002, à se tailler de vastes parcelles dans le paysage politique. Imaginons donc le scénario suivant : dans ce climat de balbutiement du CDP, l’opposition peut se permettre 5 à 6 candidats.

Avec un deuxième tour, toujours dans ce contexte, cette opposition pourra choisir le mieux-disant, c’est-à-dire celui ayant obtenu le plus grand nombre de voix pour aller contre Blaise Compaoré. Dans cette ambiance de sympathie grandissante de l’électorat pour une tranche de l’opposition, ce serait bonjour l’alternance ! A moins que Blaise Compaoré ait d’autres cordes à son arc.

A la place du président du CDP, le Dromadaire commencerait par balayer devant sa porte en attendant de réécrire un manuel d’éthique politique. Avant qu’il ne soit trop tard.

M. J. Mimtiiri

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